Vu, 1°) enregistrés les 20 juillet 2001, 10 septembre 2001 et 9 décembre 2003, sous le n° 01BX01784, la requête et les mémoires ampliatifs présentés pour la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DES LANDES, dont le siège social est sis ...
172- 40104 Dax, par Maître Charles X..., avocat, qui demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 17 mai 2001 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé les arrêtés en date du 25 novembre 1997 par lesquels le préfet des Landes a fixé la liste des animaux classés nuisibles et les modalités de leur destruction à tir en tant qu'ils concernent la belette, la fouine, le renard, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l'étourneau sansonnet et le geai des chênes ;
- de rejeter la demande de l'Association pour la protection des animaux sauvages devant le tribunal administratif de Pau ;
.................................................................................................................
Classement CNIJ : 03-08-005 C+
Vu 2°) enregistrée le 27 juillet 2001 sous le n° 01BX01833 la requête présentée par le MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT, qui demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 17 mai 2001 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé les arrêtés en date du 25 novembre 1997 par lesquels le préfet des Landes a fixé la liste des animaux classés nuisibles et les modalités de leur destruction à tir en tant qu'ils concernent la belette, la fouine, le renard, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l'étourneau sansonnet et le geai des chênes ;
- de rejeter la demande de l'Association pour la protection des animaux sauvages devant le tribunal administratif de Pau ;
.......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 79/ 409 CEE relative à la conservation des oiseaux sauvages ;
Vu la directive n° 92/43 CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation
des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;
Vu la loi n°95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement ;
Vu le décret n° 88-940 du 30 septembre 1988 relatif à la destruction des animaux classés nuisibles ;
Vu le décret n° 90-756 du 22 août 1990 portant publication de la convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe ;
Vu l'arrêté du 30 septembre 1988 fixant la liste des animaux susceptibles d'être classés nuisibles ;
Vu le code rural ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2003 :
- le rapport de M. Taoumi, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Boulard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requête susvisées présentées par la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DES LANDES et le MINISTRE DE l'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT ont le même objet et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que, par jugement en date du 17 mai 2001, le tribunal administratif de Pau a annulé les arrêtés du préfet des Landes en date du 25 novembre 1997 fixant la liste des animaux classés nuisibles et les modalités de leur destruction à tir pour l'année 1998 en tant qu'ils visaient le renard, la martre, le putois, la belette, la fouine, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l'étourneau sansonnet et le geai des chênes ; que pour prononcer cette annulation le tribunal s'est fondé sur la méconnaissance par le préfet des dispositions de l'article 16 de la directive européenne du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;
Considérant que si l'article 16 susvisé permet aux Etats membres de déroger aux dispositions des articles 12 à 15 de la directive , qui instaurent un système de protection stricte des espèces animales énumérées à l'annexe IV point a) et de celles figurant à l'annexe V point a), à la condition qu'il n'existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien , dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, il est constant que seuls la martre et le putois figurent à l'annexe V point a) fixant la liste des espèces animales et végétales d'intérêt communautaire dont le prélèvement dans la nature et l'exploitation sont susceptibles de faire l'objet de mesures de gestion ; que , par suite, La FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DES LANDES et le MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'article 16 de la directive du 21 mai 1992 pour annuler, sur la demande de l'association, les arrêtés précités du préfet des Landes en tant qu'ils concernent le renard, la belette, la fouine, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l'étourneau sansonnet et le geai des chênes ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel , d'examiner les autres moyens soulevés par l'Association de protection des animaux sauvages devant le tribunal administratif ;
Sur l'intérêt donnant qualité pour agir à l'ASPAS ;
Considérant que contrairement à ce que soutient la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DES LANDES, l'Association pour la protection des animaux sauvages est une association dont l'objet statutaire de protection de la faune sauvage est clairement défini comme s'exerçant au plan national pour notamment ester en justice contre les décisions administratives susceptibles de porter atteinte aux buts qu'elle s'est fixés ; que, dès lors, en l'absence de toute représentation locale, elle présente un intérêt pour agir conte les arrêtés litigieux du préfet des Landes, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'association requérante n'ait été agréée, au titre des associations pour la protection de la nature et de l'environnement, que dans le cadre du département de la Drôme par le préfet de ce département ;
Sur la légalité de l'arrêté du 25 novembre 1997 fixant la liste des espèces classées nuisibles dans le département des Landes :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant qu'aucune disposition législative ni aucun principe général ne fait obligation au préfet d'organiser une représentation paritaire entre les intérêts cynégétiques et écologiques au sein du conseil départemental de la chasse et de la faune sauvage ; que , par suite, le moyen tiré par l'association requérante de ce que la composition et le fonctionnement du conseil départemental de la chasse et de la faune sauvage des Landes seraient contraires au principe d'égalité, ne peut être accueilli ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose de motiver les arrêtés fixant la liste des animaux classés nuisibles et les modalités de leur destruction ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté litigieux est inopérant ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, que les stipulations de la convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe dite convention de Berne créent seulement des obligations entre les Etats parties et ne produisent pas d'effets directs dans l'ordre juridique interne ; que l'association requérante ne peut utilement se prévaloir de la violation de cette convention pour soutenir que l'arrêté attaqué serait illégal ;
