Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 mars 2009 sous le n° 09BX00703, présentée par le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES ;
Le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 5 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, annulé l'arrêté en date du 28 janvier 2008 décidant la reconduite à la frontière d'office de M. X à destination du Pérou ou de tout autre pays dans lequel il établit être légalement admissible et, d'autre part, condamné l'Etat à payer 1.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande de M. X devant le tribunal administratif ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2010 :
- le rapport de Mme Balzamo, premier conseiller ;
- les observations de Me Chambaret, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. Zupan, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;
Considérant que M. X a justifié avoir présenté une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Bordeaux ; qu'il y a lieu, dès lors, de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
Considérant que M. X de nationalité péruvienne, en situation irrégulière sur le territoire français, a été interpellé le 28 janvier 2008 par les services de la police aux frontières d'Hendaye ; que le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES a décidé, le jour même, de prononcer la reconduite d'office à la frontière de l'intéressé qui faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission en vertu d'une décision exécutoire prononçant une mesure d'éloignement du territoire italien en date du 26 mars 2005 ; que le PREFET DES PYRENEES- ATLANTIQUES relève régulièrement appel du jugement du 5 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté de reconduite d'office à la frontière au motif que la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'avait pas été respectée par l'administration ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Lorsqu'un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne a fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission en vertu d'une décision exécutoire prise par l'un des autres Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 et qu'il se trouve irrégulièrement sur le territoire métropolitain, l'autorité administrative peut décider qu'il sera d'office reconduit à la frontière. Il en est de même lorsqu'un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, qui se trouve en France, a fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des autres Etats membres de l'Union européenne.(...) ; qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière. ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que le législateur a entendu instituer, par l'article L. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une procédure de reconduite d'office à la frontière distincte de celle des arrêtés de reconduite à la frontière prévus aux articles L. 511-1 et suivants du même code et soumise à des règles de contrôle juridictionnel différentes ; que ces décisions de reconduite d'office à la frontière ne peuvent, notamment, faire l'objet que d'une demande d'annulation devant le juge administratif de droit commun statuant selon la procédure ordinaire ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'institue, pour les mesures prises en application de l'article L. 531-3 précité, de procédure particulière pouvant être regardée comme constituant une garantie équivalente à celle qui est contenue dans l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, contrairement à celle résultant des articles L. 511-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;qu'ainsi, c'est à juste titre que le tribunal administratif a considéré que les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 étaient applicables à la procédure de reconduite d'office prévue par l'article L. 531-3 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'interpellé le 28 janvier 2008 par les services de police alors qu'il se trouvait en situation irrégulière sur le territoire français, M. X a été informé le même jour par un courrier notifié à 15 heures 30 que le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES envisageait de prendre à son encontre une décision de reconduite d'office à destination du Pérou ; que cette décision de reconduite d'office lui a été notifiée le même jour à 17 heures 25 ; que compte tenu du très bref laps de temps séparant ces deux notifications, la circonstance que le courrier d'information comportait le texte intégral de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne suffit pas à établir que M. X ait été mis à même de présenter des observations écrites ou orales ni de se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix avant l'intervention de la décision de reconduite ; que le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES n'apporte aucun élément de nature à établir que l'urgence ou des circonstances exceptionnelles rendaient impossible le respect de la procédure prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que, par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation que les premiers juges ont estimé que la procédure suivie par le PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES était entachée d'irrégularité au regard des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES PYRENEES- ATLANTIQUES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a annulé sa décision du 28 janvier 2008 ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que M. X a justifié du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle le 6 août 2010 auprès du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Bordeaux ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve d'une part, que Me Chambaret renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et d'autre part, de la décision à intervenir du bureau d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat, le versement à Me Chambaret d'une somme de 1.200 euros au titre des frais non compris dans les dépens ; que, dans le cas où l'aide juridictionnelle ne serait pas accordée à M. X par le bureau d'aide juridictionnelle, la somme de 1.200 euros sera versée à ce dernier ;
DECIDE :
Article 1er : M. X est admis provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : La requête du PREFET DES PYRENEES-ATLANTIQUES est rejetée.
Article 3 : L'Etat versera à Me Chambaret une somme de 1.200 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve d'une part, que l'avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, d'autre part, de la décision à intervenir du bureau d'aide juridictionnelle. Dans le cas où l'aide juridictionnelle ne serait pas accordée à M. X, la somme de 1.200 euros sera versée à ce dernier.
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No 09BX00703