Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 13 octobre 2005, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-PAUL, représentée par son maire, par Me Lepage ;
La COMMUNE DE SAINT-PAUL demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 août 2005 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé la délibération du conseil municipal de la commune du 29 juin 2004 ;
2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par le préfet de la Réunion devant le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion et, à titre subsidiaire, de ne prononcer l'annulation de la délibération du conseil municipal de Saint-Paul du 29 juin 2004 qu'en tant qu'elle a autorisé le maire de la commune à interdire les cultures d'organismes génétiquement modifiés ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 2001/18/CEE du Parlement Européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le décret n° 93-1177 du 18 octobre 1993 ;
Vu l'arrêté du 21 septembre 1994 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2007 :
- le rapport de Mme Aubert ;
- les observations de Me Gossement, avocat de la COMMUNE DE SAINT-PAUL ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la COMMUNE DE SAINT-PAUL demande l'annulation du jugement du 9 août 2005 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé la délibération du 29 juin 2004 par laquelle le conseil municipal de Saint-Paul a manifesté son opposition à des essais et cultures de plantes génétiquement modifiées sur le territoire de la commune et a autorisé le maire à user de ses prérogatives pour interdire de tels essais et cultures ;
Sur la recevabilité du déféré du préfet de la Réunion :
Considérant, en premier lieu, que le sous-préfet de Saint-Paul était compétent, en vertu des dispositions des articles L. 2131-1 et L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales, pour former un recours gracieux à l'encontre de la délibération en litige ; qu'il ressort des pièces du dossier que le recours gracieux qu'il a formé contre cette délibération avait pour but d'en obtenir le retrait dans son entier ; qu'il a eu ainsi le même objet que le déféré du préfet de la Réunion et a régulièrement prorogé le délai de recours contentieux ; que, dès lors, la COMMUNE DE SAINT-PAUL n'est pas fondée à soutenir que le déféré du préfet de la Réunion était tardif ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le recours gracieux a été formé par le sous-préfet de Saint-Paul ne faisait pas obstacle à ce que la délibération en litige soit déférée au tribunal administratif par le préfet de la Réunion ;
Considérant, en troisième lieu, que cette délibération, par laquelle le conseil municipal a exprimé des voeux, est insusceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir à moins qu'il n'en soit disposé autrement par la loi ; que tel est le cas lorsque, sur le fondement des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, le préfet défère au tribunal administratif les actes des collectivités territoriales qu'il estime contraires à la légalité ; qu'il suit de là que la COMMUNE DE SAINT-PAUL n'est pas fondée à soutenir que la délibération en litige n'était pas susceptible d'être déférée au tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion par le préfet de la Réunion ;
Sur la légalité de la délibération du conseil municipal de Saint-Paul du 29 juin 2004 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 533-2 du code de l'environnement : « Au sens du présent chapitre, on entend par dissémination volontaire toute introduction intentionnelle dans l'environnement, à des fins de recherche ou de développement ou à toute autre fin que la mise sur le marché, d'un organisme génétiquement modifié ou d'une combinaison d'organismes génétiquement modifiés » ; qu'aux termes de l'article L. 533-3 du même code codifiant l'article 11 de la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 transposant la directive n° 90/220/CEE du 23 avril 1990 : « Toute dissémination volontaire, ou tout programme coordonné de telles disséminations, est subordonné à une autorisation préalable. Cette autorisation est délivrée par l'autorité administrative après examen des risques que présente la dissémination pour la santé publique ou pour l'environnement. Elle peut être assortie de prescriptions. Elle ne vaut que pour l'opération pour laquelle elle a été sollicitée » ; qu'aux termes de l'article L. 535-2 du même code : « I. Dans tous les cas où une nouvelle évaluation des risques que la présence d'organismes génétiquement modifiés fait courir à la santé publique ou à l'environnement le justifie, l'autorité administrative peut, aux frais du titulaire de l'autorisation ou des détenteurs des organismes génétiquement modifiés : 1°) suspendre l'autorisation dans l'attente d'informations complémentaires et, s'il y a lieu, ordonner le retrait des produits de la vente ou en interdire l'utilisation ; 2°) imposer des modifications aux conditions de la dissémination volontaire ; 3°) retirer l'autorisation ; 4°) ordonner la destruction des organismes génétiquement modifiés et, en cas de carence du titulaire de l'autorisation ou du détenteur, y faire procéder d'office. II. Sauf en cas d'urgence, ces mesures ne peuvent intervenir que si le titulaire a été mis à même de présenter ses observations » ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 93-1377 du 18 