Vu, I, sous le n° 10BX00351, la requête enregistrée au greffe de la Cour le 11 février 2010, présentée pour M. Dimitry X, demeurant ..., par Me Schmitt, avocat ;
M. X demande à la Cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0503284 du 21 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a ordonné une expertise complémentaire et de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif afin qu'il statue sur sa demande indemnitaire ;
2°) à titre subsidiaire, de décider que toute allocation provisionnelle accordée sur leur demande à l'expert et à ses sapiteurs éventuels à valoir sur le montant de leurs honoraires et débours sera versée par l'Etat ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens de l'instance d'appel ;
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Vu, II, sous le n° 10BX01966, la requête présentée pour M. X, enregistrée le 30 juillet 2010 sous forme de télécopie, confirmée par courrier le 2 août 2010, par Me Schmitt, avocat ;
M. X demande à la Cour :
1°) de joindre les requêtes n°s 10BX00351 et 10BX01966 ;
2°) d'annuler le jugement n° 0503284 du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice subi du fait de la vaccination antipoliomyélitique obligatoire dont il a fait l'objet le 1er juin 1979 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser un capital de 686 000 euros complété par une rente annuelle de 45 000 euros révisée chaque année, ces sommes portant intérêts à compter de la date de la demande indemnitaire préalable ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 janvier 2011 :
- le rapport de M. Valeins, président assesseur ;
- les observations de Me Tabouis pour M. X et de Me Kloepfer pour la CPAM de la Haute-Garonne ;
- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;
Vu la note en délibéré, enregistrée au greffe de la Cour le 12 janvier 2011, présentée pour M. X ;
Considérant que, par ordonnance, en date du 6 février 2001, le président de la troisième chambre du Tribunal administratif de Toulouse, statuant en référé, a fait procéder à une expertise à l'effet d'établir, notamment, l'origine et la cause de la maladie dont souffre M. X et dont les symptômes étaient apparus quelques jours après qu'il a été vacciné le 1er juin 1979 contre la poliomyélite ; que l'expertise a été réalisée le 24 juin 2004 ; que par décision en date du 17 juin 2005, le ministre de la santé et des solidarités a rejeté la réclamation préalable présentée par M. X tendant à ce que l'Etat l'indemnise du préjudice causé par la vaccination obligatoire dont il avait fait l'objet en 1979 ; qu'à la suite de ce refus, M. X a demandé au tribunal administratif de condamner l'Etat à lui verser la somme de 686 000 euros ainsi qu'une rente annuelle de 45 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de sa vaccination antipoliomyélitique ; qu'estimant que l'expertise déjà réalisée ne lui permettait pas, en toute connaissance de cause, de se prononcer sur le bien-fondé de la demande de M. X, par jugement avant dire droit en date du 21 avril 2009, le Tribunal administratif de Toulouse a ordonné une nouvelle expertise ; que par la requête n° 10BX00351, M. X interjette appel de ce jugement ; que par jugement en date du 1er juin 2010, le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. X de condamnation de l'Etat ; que par la requête n° 10BX01966, M. X interjette appel de ce second jugement ; que les requêtes n°s 10BX00351 et 10BX01966 étant relatives à une même demande de condamnation de l'Etat, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la requête n° 10BX01966 et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne présentées dans cette instance :
Considérant que, si M. X fait valoir que la procédure de première instance aurait été bâclée , il ne précise pas les éléments sur lesquels il se fonde pour qualifier ainsi la procédure suivie par le tribunal administratif ; que, si la durée excessive d'une procédure juridictionnelle peut être invoquée à l'appui d'une mise en cause de la responsabilité de l'Etat du fait d'une faute commise par la juridiction administrative, elle ne constitue pas une irrégularité de la procédure susceptible d'entraîner l'annulation du jugement ; que M. X ne peut donc utilement invoquer la longueur de la procédure suivie devant le tribunal administratif à l'appui de sa contestation de la régularité du jugement ; qu'il ressort des termes mêmes du jugement que le tribunal administratif a rejeté la demande de condamnation de l'Etat, non pour le motif que le requérant avait fait appel du jugement avant dire droit ordonnant une nouvelle expertise, mais parce qu'il s'estimait insuffisamment renseigné par la première expertise pour se prononcer sur le bien-fondé de la demande et que le requérant s'opposait à la réalisation de la nouvelle expertise ; que, par suite les moyens invoqués par M. X à l'encontre de la régularité du jugement doivent être rejetés ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 1 de la loi