Vu la requête, enregistrée le 15 juin 2007, présentée par le PREFET de la GIRONDE ; le PREFET de la GIRONDE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0701344 du 5 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à la demande de M. Oualid X, en annulant l'arrêté du 20 février 2007 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à M. X, dans un délai d'un mois, et mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie modifié relatif à l'entrée et au séjour du 17 mars 1988 et le décret n° 89 ;57 portant publication de l'accord ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, modifiée, notamment son article 24 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2008 :
- le rapport de Mme Leymonerie, premier conseiller ;
- les observations de Me Jouteau, pour M. X ;
- et les conclusions de M. Doré, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par arrêté du 20 février 2007, le PREFET de la GIRONDE a rejeté la demande de délivrance de titre de séjour présentée par M. X, ressortissant tunisien ; qu'il a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ; que le préfet fait appel du jugement rendu par le Tribunal administratif de Bordeaux ayant annulé ledit arrêté ;
Sur l'exception de non-lieu à statuer :
Considérant que la circonstance que le PREFET de la GIRONDE a délivré à l'intéressé le 19 janvier 2008 une carte de séjour temporaire valable six mois ne rend pas sans objet son appel ;
Sur le refus de titre de séjour :
Considérant que selon les stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien susvisé : « Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” » ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi d'une carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour “compétences et talents” sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois » ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” est délivrée de plein droit : […] 4º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français » ;
Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;
Considérant que M. X, ressortissant tunisien né le 24 octobre 1976 à Zouaouine (Tunisie), a épousé, le 10 février 2007 à Bordeaux, Mlle Elaouimri, de nationalité française, et a sollicité le 15 février suivant, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 4° de l'article L. 313-11 précité ; que l'intéressé était entré en France sous couvert d'un visa touristique ; que le refus de titre de séjour attaqué a été pris sur le fondement de son entrée irrégulière sur le territoire français ;
Considérant que, pour établir que la décision attaquée était légale, l'administration, en appel, fait valoir un autre motif tiré de ce que M. X ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11 4° et L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute d'être en possession d'un visa d'une durée supérieure à trois mois ;
Considérant que cette substitution de motif n'a privé M. X d'aucune garantie procédurale ; que M. X, qui s'était maintenu en situation irrégulière sur le territoire français, au-delà du délai de trois, ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour temporaire ; que, dès lors, le PREFET de la GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 20 février 2007 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Bordeaux ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le signataire de l'arrêté contesté, M. François Peny, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, a été habilité pour ce faire par arrêté de délégation du 20 février 2006 du PREFET de la GIRONDE régulièrement publié ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant soutient que le préfet n'a pas mis en oeuvre la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, cet article ne s'applique pas dans le cas où il est statué sur une demande telle que celle présentée par l'intéressé ;
Considérant, en troisième lieu, que si le préfet a considéré que M. X était entré irrégulièrement sur le territoire français alors que, sur son passeport, figurait le tampon d'un visa accordé en 1998, M. X, ainsi qu'il l'a été dit ci-dessus, n'était pas bénéficiaire d'un visa délivré pour une durée supérieure à trois mois prévu par l'article L. 311-7 du code précité pour demander un titre de séjour et qu'il était en situation irrégulière sur le territoire français ; que, par suite, le moyen du requérant tiré de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur de droit manque en fait ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (…) » ;
Considérant que si M. X soutient s'être marié le 10 février 2007 avec une ressortissante française, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu, d'une part, de son séjour irrégulier sur le territoire français, du caractère récent de son mariage, du fait qu'il n'établit pas qu'il a vécu avec sa future épouse depuis 2004, d'autre part, des attaches familiales qu'il conserve dans son pays d'origine dans lequel il séjourne régulièrement, le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs pour lesquels l'arrêté en litige a été pris ;
Considérant que si M. X fait valoir qu'il est inscrit dans le cadre d'un « protocole médical particulièrement long et citoyen », il ressort des pièces du dossier qu'après la délivrance d'un titre de séjour “étranger malade” pour la période du 6 octobre 2005 au 6 avril 2006, le médecin inspecteur de santé publique a, par un avis du 28 juin 2006, estimé que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que le requérant n'établit pas que le protocole dont il se prévaut nécessitait, à la date de la décision attaquée, sa présence continue sur le territoire français ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionnée à l'article L. 311-11 … » ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. X n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour, sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le PREFET de la GIRONDE n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté du PREFET de la GIRONDE serait irrégulier, faute d'avoir été précédé de la consultation de la commission du titre de séjour, doit être écarté ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le signataire de la décision contestée, M. François Peny, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, a été habilité pour ce faire par arrêté de délégation du 20 février 2006 du PREFET de la GIRONDE régulièrement publié ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'obligation de quitter le territoire français manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de l'absence de consultation de la commission du titre de séjour prévue par l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512 ;1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ;
Considérant, enfin, que, pour les motifs exposés ci-dessus, la décision d'obligation de quitter le territoire français n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs pour lesquels elle a été prise et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'étranger ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET de la GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 20 février 2007 ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0701344 en date du 5 juin 2007 du Tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : La demande de M. X tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 février 2007 est rejetée.
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N° 07BX01256