octobre 1993 susvisé : « L'autorisation prévue par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1992 susvisée est, s'agissant de plantes, semences ou plants génétiquement modifiés, délivrée par le ministre chargé de l'agriculture après accord du ministre de l'environnement » ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : « Dans tous les cas où une nouvelle évaluation des risques que la présence d'organismes génétiquement modifiés fait courir à la santé publique ou l'environnement le justifie, le ministre chargé de l'agriculture peut, aux frais du titulaire de l'autorisation : a) suspendre l'autorisation dans l'attente d'informations complémentaires ; b) modifier les prescriptions spéciales ; c) retirer l'autorisation si ces risques sont tels qu'aucune mesure ne puisse les faire disparaître ; d) ordonner la destruction des organismes génétiquement modifiés et, en cas de carence du titulaire de l'autorisation, y faire procéder d'office. Sauf en cas d'urgence, ces mesures ne peuvent intervenir que si le titulaire de l'autorisation a été mis à même de présenter ses observations » ; que l'article 1er de l'arrêté du 21 septembre 1994 prévoit que le dossier technique transmis au ministre de l'agriculture comprend des informations concernant le site de dissémination, la proximité de biotopes officiellement reconnus ou de zones protégées susceptibles d'être affectées, des informations concernant la dissémination, notamment l'objectif de la dissémination, la date et la durée prévues de l'opération, la méthode de dissémination envisagée, la préparation et la gestion du site avant, pendant et après la dissémination, y compris les pratiques culturales et les méthodes de récolte ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : … 5°) le soin de prévenir, par des prescriptions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, … les pollutions de toute nature, … de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure… » ; qu'aux termes de l'article L. 2212-4 du même code : « En cas de danger grave ou imminent, tels que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances… » ;
Considérant que s'il appartient au maire, en vertu des pouvoirs de police qu'il tient des articles L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, le régime d'autorisation administrative de la dissémination volontaire d'un organisme génétiquement modifié institué dans un but de police par l'article L. 533-3 du code de l'environnement relève de la compétence exclusive du ministre de l'agriculture ; qu'une autorité administrative ne pouvant trouver dans une incompatibilité de dispositions législatives avec des règles communautaires un fondement juridique l'habilitant à exercer des compétences que ces dispositions législatives attribuent à une autre autorité, la circonstance, à la supposer établie, que les dispositions de la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 modifiée, figurant désormais au titre III du livre cinquième du code de l'environnement, n'assureraient pas une transposition complète des dispositions de la directive 2001/18/CEE du Parlement Européen et du Conseil du 12 mars 2001 ne saurait être utilement invoquée par la COMMUNE DE SAINT-PAUL, pour soutenir que son maire était compétent pour édicter le règlement litigieux ; que, dès lors, le maire ne peut, en l'absence de danger grave ou imminent, s'immiscer dans l'exercice des pouvoirs de police spéciale relevant des attributions des services de l'Etat ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour décider, par sa délibération du 29 juin 2004, de s'opposer aux essais et cultures en plein champ de plantes génétiquement modifiées et d'autoriser le maire de la commune à mettre en oeuvre ses pouvoirs de police pour interdire de tels essais et de telles cultures, le conseil municipal s'est fondé sur l'existence d'un danger grave et imminent au sens de l'article L. 2214-4 du code général des collectivités territoriales ; que si la commune soutient que les autorisations d'effectuer les essais en plein champ de plantes génétiquement modifiées délivrées par le ministre de l'agriculture ne sont pas conformes à la directive du 12 mars 2001, cette circonstance à la supposer établie, n'est pas de nature à caractériser l'existence d'un tel danger ; que, dans ces conditions, le conseil municipal ne pouvait se prononcer en faveur de l'interdiction d'essais et de cultures de plantes génétiquement modifiées sur le territoire de la commune ni conduire le maire à s'immiscer dans l'exercice des pouvoirs de police spéciale relevant des attributions des services de l'Etat en l'autorisant à mettre en oeuvre le pouvoir de police générale qu'il tient des articles L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales pour interdire les essais et les cultures de plantes génétiquement modifiées ; qu'ainsi, et alors même qu'elle concerne une affaire d'intérêt local, sa délibération du 29 juin 2004 est entachée d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE SAINT-PAUL n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a fait droit au déféré du préfet de la Réunion ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la COMMUNE DE SAINT-PAUL la somme qu'elle demande sur le fondement de ces dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SAINT-PAUL est rejetée.
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No 05BX02080