Considérant, en deuxième lieu, que le décret du 30 septembre 1988 autorise la destruction de certaines espèces animales nuisibles sur le fondement du régime dérogatoire justifié en l'espèce, soit dans l'intérêt général de la santé publique , soit pour les dommages causés aux cultures, aux élevages ou à la faune sauvage ; qu'ainsi ledit décret a pu prévoir un régime permettant au préfet d'autoriser la destruction desdites espèces, après avoir contrôlé dans l'appréciation de la situation locale à laquelle il se livre, qu'il n'existait pas de solution alternative à la destruction plus satisfaisante ; que le moyen tiré de la méconnaissance par le décret du 30 septembre 1988 et par l'arrêté du même jour de la directive européenne du 2 avril 1979 et de celle du 21 mai 1992 , lesquelles prévoient elles-mêmes des dérogations aux mesures de protection qu'elles envisagent, doit être écarté ; qu'enfin, le moyen tiré de ce que le renard ne serait pas une espèce nuisible est inopérant à l'appui des conclusions présentées contre l'arrêté attaqué dès lors que cette espèce a été classée nuisible au plan national par l'arrêté du 30 septembre 1988 ;
Considérant, en troisième lieu, que si l'association requérante a entendu se prévaloir du principe de précaution énoncé à l'article 1er de la loi susvisée du 2 février 1995, il résulte de l'instruction que l'arrêté litigieux, qui se borne à dresser une liste d'espèces nuisibles, ne fait pas courir des dommages graves et irréversibles à l'environnement au sens de cette disposition ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 3 du décret susvisé du 30 septembre 1988, codifié à l'article R. 227-6 du code rural : Dans chaque département, le préfet détermine les espèces d'animaux nuisibles parmi celles, figurant sur la liste prévue à l'article 2, en fonction de la situation locale, et pour l'un des motifs ci-après : 1° dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ; 2° pour prévenir les dommages importants aux activités agricoles, forestières et aquacoles ; 3° pour la protection de la flore et de la faune ; qu'il résulte de ces dispositions qu'au titre d'une année considérée, il peut être légalement procédé au classement, parmi les nuisibles, d'une espèce animale figurant sur la liste établie par l'arrêté susvisé du 30 septembre 1988 pris pour l'application de l'article 2 du décret du 30 septembre 1988, dès lors que cette espèce est répandue de façon significative dans le département et que, compte tenu des caractéristiques géographiques, économiques et humaines de celui-ci, sa présence est susceptible de porter atteinte aux intérêts protégés par les dispositions précitées ou dès lors qu'il est établi qu'elle est à l'origine d'atteintes significatives aux intérêts protégés par ces mêmes dispositions ;
Considérant qu'en l'absence d'études scientifiques, les relevés de piégeage pour la période 1997-1998 constituent un indicateur fiable pour apprécier la situation locale et mesurer l'importance des populations d'animaux en cause dans le département des Landes ; que le préfet a pu se fonder sur ces relevés pour estimer que le renard est une espèce répandue de manière significative dans le département des Landes et que cette espèce est susceptible de porter atteinte aux intérêts que le classement comme nuisible d'une espèce animale doit protéger en vertu de l'article R.227-6 du code rural précité ; qu'ainsi le préfet des Landes a pu, sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation, classer le renard dans la liste des espèces nuisibles ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la belette, la fouine, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l'étourneau sansonnet et le geai des chênes étaient, en 1997, des espèces répandues de façon significative dans le département des Landes ; qu'il n'est par ailleurs pas établi par l'administration que ces espèces aient porté atteinte aux intérêts que le classement comme nuisible d'une espèce animale doit protéger aux termes de l'article R.227-6 du code rural ;
Sur l'arrêté du 25 novembre 1997 fixant les modalités de destruction à tir des espèces classées nuisibles :
Considérant que, comme il résulte de ce qui vient d'être dit , l'arrêté du préfet des Landes en date du 25 novembre 1997 est illégal en tant qu'il classe la belette, la fouine, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l'étourneau sansonnet et le geai des chênes parmi les espèces nuisibles ; que l'arrêté du même jour fixant les modalités de destruction à tir est illégal par voie de conséquence en tant qu'il vise lesdites espèces ; que, toutefois, l'ASPAS n'invoque aucun moyen pour critiquer les modalités de destruction à tir du renard ; qu'elle n'est pas fondée à contester la légalité dudit arrêté en tant qu'il vise cette espèce ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DES LANDES et le MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Pau a, par le jugement attaqué, annulé les arrêtés du 25 novembre 1997 en tant qu'ils concernent la belette , la fouine, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l'étourneau sansonnet et le geai des chênes ; qu'ils sont en revanche fondés à demander l'annulation dudit jugement en tant qu'il vise le renard ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à l' ASPAS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Pau du 17 mai 2001 sont annulés en tant qu'ils annulent en ce qui concerne le renard les arrêtés du préfet des Landes du 25 novembre 1997.
Article 2 : Le surplus de la demande de l'Association de protection des animaux sauvages devant le tribunal administratif de Pau, le surplus de ses conclusions devant la cour ainsi que le surplus des conclusions de la FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DES LANDES et du MINISTRE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L'ENVIRONNEMENT sont rejetés.
6
01BX01784/01BX01833