susvisée du 31 décembre 1968 : Sont prescrites, au profit de l'Etat (...), sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que la connaissance par la victime de l'existence d'un dommage ne suffit pas à faire courir le délai de la prescription quadriennale ; que le point de départ de cette dernière est la date à laquelle la victime est en mesure de connaître l'origine de ce dommage ou du moins de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de l'administration ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X, alors âgé de trois mois, a fait l'objet, le 1er juin 1979, d'une vaccination antipoliomyélitique obligatoire et que quelques jours après il était atteint d'une quadriplégie avec paralysie respiratoire ; que l'intéressé a été hospitalisé le 26 juillet 1979 et la poliomyélite a été diagnostiquée le 24 août 1979 ; que M. X est resté hospitalisé pour cette poliomyélite jusqu'au 8 novembre 1983 ; qu'après sa sortie de l'hôpital, à la demande de ses parents, une attestation a été établie par un médecin du centre hospitalier, en date du 28 décembre 1983, selon laquelle la pathologie pour laquelle l'enfant avait été soigné était une poliomyélite antérieure aiguë et que les séquelles de cette poliomyélite était une quadriplégie complète ; que l'article L. 10-1 alors en vigueur du code de la santé publique disposait que tout dommage imputable directement à une vaccination obligatoire (...) est supporté par l'Etat ; que dans ces conditions, l'attestation médicale du 28 décembre 1983 était suffisante pour permettre aux parents de M. X d'affirmer que la poliomyélite dont leur enfant était affecté pouvait être imputable au vaccin dont ils n'ignoraient pas qu'il avait été administré à leur enfant et donc que cette maladie pouvait être imputable au fait de l'administration ; qu'il résulte de l'instruction qu'à cette même date du 28 décembre 1983, l'état du requérant, qui était atteint d'une quadriplégie complète qui le rendait entièrement dépendant de sa ventilation artificielle, était consolidé ; que, dès lors, la prescription quadriennale était acquise par l'Etat depuis le 1er janvier 1988, alors même que M. X était mineur à cette date, lorsque le requérant a saisi le Tribunal administratif de Toulouse, le 17 janvier 2001, pour qu'il ordonne une expertise susceptible d'être suivie d'une mise en cause de la responsabilité de l'Etat ; que cette prescription a été opposée par le ministre en cours de première instance, dans ses mémoires enregistrés les 17 novembre 2005 et 27 février 2006 au greffe du tribunal administratif, par un fonctionnaire qui avait régulièrement reçu délégation pour ce faire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 1er juin 2010, le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice résultant de sa vaccination antipoliomyélitique obligatoire ;
Considérant que les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à indemniser M. X étant rejetées, doivent également être rejetées les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne tendant à la condamnation de l'Etat à lui rembourser les prestations servies à l'intéressé, à lui payer les prestations futures et l'indemnité forfaitaire de gestion ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne les sommes qu'ils demandent au titre de ces dispositions ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. X les frais d'expertise ; que ces frais liquidés et taxés pour un montant de 500 euros par ordonnance du président du Tribunal administratif de Toulouse du 1er juillet 2004, sont mis à la charge de l'Etat ; que le jugement du 1er juin 2010 doit être annulé dans cette mesure ;
Sur la requête n° 10BX00351 :
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la prescription quadriennale était acquise par l'Etat depuis le 1er janvier 1988 lorsque le requérant a saisi le Tribunal administratif de Toulouse, le 17 janvier 2001, pour qu'il ordonne une expertise susceptible d'être suivie d'une mise en cause de la responsabilité de l'Etat ; que dans ces conditions, la nouvelle expertise ordonnée par le jugement attaqué avant dire droit du 21 avril 2009 ne se justifiait pas ; que, par suite, M. X est fondé à demander l'annulation de ce jugement ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement en date du 1er juin 2010 du Tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu'il met les frais d'expertise à la charge de M. X.
Article 2 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 500 euros par ordonnance du président du Tribunal administratif de Toulouse du 1er juillet 2004 sont mis à la charge de l'Etat.
Article 3 : Le surplus de la requête n° 10BX01966 de M. X est rejeté ainsi que les conclusions présentées dans cette instance par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne.
Article 4 : Le jugement avant dire droit en date du 21 avril 2009 du Tribunal administratif de Toulouse est annulé.
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Nos 10BX00351, 10BX01966