Vu le recours, enregistré le 21 janvier 2002, par lequel le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement N° 9900825 du 23 août 2001 par lesquels le tribunal administratif de Poitiers a accordé à M. X la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1994, 1995 et 1996 à hauteur, respectivement, de 157 500 F, 191 170 F et 187 434 F et a condamné l'Etat à verser à M. X la somme de 200 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2°) de rétablir M. X au rôle de l'impôt sur le revenu, à hauteur des sommes susmentionnées ;
3°) subsidiairement, de faire droit à sa demande de compensation, de rétablir M. X au rôle de l'impôt sur le revenu à hauteur de 47 255 F, soit 7 203,98 euros, au titre de l'année 1994, 52 119 F, soit 7 945,49 euros, au titre de l'année 1995 et 47 934 F, soit 7 307,49 euros au titre de l'année 1996 et de réformer en conséquence le jugement attaqué ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention du 27 juin 1973 entre la République française et l'Etat espagnol en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mai 2005 :
- le rapport de Mme Jayat
- et les conclusions de Mme Boulard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par le jugement attaqué du 23 août 2001, le tribunal administratif de Poitiers a estimé que les rémunérations versées à M. X par la société espagnole RI Management et consulting n'étaient pas imposables en France et a en conséquence, après avoir rejeté la demande de compensation présentée par l'administration, accordé au contribuable la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti à raison de ces rémunérations au titre des années 1994, 1995 et 1996 à hauteur, respectivement, de 157 500 F, 191 170 F et 187 434 F ; que le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE tend, à titre principal, à ce que la totalité des impositions dont M. X a été déchargé par le jugement attaqué soit remise à la charge du contribuable et, à titre subsidiaire, à la compensation entre le montant de ces impositions et celui des insuffisances constatées par le service dans le calcul de l'imposition des revenus imposables en France ;
Sur le désistement des conclusions principales du recours :
Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE a déclaré se désister de ses conclusions principales tendant à ce que soit remise à la charge de M. X la totalité des impositions dont la décharge a été accordée par les premiers juges ; que ce désistement est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;
Sur la recevabilité du recours :
Considérant qu'aux termes de l'article R 200-18 du livre des procédures fiscales : « A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de l'administration des impôts ou de l'administration des douanes et droits indirects qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget. Le délai imparti pour saisir la cour administrative d'appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l'alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement du tribunal administratif de Poitiers a été notifié le 24 septembre 2001 au directeur des vérifications nationales et internationales qui a suivi l'affaire ; que le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, lequel est suffisamment motivé, a été adressé par télécopie le 21 janvier 2002 au greffe de la cour et a fait l'objet d'une régularisation le 23 janvier 2002 ; qu'il a donc été présenté dans le délai dont disposait le ministre pour faire appel ;
Sur la compensation :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 203 du livre des procédures fiscales : « Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande » ;
Considérant, d'autre part, que l'article 25 de la convention du 27 juin 1973 entre la République française et l'Etat espagnol en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune stipule : « … l'impôt français peut être calculé sur le revenu imposable en France en vertu de la présente Convention au taux correspondant au montant global du revenu imposable conformément à la législation française » ; que ces stipulations permettent seulement de retenir, pour la détermination du taux effectif applicable aux revenus imposables en France en vertu de la convention, le montant global du revenu imposable selon la législation française ; que, selon l'article 81 A du même code : « I. Les traitements et salaires perçus en rémunération de leur activité à l'étranger par des personnes de nationalité française qui ont leur domicile fiscal en France et qui sont envoyées à l'étranger par un employeur établi en France, ne sont pas soumis à l'impôt lorsque le contribuable justifie que les rémunérations en cause ont été effectivement soumises à un impôt sur le revenu dans l'Etat où s'exerce son activité et que cet impôt est au moins égal aux deux tiers de celui qu'il aurait à supporter en France sur la même base d'imposition … III. Lorsque l'intéressé ne peut bénéficier de ces exonérations, ces rémunérations ne sont soumises à l'impôt en France qu'à concurrence du montant du salaire qu'il aurait perçu si son activité avait été exercée en France » ;
