Vu la requête, enregistrée le 25 novembre 2002, présentée pour M. Alain X, domicilié ... par Me Lacassagne ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 01/1912, 01/1935 du 18 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 6 mars 2001 du directeur des services fiscaux de la Haute-Garonne refusant de faire droit à sa demande d'atténuation, à titre gracieux, de l'impôt sur le revenu des années 1991 à 1994 ;
2°) de prononcer l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ;
…………………………………………………………………………………………….
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 2006 :
- le rapport de M. Lerner, rapporteur ;
- les observations de Me Lacassagne, pour M. X ;
- et les conclusions de M. Doré, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales : « L'administration peut accorder sur la demande du contribuable : / 1º Des remises totales ou partielles d'impôts directs régulièrement établis lorsque le contribuable est dans l'impossibilité de payer par suite de gêne ou d'indigence » ; que l'instruction n° 231 du 21 décembre 1999 précise : « … Les personnes en grande difficulté peuvent demander auprès de certains organismes sociaux le bénéfice d'aides financières d'urgence. Leurs dettes fiscales feront automatiquement l'objet d'un examen gracieux selon les modalités ci-après. I. Personnes concernées : Il s'agit des personnes dont la situation de grande difficulté sociale est attestée par l'un des organismes instruisant les demandes d'aides financières d'urgence … II. Impositions concernées : Il s'agit des cotisations d'impôt sur le revenu, de taxe d'habitation et de taxes foncières ainsi que de la redevance audiovisuelle … III. Forme de la demande … Ces demandes sont adressées aux trésoreries générales. Celles-ci les communiquent aux comptables publics compétents … Ces comptables les retransmettent aux centres des impôts dont relèvent les contribuables … IV. Décision à prendre : Lorsqu'un des organismes sociaux mentionne sur le document transmis … qu'une aide financière d'urgence a déjà été accordée depuis le 1er septembre 1999, il conviendra de prononcer la remise ou la modération gracieuse des dettes fiscales. Lorsque l'organisme ne mentionne pas qu'une aide financière a été accordée mais atteste que le contribuable est, en raison de sa situation de grande difficulté, susceptible de se voir accorder une telle aide, il conviendra d'examiner avec une particulière bienveillance si l'intéressé peut bénéficier d'une remise ou d'une modération gracieuse… Il conviendra seulement d'écarter les demandeurs qui ne sont pas de bonne foi … ou qui disposent d'un patrimoine autre que l'habitation principale et dont la réalisation leur permettrait de s'acquitter de leurs dettes fiscales. » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de M. X de remise ou de modération gracieuse de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1991 à 1994, le directeur des services fiscaux de la Haute-Garonne n'a retenu que la circonstance que l'intéressé n'avait pas bénéficié d'une aide financière d'urgence depuis le 1er septembre 1999 ; qu'en écartant la demande pour ce seul motif, sans examiner la situation personnelle de l'intéressé, le directeur des services fiscaux a commis une erreur de droit entachant d'excès de pouvoir sa décision du 6 mars 2001 ;
Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision, dont l'annulation est demandée, est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que, dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;
Considérant que, pour établir que la décision attaquée était légale, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie invoque, dans son mémoire en défense communiqué à M. X, un autre motif, tiré de ce que ce dernier ne justifiait pas, à la date de cette décision, être en situation de gêne ou d'indigence ;
Considérant que M. X ne disposait d'aucun revenu à la date de la décision attaquée, alors qu'il était redevable d'une dette fiscale d'un montant de 115 601 euros ; que le motif ainsi substitué n'est donc pas davantage de nature à fonder légalement la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Toulouse en date du 18 juin 2002 et la décision du directeur des services fiscaux de la Haute-Garonne en date du 6 mars 2001 sont annulés.
3
N° 02BX02370