Vu la décision en date du 30 janvier 1989 enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 6ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour M. Pierre X... dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 octobre 1988 ;
Vu, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 8 décembre 1988 et le 9 février 1989, la requête et le mémoire ampliatif présentés pour M. Pierre X... demeurant ... sur Garonne par Me Y... avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation, tendant à ce que la cour :
1°) annule le jugement du 5 octobre 1988 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a condamné la commune de Gagnac sur Garonne à lui verser la somme de 10.000 F en réparation des troubles que lui causent les odeurs émanant de la station communale d'épuration, et rejeté les conclusions tendant à la réparation des troubles causés par la présence au voisinage de son domicile d'un foyer de jeunes, et d'une remorque-décharge ;
2°) condamne la commune à lui verser une indemnité de 50.000 F en réparation des nuisances afférentes au club canin communal, une indemnité de 120.000 F en réparation des troubles de voisinage antérieurs au 15 mai 1987 et une indemnité de 10.000 F en réparation de ces mêmes troubles, à compter du 15 mai 1987 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi du 19 décembre 1917 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 1991 :
- le rapport de M. ZAPATA, conseiller ;
- et les conclusions de M. CIPRIANI, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. X... et de la commune de Gagnac sur Garonne présentent à juger des questions connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions de la commune de Gagnac sur Garonne :
Considérant que pour demander l'annulation du jugement du 5 octobre 1988 par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser une indemnité de 10.000 F à M. X..., en réparation du préjudice causé par les odeurs désagréables émanant de la station d'épuration, la commune soutient qu'elle n'est ni propriétaire ni exploitante dudit ouvrage ; qu'il résulte de l'instruction que la station d'épuration à l'origine du préjudice a été réalisée en 1975 par le syndicat intercommunal du Bocage qui en est propriétaire, et que son fonctionnement a fait l'objet d'un contrat d'affermage entre le syndicat intercommunal et la compagnie générale des eaux ; qu'il s'en suit que le tribunal administratif était tenu d'écarter les conclusions de M. X... dirigées contre la commune, pour ce chef de préjudice ; qu'il résulte de ce qui précède que la commune est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal l'a condamnée à verser 10.000 F à M. X... ;
Sur les conclusions de M. X... :
En ce qui concerne les nuisances provoquées par le fonctionnement du foyer de jeunes :
Considérant que les troubles dont se plaint M. X... n'ont pas pour origine la présence ou le fonctionnement de l'ouvrage public qui, par lui même, n'a causé aucun dommage ; que la responsabilité de la commune ne peut être mise en jeu, ainsi que le demande également M. X..., qu'en raison des fautes lourdes qu'aurait pu commettre le maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police ; que si les réunions du foyer de jeunes ont, en raison du bruit qu'elles provoquaient, porté atteinte à la tranquillité des riverains, il ne résulte pas de l'instruction que le défaut d'efficacité des mesures prises par le maire, c'est-à-dire la fermeture temporaire et l'isolation phonique du local, soit constitutif, en l'espèce, d'une faute lourde de nature à engager la responsabilité de la commune ; que dès lors M. X... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le jugement attaqué a, sur ce point, rejeté ses conclusions ;
En ce qui concerne les nuisances provoquées par le club canin :
Considérant que si M. X... demande réparation des nuisances provoquées par le fonctionnement du club canin dont l'implantation a été autorisée par la commune sur le domaine public, à proximité de l'habitation du requérant, il ne résulte pas de l'instruction que la création de ce club ait été décidée par la commune ni que son fonctionnement ait été assuré par la collectivité publique ; qu'ainsi les conclusions de M. X... doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
En ce qui concerne les nuisances provoquées par la benne-remorque à ordures :
Considérant que la benne-remorque aménagée en 1987 par la commune de Gagnac sur Garonne, sur un terrain lui appartenant, constitue un ouvrage public dont la présence et le fonctionnement engagent envers les tiers, la responsabilité de la commune maître de l'ouvrage ; qu'il résulte de l'instruction que le dépôt d'ordures non ménagères et ménagères, installé à proximité de l'habitation de M. X... cause à ce dernier, notamment par les odeurs qui s'en dégagent, une gêne excédant les inconvénients normaux du voisinage ; que cette circonstance lui ouvre droit à réparation du préjudice résultant pour lui des troubles dans ses conditions d'existence et dont il sera fait une juste appréciation en lui allouant une indemnité de 10.000 F, y compris les intérêts et intérêts capitalisés ; que par suite, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté ses conclusions relatives à ce chef de préjudice ;
En ce qui concerne la gêne résultant du passage et du stationnement d'un poids lourd :
Considérant d'une part, que le bruit résultant du passage, de l'arrêt et du démarrage d'un véhicule poids lourd sur la voie publique, devant l'habitation de M. X..., n'excède pas les inconvénients que doivent normalement supporter les riverains des voies publiques ;
Considérant, d'autre part, à supposer que M. X... ait entendu rechercher la responsabilité de la commune à raison de l'autorisation accordée par le maire au propriétaire d'un camion de stationner son véhicule sur une parcelle du domaine privé de la commune, qu'un tel acte ne ressortit pas à la compétence du juge administratif ; qu'en conséquence, les conclusions du requérant doivent être écartées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que, d'une part, la commune n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser 10.000 F à M. X..., d'autre part, M. X... n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le même jugement, le tribunal administratif de Toulouse n'a condamné la commune de Gagnac sur Garonne à lui verser qu'une somme de 10.000 F ;
Article 1er : Les requêtes de la commune de Gagnac sur Garonne et de M. X... sont rejetées.