Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 29 mars 2006, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ;
LE GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0501047-1 du 22 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé la décision du directeur du centre pénitentiaire du Port en date du 26 octobre 2005 plaçant M. X à l'isolement par mesure de précaution ou de sécurité et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X audit Tribunal administratif ;
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Considérant que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE fait appel du jugement n° 0501047-1 du 22 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé la décision du directeur du centre pénitentiaire du Port en date du 26 octobre 2005 plaçant M. X à l'isolement par mesure de précaution ou de sécurité ;
Considérant qu'aux termes de l'article D. 283-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue du décret du 8 décembre 1998 en vigueur à la date de la décision contestée : « Tout détenu se trouvant dans un établissement ou quartier en commun peut soit sur sa demande, soit par mesure de précaution ou de sécurité, être placé à l'isolement. La mise à l'isolement est ordonnée par le chef de l'établissement qui rend compte à bref délai au directeur régional et au juge de l'application des peines. Le chef de l'établissement fait en outre rapport à la commission de l'application des peines dès la première réunion suivant la mise à l'isolement ou le refus opposé à la demande d'isolement du détenu (…) La durée de l'isolement ne peut être prolongée au-delà de trois mois sans qu'un nouveau rapport ait été fait devant la commission de l'application des peines et sans une décision du directeur régional. La mesure d'isolement ne peut être prolongée au-delà d'un an à partir de la décision initiale que par décision du ministre de la justice, prise sur rapport motivé du directeur régional qui recueille préalablement les avis de la commission de l'application des peines et du médecin intervenant à l'établissement (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que depuis qu'il a été transféré le 2 juillet 2005 de la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis au centre pénitentiaire du Port, M. X a fait l'objet de plusieurs procédures disciplinaires, motivées notamment par des insultes adressées à un surveillant, par la dégradation de sa cellule et par la détention d'un téléphone portable ; que les notices individuelles, produites devant la Cour, et renseignées par le juge d'instruction et le juge des libertés et de la détention, indiquent que M. X, qui est à la recherche de moyens de communication avec l'extérieur, est un individu à surveiller très particulièrement en raison de risques d'évasion importants ; qu'en outre, il ressort des rapports versés au débat que M. X multiplie les accusations à l'égard de co-détenus ou de membres de l'administration pénitentiaire qui doivent également veiller à ce qu'il ne mette pas ses jours en danger comme il en fait la menace ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision plaçant M. X à l'isolement par mesure de précaution ou de sécurité, le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion s'est fondé sur le motif que les faits qui lui sont reprochés pour justifier sa mise à l'isolement ne sont pas suffisamment établis et que le directeur du centre pénitentiaire du Port avait commis une erreur d'appréciation en estimant que cette mesure était nécessaire pour préserver l'ordre et la sécurité dans la prison ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X tant devant le tribunal administratif que devant la Cour ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que le directeur du centre pénitentiaire du Port a donné délégation au directeur adjoint dudit centre à l'effet de signer les décisions de placement à l'isolement ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur du centre pénitentiaire du Port n'était pas absent ou empêché le 26 octobre 2005, date de la signature de la décision contestée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le directeur adjoint n'était pas compétent pour signer cette décision doit être écarté ;
Considérant que si M. X fait valoir qu'il avait déjà fait l'objet d'un placement à l'isolement le 5 juillet 2005 et que la décision contestée en date du 26 octobre 2005 a été prise au terme d'une procédure irrégulière et sur le fondement d'une base légale erronée dès lors qu'elle constitue, non une décision initiale de placement à l'isolement relevant de la compétence du chef d'établissement mais une décision de prolongation relevant de la compétence du directeur régional, il ressort des pièces du dossier que le premier placement de M. X à l'isolement a été levé le 5 octobre 2005 et qu'il a été ensuite placé en détention ordinaire pendant 21 jours avant l'édiction, pour d'autres motifs, de la décision contestée ; qu'ainsi, le moyen invoqué manque en fait ;
Considérant que la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et que cette motivation est suffisamment précise ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision ne saurait être accueilli ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée a été prise pour des motifs autres que le souci de garantir le bon ordre et la sécurité au centre pénitentiaire du Port ; que, dès lors, le moyen tiré du détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a annulé la décision du directeur du centre pénitentiaire du Port en date du 26 octobre 2005 plaçant M. X à l'isolement par mesure de précaution ou de sécurité et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0501047-1 du Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion en date du 22 février 2006 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Mamod Abasse X au Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées à la Cour par M. Mamod Abasse X tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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06BX00673