Vu I°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 janvier 2006, sous le n° 06BX00152, présentée pour Mme X demeurant, ..., représentée par Me Henry ;
Elle demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 24 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire (CHU) de Limoges à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite d'une intervention chirurgicale réalisée le 6 janvier 2000 ;
2°) à titre principal, de condamner le CHU de Limoges à lui verser une indemnité provisionnelle de 10 000 euros et à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;
3°) de condamner le CHU de Limoges à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu II°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 17 mars 2006 sous le n° 06BX00582 présentée par la CPAM de la HAUTE-VIENNE siégeant 22 avenue Jean Gagnant à Limoges (87000).
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Vu le jugement attaqué ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement convoquées à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2008
le rapport de Mme Fabien, premier conseiller ;
et les conclusions de Mme Viard, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par requête enregistrée sous le n° 06BX00152, Mme X fait appel du jugement du Tribunal administratif de Limoges en date du 24 novembre 2005 rejetant sa demande tendant à la condamnation du CHU de Limoges à l'indemniser des conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale qu'elle a subie le 6 janvier 2000 en soutenant que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, le défaut fautif d'information sur les risques présentés par cette intervention lui a fait perdre une chance de se soustraire au risque s'étant finalement réalisé ; que, par requête enregistrée sous le n° 06BX00582, la CPAM de la HAUTE-VIENNE fait appel du même jugement rejetant sa demande tendant à la condamnation du CHU de Limoges à lui verser une indemnité en remboursement de ses débours liés à l'intervention du 6 janvier 2000 ; que ces requêtes sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
Sur les conclusions présentées par Mme X :
Considérant que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité, de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation ;
Considérant qu'il ressort du compte rendu opératoire que l'intervention subie par Mme X le 6 janvier 2000 avait pour objet la correction de séquelles d'un angiome congénital de la lèvre supérieure droite présentées par Mme X par la réalisation d'une commissuroplastie labiale droite, d'une symétrisation narinaire et l'approfondissement du vestibule supérieur droit ; qu'il résulte de l'instruction , et en particulier du rapport de l'expert désigné par le Tribunal administratif que, d'une part, les fuites salivaires présentées par Mme X sont imputables à l'intervention du 6 janvier 2000 qui a provoqué une légère dystopie commissurale avec rigidité musculaire péri-commissurale droite et légère hyposthésie de la lèvre muqueuse du côté droit et que, d'autre part, les commissuroplasties entraînent parfois des fuites salivaires ;
Considérant qu'il est constant que le CHU de Limoges n'a pas informé l'intéressée des risques connus inhérents à l'intervention chirurgicale ; que ce défaut d'information constitue une faute de nature à engager la responsabilité du CHU de Limoges à raison du préjudice résultant pour Mme X de la perte de chance de se soustraire au risque s'étant finalement réalisé ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que, ainsi que le soutient le CHU de Limoges, l'intervention aurait été indispensable en raison d'une importante gêne respiratoire présentée par Mme X, cette dernière faisant valoir en revanche, dans le dernier état de ses écritures, qu'elle ne souffrait plus d'aucune gêne respiratoire à la suite d'une ostéotomie du 7 juin 1999 et que la finalité de l'intervention du 6 janvier 2000 était principalement esthétique ; que compte tenu du rapprochement entre, d'une part, les risques inhérents à l'intervention et , d'autre part, les avantages attendus de l'intervention, la perte de chance subie par Mme X de se soustraire au risque s'étant finalement réalisé doit être évaluée à 20 % ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le Tribunal administratif, que Mme X a subi une invalidité temporaire totale de 8 jours résultant de la nécessité de procéder à deux nouvelles interventions chirurgicales ainsi que des souffrances évaluées à 2,5 sur une échelle de 7 ; qu'à raison des fuites salivaires subsistantes lors de l'alimentation, elle subit une invalidité permanente partielle évaluée à 5 % par l'expert compte tenu des répercussions psychologiques ainsi qu'un préjudice esthétique évalué à 1 sur une échelle de 7 ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'atteinte à son intégrité physique et des troubles dans ses conditions d'existence, incluant le préjudice d'agrément, résultant de son invalidité permanente partielle ainsi que des troubles temporaires dans ses conditions d'existence résultant de son invalidité temporaire totale en les évaluant à 4 900 euros ; qu'il sera fait une juste appréciation de ses souffrances ainsi que de son préjudice esthétique en les évaluant respectivement à 1000 et 600 euros ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de prescrire une nouvelle expertise que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande indemnitaire et que le CHU de Limoges doit être condamné à lui verser une somme de 1 300 euros correspondant à l'indemnisation de la perte de chance subie par Mme X ;
Sur les conclusions présentées par la CPAM de la HAUTE-VIENNE :
Considérant qu'aux termes de l'article R 811-7 du code de justice administrative : « Les appels ainsi que les mémoires déposés devant la cour administrative d'appel doivent être présentés à peine d'irrecevabilité par l'un des mandataires mentionnés à l'article R 431-2. .. » ;
Considérant que, malgré l'invitation qui lui a été adressée en ce sens, la CPAM de la HAUTE-VIENNE n'a pas régularisé le dépôt de ses écritures par ministère d'avocat ; que par suite, ses conclusions doivent être rejetées comme étant irrecevables ;
Sur les conclusions présentées en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CHU de Limoges, qui n'est pas la partie perdante dans le litige l'opposant à la CPAM de la HAUTE-VIENNE, soit condamné à verser à cette dernière la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il n'y a pas lieu de condamner le CHU de Limoges à verser une somme à ce titre à Mme X ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Limoges en date du 24 novembre 2005 est annulé.
Article 2 : Le CHU de Limoges est condamné à verser à Mme X une indemnité de 1 300 euros.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par Mme X est rejeté.
Article 4 : La requête présentée par la CPAM de la HAUTE-VIENNE est rejetée.
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06BX00152, 06BX00582