Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 20 mars 2008, présentée pour Mme Julieta X, demeurant chez M. et Mme Sayad X ... ;
Mme X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 28 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 25 septembre 2007 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 1 500 euros au conseil de la requérante sur le fondement du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2008 :
- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;
- les observations de Me Jouteau, avocat de Mme X ;
- et les conclusions de M. Margelidon, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;
Considérant que Mme X, ressortissante arménienne entrée en France à l'âge de 63 ans, a produit des documents, dont la validité n'est pas contestée par le préfet, desquels il ressort qu'elle est divorcée depuis 1993 et que son enfant unique est M. Sayad X ; qu'il est constant que ce dernier, ainsi que son épouse, résident régulièrement en France après avoir obtenu le statut de refugiés ; que la requérante soutient sans être sérieusement contestée qu'elle n'a pas d'autres attaches familiales ; que, dans ces conditions, le refus, qui lui a été opposé par l'arrêté litigieux, de lui délivrer un titre de séjour a porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il s'ensuit que ce refus doit être regardé comme ayant été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'illégalité dont est entaché ce refus entraîne son annulation ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation de la décision obligeant Mme X à quitter le territoire et de la décision fixant le pays de renvoi contenues dans le même arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;
Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que soit délivrée à Mme X une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer une telle carte, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que Mme X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jouteau, avocate de Mme X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Jouteau de la somme de 1 300 euros ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 décembre 2007 est annulé, ensemble l'arrêté du préfet de la Gironde du 25 septembre 2007 refusant un titre de séjour à Mme X, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de renvoi.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de délivrer à Mme X une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Jouteau la somme de 1 300 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Jouteau renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
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No 08BX00808