Vu la requête, enregistrée le 5 août 2000 au greffe de la cour, présentée pour Mme Jeannine X, demeurant ..., par Me Régis Dupey, avocat au Barreau de Toulouse ;
Mme X demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en date du 4 avril 2000 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été réclamées pour les années 1989 et 1991, ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 8 000 F (1 219,59 euros) en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Classement CNIJ : 19-04
19-04-01-02
19-04-02-03-01-01
19-04-02-01-05 C+
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2004 :
- le rapport de Mme Leymonerie, premier conseiller ;
- les observations de Me Dupey, pour Mme Jeannine X ;
- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
En ce qui concerne les indemnités de congé payé :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société X Nettoyage, constituée entre les héritiers de M. Roger X, a repris, avec effet au 1er mai 1990, l'activité exercée par ce dernier dans le cadre d'un contrat de location-gérance d'un fonds de commerce, dont la société requérante a également acquis la propriété ; que l'administration a remis en cause la déduction du résultat imposable de la société de l'exercice 1991 des indemnités de congé payé versées au personnel et correspondant à la période antérieure à la reprise de l'activité de l'entreprise individuelle de M. Roger X ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment... 1° bis. Pour les exercices clos à compter du 31 décembre 1987... l'indemnité de congé payé calculée dans les conditions prévues aux articles L. 223-11 à L. 223-13 du code du travail, y compris les charges sociales afférentes à cette indemnité... ; qu'en application de l'article L. 122-12-1 du code du travail : A moins que la modification visée au deuxième alinéa de l'article L. 122-12 n'intervienne dans le cadre d'une procédure de règlement judiciaire,...le nouvel employeur est en outre tenu, à l'égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, des obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de cette modification ;
Considérant que si, en application du 1° bis du paragraphe 1 de l'article 39, les indemnités de congé payé doivent être déduites des résultats de l'exercice au cours duquel est né le droit à congé, ces dispositions ne sauraient faire obstacle à la remise en cause d'une telle déduction si l'entreprise ne supporte pas en définitive la charge du paiement des indemnités et, corrélativement, à la déduction des sommes correspondantes par l'employeur tenu d'en assurer effectivement le paiement ; qu'ainsi, en cas de transfert, comme en l'espèce, des contrats de travail à un nouvel employeur, ce dernier substitué en vertu de l'article L. 122-12-1 du code du travail à l'employeur précédent et tenu à ce titre au paiement de toutes les sommes et indemnités se rattachant aux contrats de travail, est en droit d'inclure les indemnités de congé payé dans les charges déductibles des résultats de l'exercice au cours duquel elles ont été versées, bien que les droits à congé payé aient pris naissance avant le transfert ; que la circonstance que les salariés concernés sont susceptibles d'exiger le paiement de ces indemnités de leur ancien employeur ne saurait ni remettre en cause l'obligation qui pèse sur le nouvel employeur, ni dénaturer la charge supportée par ce dernier lors du versement effectif des sommes dues à ce titre ; que, dès lors, c'est à bon droit que la société X Nettoyage a inclus les indemnités en litige dans ses charges déductibles de l'exercice 1991 ; que ces indemnités, d'un montant de 262 022,00 F (39 945,00 euros), ont donc été considérées à tort comme un revenu distribué au profit de Mme X au titre de la même année ;
En ce qui concerne le compte fournisseur :
Considérant qu'aux termes du paragraphe 2 de l'article 38 du code général des impôts : Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt... L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ; que les erreurs qui entachent un bilan afférent à une période pour laquelle le droit de reprise de l'administration est prescrit, et qui entraînent une minoration de l'actif net, peuvent être corrigées à l'initiative de l'administration, à la suite d'une vérification, dans les bilans de clôture des exercices non couverts par la prescription ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le bilan de l'entreprise individuelle de M. X a présenté, à partir de l'exercice clos en 1986, une dette à l'égard de M. Y, propriétaire du fonds de commerce, d'un montant de 22 361 F (3 408,91 euros), soldée au 30 avril 1990, date de la clôture du bilan de cessation de l'activité de l'entreprise, par le crédit du compte de l'exploitant ; que Mme X, à qui il appartient de justifier des écritures comptables, ne fournit aucun élément sur la nature et la réalité de la dette ; que l'administration était donc fondée à réintégrer le montant de cette obligation dans le résultat imposable du premier exercice non prescrit ; que le premier acte interruptif de l'exercice du droit de reprise est intervenu le 21 mars 1992, lors de l'envoi de la notification de redressement ; qu'à cette date, le premier exercice non prescrit était l'exercice 1989 ; que l'administration a donc réintégré à bon droit dans le résultat imposable de l'année 1989 le montant de la dette en litige, alors même que la vérification avait également porté sur l'année 1988 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est fondée à solliciter l'annulation du jugement attaqué qu'en tant qu'il a rejeté sa demande afférente à l'imposition, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, de la somme représentative des indemnités de congé payé prise en charge par la société X Nettoyage ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à Mme X la somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assignée à Mme Jeannine X au titre de l'année 1991 est réduite d'une somme de 39 945,00 euros (262 022,00 F).
Article 2 : Mme X est déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse, en date du 4 avril 2000, est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 ci-dessus.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à Mme X une somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
00BX01824 - 4 -