Vu, enregistrée au greffe de la cour le 22 juillet 2003, la requête présentée, par le cabinet d'avocats Ducomte et Herrmann, pour M. Philippe X, demeurant ... ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 22 avril 2003 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 août 2000 par lequel le maire de la commune de Toulouse a constaté l'urgence qu'il y avait à procéder au nettoyage et à la désinsectisation du logement situé 14, place Olivier à Toulouse et de l'arrêté en date du 14 septembre 2000 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a prescrit la réalisation des travaux de nettoyage et de désinsectisation dans un délai de 48 heures et à défaut, leur exécution d'office par la ville de Toulouse ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;
3°) de lui allouer la somme de 8 000 F (1 219,59 euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement sanitaire départemental ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2006 :
- le rapport de M. Margelidon, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le 30 août 2000, le maire de la commune de Toulouse, sur le fondement d'un rapport du service communal d'hygiène, a pris un arrêté à l'encontre des occupants d'un appartement sis 14, place Olivier les mettant en demeure, dans un délai de 48 heures, de procéder à des travaux de nettoyage et de désinsectisation dudit appartement sous peine d'y procéder d'office aux frais des occupants ; que, par un arrêté du 14 septembre 2000, le préfet de la Haute-Garonne enjoignait aux occupants dudit appartement de procéder aux travaux nécessaires et, dans un délai de 48 heures, faute de quoi la commune pourrait y procéder d'office à leurs frais ; que, M. X, occupant de l'appartement en question, fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande d'annulation desdits arrêtés ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre à la demande de première instance :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté du 30 août 2000 du maire de la commune de Toulouse et l'arrêté du 14 septembre 2000 du préfet de la Haute-Garonne, adressés tous deux à M. et Mme X, comportaient la mention des voies et délais de recours ; que, dans ces conditions, la demande présentée par M. Philippe X, leur fils, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Toulouse le 25 septembre 2001, n'était pas tardive ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre ne peut qu'être écartée ;
Sur les conclusions en annulation de l'arrêté municipal du 30 août 2000 mettant en demeure les intéressés de procéder au nettoyage et à la désinsectisation de leur logement :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête à l'encontre dudit arrêté ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Elle comprend notamment : (…) 5° Le soin de prévenir par des précautions convenables, (…), les maladies épidémiques ou contagieuses, (…), de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours (…) » ; qu'aux termes de l'article L.2212-4 dudit code : « En cas de danger grave ou imminent, (…), le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances. » ; qu'aux termes de l'article L.17 du code de la santé publique dont les dispositions ont été reprises à l'article L.1311-4 du même code : « En cas d'urgence, c'est-à-dire en cas d'épidémie ou d'un autre danger imminent pour la santé publique, le représentant de l'Etat dans le département peut ordonner l'exécution immédiate, tous droits réservés, des mesures prescrites par les règlements sanitaires prévus au présent chapitre. L'urgence doit être constatée par un arrêté du maire, (…) » ;
Considérant que l'existence de pouvoirs de police spéciale, reconnus au préfet en application de l'article L. 17 précité du code de la santé publique, ne fait pas obstacle à ce que le maire, en présence d'un péril grave et imminent, use de ses pouvoirs de police générale pour assurer le maintien de la sécurité publique, sauf si cet usage, hors du cas d'urgence susmentionné, a eu pour objet ou pour effet de ne pas respecter la procédure prévue par la police spéciale ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour considérer qu'il y avait urgence à intervenir et mettre en demeure les occupants du logement de procéder à des travaux de nettoyage et de désinsectisation dans les 48 heures, le maire de la commune s'est fondé sur un rapport, dressé par un agent de salubrité du service communal d'hygiène et de sécurité, faisant état de l'amoncellement au sein du logement de cartons, emballages plastiques, chiffons et papiers ainsi que de la présence de « quelques » aliments périssables déposés au milieu desdites « ordures » et soulignant que les « moucherons et les araignées pullulent » ; qu'il ne ressort, cependant, pas des pièces du dossier que des souches épidémiques ou contagieuses aient été identifiées dans l'appartement ; que si les parents du requérant sont âgés, il ne ressort pas des pièces du dossier que le désordre très important qui y règne ainsi que sa saleté constituent un danger grave et imminent de nature à permettre au maire de la commune d'exercer les pouvoirs de police générale qu'il tient des dispositions du code général des collectivités territoriales en méconnaissance de la procédure prévue par la police spéciale telle qu'issue des dispositions précitées du code de la santé publique et qui donne compétence au seul préfet pour enjoindre aux occupants d'un logement privé de procéder aux mesures nécessaires ;
Sur les conclusions en annulation de l'arrêté préfectoral du 14 septembre 2000 :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête à l'encontre dudit arrêté ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'article L.17 précité du code de la santé publique que les pouvoirs exceptionnels qu'il confère à l'autorité administrative peuvent être mis en oeuvre soit en cas d'épidémie, soit lorsque se présente un « autre danger imminent pour la santé publique » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la situation sanitaire qui prévalait dans le logement occupé par le requérant et ses parents, pour préoccupante qu'elle soit, ne constituait pas un danger imminent pour la santé publique ; qu'ainsi, en estimant que ladite situation sanitaire justifiait qu'il soit enjoint aux occupants du logement de procéder dans un délai de 48 heures à des travaux de nettoyage et de désinsectisation et que, passé ce délai, il serait procédé à l'exécution d'office des mesures nécessaires par la commune, le préfet de la Haute-Garonne a fait une inexacte application des pouvoirs qu'il tient de l'article L.17 du code de la santé publique ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté municipal du 30 août 2000 mettant en demeure les occupants du logement en cause de procéder aux travaux nécessaires, d'autre part, de l'arrêté préfectoral du 14 septembre 2000 ; que, par suite, il y a lieu d'annuler lesdites décisions ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Toulouse et l'Etat à verser à M. X une somme globale de 1 300 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X qui, dans la présente instance n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à la commune de Toulouse la somme qu'elle demande sur ce même fondement ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 22 avril 2003 est annulé.
Article 2 : L'arrêté municipal du 30 août 2000 mettant en demeure les occupants du logement en cause de procéder aux travaux nécessaires et l'arrêté préfectoral du 14 septembre 2000 sont annulés.
Article 3 : La commune de Toulouse et l'Etat sont condamnés à verser à M. X une somme globale de 1 300 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Toulouse tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 03BX01503