Considérant qu'il est constant que l'impôt sur le revenu auquel M. X a été assujetti en France a été calculé par application d'un taux effectif déterminé abstraction faite des « indemnités pour contraintes et sujétions liées à une activité exercée à l'étranger » versées au contribuable par la société RI Management et consulting dont ledit contribuable soutient qu'en application de l'article 81 A du code général des impôts, elles ne seraient pas imposables selon la législation française et devraient, par suite, être exclues de la base de détermination du taux effectif d'imposition de ses revenus en France ; qu'il résulte de l'instruction et qu'il est d'ailleurs soutenu par l'intimé lui-même qu'« au cours des années considérées …(il était titulaire) d'un contrat de travail régulièrement conclu avec la société RIMC » ; que, dans ces conditions, M. X, salarié de la société RI Management et consulting, ne peut être regardé comme ayant été envoyé à l'étranger par un employeur établi en France au sens des dispositions précitées de l'article 81 A du code général des impôts ; qu'ainsi, et alors même que l'impôt acquitté en Espagne serait supérieur à celui qui aurait été supporté en France et que les indemnités qui ont été exclues de la base de détermination du taux effectif n'auraient pas été perçues si le contribuable avait exercé son activité en France, les indemnités dont s'agit ne peuvent être tenues comme entrant dans le champ des exonérations prévues par ce texte et doivent, par suite, conformément aux stipulations précitées de la convention du 27 juin 1973, être prises en compte pour la détermination du taux d'imposition des revenus imposables en France de M. X ;
Considérant que l'intimé se prévaut, sur le fondement de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 19 de la documentation administrative de base 5 B 1122 mise à jour au 15 mars 1993 aux termes duquel « Ces mesures d'exonération totale ou partielle sont toutes subordonnées à la condition que le salarié soit envoyé à l'étranger par un employeur établi en France. En d'autres termes, seule l'existence d'un lien contractuel ou statutaire avec un employeur installé en France permet au salarié travaillant à l'étranger d'en bénéficier. Lorsque ce lien existe, il n'y a pas lieu de se préoccuper de savoir si la rémunération est payée en totalité ou en partie en France ou à l'étranger. De même, le fait que le salaire soit supporté par l'entreprise installée en France ou par un de ses établissements ou même par une de ses filiales à l'étranger demeure sans incidence. En revanche, ces mesures particulières ne sauraient bénéficier à des salariés embauchés directement par un employeur établi à l'étranger. Dans cette hypothèse, la rémunération est imposable dans les conditions de droit commun » ; que M. X, qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, était lié à la société RI Management et consulting par un contrat de travail et était, par suite, embauché directement par cet employeur établi en Espagne, ne peut, alors même que la société RI Management et consulting est une filiale de la société Rémy Cointreau, société française d'un groupe dont il était également le salarié, et que son engagement par la société espagnole serait intervenu à la demande de la société mère, se prévaloir de la doctrine qu'il invoque pour soutenir que les indemnités qu'il a reçues de la société RI Management et consulting doivent être exclues de la base de détermination du taux effectif de son imposition en France ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de compensation présentée par l'administration entre les sommes dont il a accordé la décharge et les insuffisances résultant d'un taux effectif d'imposition erroné ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à demander le rétablissement de M. X au rôle de l'impôt sur le revenu à hauteur des montants non contestés de 47 255 F, soit 7 203,98 euros, au titre de l'année 1994, 52 119 F, soit 7 945,49 euros, au titre de l'année 1995 et 47 934 F, soit 7 307,49 euros au titre de l'année 1996 ;
Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions principales du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE tendant à ce que soit remise à la charge de M. X la totalité des impositions dont la décharge a été accordée par le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 août 2001.
Article 2 : M. X est rétabli au rôle de l'impôt sur le revenu au titre des années 1994, 1995 et 1996, à hauteur, respectivement, de 7 203,98 euros, 7 945,49 euros et 7 307,49 euros.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 août 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 02BX00147