Vu la requête et le mémoire ampliatif enregistrés respectivement le 12 mars et le 24 avril 1996 au greffe de la Cour, présentés par M. X..., demeurant 2 A boulevard 1848 à Narbonne (Aude) ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 31 janvier 1996 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 4.386.000 F en réparation du préjudice que lui ont causé les fautes commises par les services du travail et de l'emploi, de l'action sanitaire et sociale, et de la justice, dans le traitement de la procédure de licenciement engagée à son encontre par l'association familiale pour l'aide aux infirmes mentaux et dans les suites de cette procédure ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4.698.000 F ;
3 ) de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la Cour de cassation devant se prononcer sur le litige l'opposant à l'association familiale pour l'aide aux infirmes mentaux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 1999 :
- le rapport de A. de MALAFOSSE ;
- et les conclusions de D. PEANO, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'assocation familiale pour l'aide aux infirmes mentaux (AFDAIM), qui gérait à Narbonne un institut médico-professionnel, un centre d'aide par le travail et un foyer, a sollicité à la fin de l'année 1984, en application des dispositions de l'article L. 321-7 du code du travail alors en vigueur, l'autorisation de procéder au licenciement pour motif économique de deux salariés, parmi lesquels se trouvait M. X... ; que cette autorisation lui a été accordée par l'inspecteur du travail de Carcassonne ; que, par une décision du 23 décembre 1987, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a rejeté l'appel formé par M. X... contre le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 juin 1985 qui avait rejeté le recours pour excès de pouvoir formé par M. X... contre cette autorisation administrative ; que, par une décision du 28 avril 1989, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a rejeté le recours en révision introduit par M. X... à l'encontre de l'arrêt susmentionné du 23 décembre 1987, au motif que la requête avait été présentée sans le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et était donc irrecevable ; que M. X..., qui ne conteste pas le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté pour incompétence ses conclusions dirigées contre l'AFDAIM, recherche la responsabilité de l'Etat en invoquant l'atteinte au droit à un procès équitable portée par cette décision du Conseil d'Etat du 28 avril 1989 et les fautes commises tant par l'inspection du travail dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle que par les services de l'action sanitaire et sociale dans leur devoir de communiquer les documents administratifs qu'ils détenaient en tant qu'organisme de tutelle de l'AFDAIM ;
Sur la responsabilité de l'Etat à raison de la violation du droit à un procès équitable :
Considérant que si, en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, une faute lourde commise dans l'exercice de la fonction juridictionnelle par une juridiction administrative est susceptible d'ouvrir droit à indemnité, l'autorité qui s'attache à la chose jugée s'oppose à la mise en jeu de cette responsabilité dans le cas où la faute lourde alléguée résulterait du contenu même de la décision juridictionnelle et où cette décision serait devenue définitive ;
Considérant qu'en soutenant que l'irrecevabilité qui a été opposée à son recours en révision par la décision susmentionnée en date du 28 avril 1989 porte atteinte aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantissent le droit à un procès équitable, M. X... conteste le contenu même de cette décision juridictionnelle devenue définitive ; qu'il résulte de ce qui précède que ces conclusions doivent être rejetées ;
Sur la responsabilité de l'Etat à raison des fautes qui auraient été commises par les services du travail et de l'emploi :
Considérant que, dans les conditions où il était organisé, l'exercice par l'autorité administrative des pouvoirs de contrôle de l'emploi qu'elle tenait de l'article L. 321-1 du code du travail en matière de licenciement du personnel pour motif économique ne peut engager la responsabilité de l'Etat que si cet exercice révèle l'existence d'une faute lourde commise par l'administration ;
Considérant, d'une part, que la procédure de concertation n'étant requise, en vertu des dispositions combinées des articles L. 321-3 et L. 321-9 du code du travail, que lorsque le nombre des licenciements envisagés est au moins égal à dix dans une même période de trente jours, l'inspecteur du travail de Carcassonne n'avait à se prononcer que sur la réalité du motif économique invoqué par l'employeur et n'a donc commis aucune faute en s'abstenant de vérifier si l'AFDAIM avait respecté les exigences de la convention collective en matière de concertation ;
Considérant, d'autre part, qu'eu égard aux éléments fournis par ladite association à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement, d'où il ressortait notamment que l'emploi de moniteur d'éducation physique qu'occupait M. X... à l'institut-médico-professionnel de Narbonne-plage était supprimé en raison de la fermeture de cet établissement, l'inspecteur du travail de Carcassonne, qui n'était pas tenu de solliciter la production d'éléments complémentaires dès lors que le dossier d'autorisation administrative comprenait les éléments requis par les textes, n'a pas commis de faute lourde en autorisant ce licenciement ;
Sur la responsabilité de l'Etat à raison des fautes qui auraient été commises par la direction départementale de l'action sanitaire et sociale de l'Aude :
Considérant qu'à supposer que la direction départementale de l'action sanitaire et sociale de l'Aude ait commis une faute en ne communiquant à M. X... qu'en mars 1989 les états nominatifs du personnel employé par l'AFDAIM dans ses établissements de Narbonne, dont l'intéressé avait demandé communication dès février 1985, il ne résulte pas de l'instruction qu'à défaut de disposer de ces documents en temps utile, M. X..., qui pouvait avoir recours à d'autres moyens de preuve, n'ait pas été en mesure de démontrer devant les juridictions compétentes le caractère selon lui fallacieux du motif économique invoqué par l'AFDAIM à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 4.386.000 F ;
Article 1ER : La requête de M. X... est rejetée.