Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour respectivement les 24 août et 27 décembre 2000, présentée pour M. Nécati X, demeurant ..., par la société civile professionnelle Denjean-MC. Etelin -C. Etelin, avocats au barreau de Toulouse ;
M. X demande à la cour :
1° d'annuler le jugement du 22 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre la décision du préfet du département de la Haute-Garonne du 16 octobre 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir la décision précitée du préfet de la Haute-Garonne ;
3° d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt de la cette cour ;
.........................................................................................................
Classement CNIJ : 335-01-03 C
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux du 5 février 2001 admettant M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 octobre 2003 :
- le rapport de M. Bayle, conseiller ;
- et les conclusions de M. Rey, commissaire du gouvernement ;
Sur le refus de séjour :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant que, par l'arrêté attaqué du 16 octobre 1998, le préfet du département de la Haute-Garonne a refusé à M. X la délivrance de la carte de résident prévue par le 5° de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, qui dispose que, sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, une telle carte est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour, au conjoint d'un étranger titulaire de la carte de résident, qui a été autorisé à séjourner en France au titre du regroupement familial ; que cet acte a été signé par le secrétaire général de la préfecture, à qui le préfet avait délégué sa signature par un arrêté du 3 avril 1996, publié au recueil spécial des actes administratifs du mois d'avril 1996 ; que l'intéressé n'établit pas que, comme il semble le soutenir, cet acte n'était plus en vigueur à la date de la décision attaquée ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision doit être écarté ;
Considérant que l'arrêté litigieux, qui vise les articles 6, 15 5° et 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, indique les motifs de faits pour lesquels l'intéressé ne pouvait obtenir une carte de résident ; qu'ainsi, il énonce les considérations de droit et de fait qui motivent la décision et satisfait aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979, alors même qu'il ne précise pas les raisons pour lesquelles les articles 8 et 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnus ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant que l'arrêté attaqué, qui a refusé à M. X une carte de résident aux motifs qu'il ne satisfaisait pas, d'une part, aux conditions pour bénéficier d'un regroupement familial, d'autre part, à l'exigence de régularité de séjour en France posée par le 1er alinéa de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, n'a ni pour objet, ni pour effet de renvoyer le requérant vers la Turquie, son pays d'origine ; que, par suite, l'intéressé ne peut utilement ni faire valoir les risques qu'il est susceptible de courir dans ce pays ni se prévaloir des dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention susmentionnée : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ... ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui et qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;
Considérant que, si M. X soutient qu'il a épousé à l'étranger, le 24 avril 1997, une compatriote titulaire d'une carte de résident avec qui il vit effectivement en France, et que, ses frères résidant en Allemagne et en Suisse, il n'a plus d'autres attaches familiales dans son pays d'origine que ses parents dont il est sans nouvelle, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour en France du requérant, qui n'établit pas n'avoir plus aucune famille en Turquie, la décision du préfet n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande dirigée contre le refus de séjour dont il a fait l'objet le 16 octobre 1998 ;
Sur la demande d'injonction :
Considérant que le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions de M. X tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois ne peuvent être accueillies ;
DECIDE :
Article 1 : La requête de M. Nécati X est rejetée.
4
N° 00BX02039