Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2006, présentée pour Mme X... Eugénie X épouse Y, élisant domicile ..., par Me Y... ; Mme Y demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 06/00779 du 2 mars 2006, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 21 février 2006 du préfet de la Dordogne ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de condamner l'État à lui verser la somme de 1 000,00 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2006 :
- le rapport de Mme Erstein, président délégué ;
- les observations de Me Y... pour Mme Y ;
- et les conclusions de M. Doré, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait » ;
Considérant que Mme Y, de nationalité camerounaise, s'est maintenue sur le territoire national plus d'un mois après la notification, le 17 janvier 2006, de la décision du préfet de la Dordogne en date du 12 janvier 2006 refusant de lui délivrer un titre de séjour ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code précité : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” est délivrée de plein droit : (…) 4° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée en France ait été régulière, que la communauté de vie n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (…) » ; qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du même code : « Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4º de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative peut accorder le renouvellement du titre » ;
Considérant qu'il est constant qu'à la date à laquelle a été prise la décision susvisée du 12 janvier 2006, Mme Y ne remplissait pas la condition de communauté de vie entre époux lui ouvrant droit à la délivrance ou au renouvellement d'une carte de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français ; que si la requérante soutient que la communauté de vie a été rompue à son initiative en raison des violences qu'elle a subies de la part de son mari, cette circonstance n'est pas, compte tenu des termes de l'article L. 313-12 précité, de nature à la faire bénéficier de plein droit du renouvellement d'un titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Dordogne ne pouvait légalement lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sans méconnaître les dispositions précitées doit être écarté ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment de ce que l'intéressée, en France depuis à peine plus d'un an à la date du refus opposé à sa demande de délivrance d'un titre de séjour, était en instance de divorce, que le préfet aurait inexactement apprécié la situation de Mme Y en opposant un tel refus ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 313-11 du code déjà cité : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” est délivrée de plein droit : (…) 11° À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique (…) » ;
Considérant que le médecin inspecteur de santé publique, saisi pour avis, a estimé, le 16 décembre 2005, que si Mme Y doit être prise en charge médicalement, elle n'est pas exposée à des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni à l'impossibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, qui constitue le pays de renvoi ; que le préfet de la Dordogne n'était dès lors pas tenu de délivrer sur ce fondement un titre de séjour à la requérante ;
Considérant que la circonstance que Mme Y était titulaire d'un contrat de travail depuis le 1er novembre 2005 n'impliquait pas qu'elle pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en tant que salarié ;
Considérant que, ainsi qu'il vient d'être dit, Mme Y ne relevait pas de la catégorie d'étrangers définie au 10° de l'article L. 511 ;4 du code précité qui ne peuvent pas faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière compte tenu de leur état de santé ;
Considérant que Mme Y, entrée en France à la fin de l'année 2004, à l'âge de 33 ans, ne conteste pas, qu'à l'exception de son mari, avec lequel elle est en instance de divorce, l'ensemble des membres de sa famille résident au Cameroun ; que la mesure de reconduite qu'elle conteste ne peut être regardée, dans ces circonstances, comme portant au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte manifestement disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle ne méconnaît pas davantage les stipulations de l'article 6 de ladite convention, dès lors que rien ne s'oppose à ce que la requérante puisse exercer ses droits dans le cadre de l'instance en divorce depuis son pays d'origine ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que, les conclusions à fin d'annulation étant rejetées, les conclusions susvisées ne peuvent qu'être également écartées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à Mme Y la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme Y est rejetée.