Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 7 mai 1999, présentée par la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, représentée par son directeur général, et dont le siège est situé ... ;
La CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 10 mars 1999 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, statuant dans la formation prévue à l'article L. 4-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur, a, d'une part, annulé sa décision du 19 avril 1996 notifiant à Mme B... la mise en place d'un précompte effectué mensuellement sur l'allocation temporaire d'invalidité qui lui était servie, et l'a, d'autre part, condamnée en premier lieu à rembourser à l'intéressée les prélèvements indûment effectués sur l'allocation temporaire d'invalidité à elle allouée, avec les intérêts y afférents dûs à compter du 5 novembre 1996, en second lieu à verser à Mme B... la somme de 4 000 F au titre de l'article L. 8-1 du même code ;
- de rejeter la demande de Mme B... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative, ensemble le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 modifiée, relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ;
Vu le décret n° 63-1346 du 24 décembre 1963 modifié relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux agents permanents des collectivités locales et de leurs établissements publics ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2001 :
- le rapport de Mlle Roca;
- les observations de Maître X..., collaborateur de la SCP Rustmann-Joly-Wickers-Lasserre-Maysounabe, avocat de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS ;
- les observations de Maître Deffieux, avocat de Mme B... ;
- et les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 du décret du 24 décembre 1963 susvisé : "Lorsque l'agent a obtenu du tiers responsable au titre de la même invalidité permanente une réparation de caractère viager autre que l'allocation temporaire d'invalidité et que la caisse des dépôts et consignations ne peut plus exercer le droit de subrogation prévu par l'ordonnance n° 59- 76 modifiée par la loi n° 68-2 du 2 janvier 1968, l'allocation est diminuée du montant de cette réparation. Si la réparation attribuée est un capital, l'allocation est diminuée du montant de la rente viagère qu'aurait produit ledit capital s'il avait été placé, à la date d'entrée en jouissance de l'allocation ou à la date de versement si elle est postérieure, à capital aliéné à la caisse nationale de prévoyance" ;
Considérant qu'à la suite de l'accident de service dont elle a été victime le 5 juillet 1982, Mme B..., agent technique auprès de la ville de Niort, a obtenu du tiers responsable de l'accident qu'elle a assigné devant le tribunal correctionnel de Niort le versement d'une indemnité de 36 752,15 F pour solde du préjudice corporel non personnel ; que, dans sa séance du 21 décembre 1993, la commission de réforme du département des Deux- Sèvres a considéré que Mme B... était atteinte d'une incapacité permanente partielle de 13 % imputable à cet accident et une allocation temporaire d'invalidité a été attribuée à l'intéressée à compter du 25 septembre 1993 ; que par décision du 19 avril 1996, la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, estimant au regard des dispositions ci-dessus citées que la somme perçue par Mme B... en réparation de son préjudice corporel non personnel n'était pas cumulable avec l'allocation temporaire d'invalidité à elle servie, a instauré un système de retenue mensuelle effectuée sur le montant de cette allocation jusqu'à son extinction et correspondant globalement au montant de la rente viagère qu'aurait produit la somme de 36 752,15 F si elle avait été placée à capital aliéné à la caisse nationale de prévoyance à compter du 25 septembre 1993 ; que par le jugement présentement attaqué par la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cette décision du 19 avril 1996 et condamné l'établissement public à rembourser à Mme B... les prélèvements indûment effectués sur son allocation temporaire d'invalidité, avec intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 1996 ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert commis par le juge pénal, le docteur Y..., que Mme B... a été atteinte de graves traumatismes du crâne, de la face, du thorax et des membres, du fait de l'accident dont elle a été victime en 1982 ; que le docteur Z..., dont les conclusions ont été entérinées par la commission de réforme dans son avis émis le 21 décembre 1993, a indiqué dans son rapport établi le 19 octobre 1993 à la demande de la ville de Niort que les phénomènes douloureux dont se plaint Mme B... en 1993 sont en grande partie imputables à son accident de 1982 ; que selon les deux certificats établis les 24 et 28 septembre 1993 par le docteur A..., tous les arrêts de travail de Mme B... survenus pendant la période courant du mois de février 1990 au mois de septembre 1993 sont en rapport avec l'accident de service du 5 juillet 1982 ; qu'au vu de ces éléments, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'invalidité permanente partielle de 13 % reconnue à Mme B... en 1993 doit être regardée comme en relation directe avec cet accident, nonobstant la circonstance que le médecin commis par l'assureur du tiers responsable dudit accident a conclu dans un sens opposé ; que la circonstance alléguée par Mme B... que la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS se serait trompée en 1985 dans l'évaluation du taux d'invalidité résultant de l'accident de service ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre des dispositions de l'article 13 du décret précité et soulève un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel ;
Considérant, en second lieu, que si la subrogation investit le subrogé de tous les droits et actions du subrogeant, le subrogé ne saurait exercer ces droits et actions qu'à la condition que le subrogeant ne les ait pas lui-même déjà exercés ; qu'en l'espèce, Mme B... ayant fait valoir à l'encontre du tiers responsable de l'accident ses droits à indemnité, lesquels ont été définitivement fixés par la décision du tribunal correctionnel de Niort intervenue le 27 juin 1985, la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, qui agit par subrogation dans les droits de celle-ci, ne saurait faire valoir une nouvelle fois lesdits droits ; qu'ainsi, les deux conditions exigées par l'article 13 précité du décret du 24 décembre 1963 étant remplies, la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS pouvait légalement diminuer l'allocation temporaire d'invalidité versée à Mme B... du montant de la réparation perçue afférente à son préjudice corporel non personnel ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a statué dans le sens ci-dessus indiqué ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à Mme B... une somme au titre des frais que celle-ci a engagés non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mme B... à payer à la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS une somme en application de ces mêmes dispositions ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 10 mars 1999 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de Mme B... et celles de la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.