Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 17 août 2009 sous le n° 09BX02005, présentée pour la société à responsabilité limitée POTIRON, ayant son siège social 208 rue de Bourgogne à Orléans (45000) ; la SARL POTIRON demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 0701935/0701936, par lequel le tribunal administratif de Poitiers, d'une part, a rejeté partiellement sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés, ainsi que des pénalités correspondantes et de l'amende pour distributions occultes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2003 et le 31 décembre 2004, par avis de mise en recouvrement émis le 1er mars 2007 par le comptable du service des impôts des entreprises de La Rochelle Est, d'autre part, a rejeté l'intégralité de sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 12 avril 2002 au 31 décembre 2004, par avis de mise en recouvrement émis le 1er mars 2007 par le comptable du service des impôts des entreprises de La Rochelle Est ;
2°) de prononcer la décharge des droits et pénalités restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 novembre 2011 :
- le rapport de Mme D. Boulard, président assesseur ;
- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;
Considérant que la SARL POTIRON, créée le 11 avril 2002, exploite un bar-restaurant à La Rochelle ; qu'au terme d'une vérification de comptabilité effectuée en 2005, ayant donné lieu à des propositions de rectification en date des 16 novembre 2005 et 20 janvier 2006, l'administration fiscale a regardé sa comptabilité comme n'étant pas probante et a reconstitué les chiffres d'affaires de la période correspondant aux exercices clos les 31 décembre de chacune des années 2003 et 2004 ; que l'administration a mis à la charge de la société, au titre de cette période, des impositions supplémentaires en matière d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que les pénalités correspondantes et l'amende pour distributions occultes prévue par l'article 1759 du code général des impôts ; que la SARL POTIRON a saisi le tribunal administratif de Poitiers de demandes tendant à la décharge de l'ensemble de ces droits et pénalités ; que, par un jugement du 25 juin 2009, le tribunal a décidé la réduction à hauteur de 49 323 euros de l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts, qui avait été infligée à la SARL POTIRON au titre des distributions occultes de l'exercice clos le 31 décembre 2003, mais a rejeté le surplus de ses conclusions ; que la SARL POTIRON fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande en décharge ;
Sur la procédure et le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour l'ensemble de la période vérifiée, la SARL POTIRON enregistrait ses recettes globalement chaque mois ; qu'elle n'a pas présenté de pièces justificatives permettant de les détailler ; que les conditions mêmes de son activité ne sauraient justifier, contrairement à ce que soutient la société, cet enregistrement global de recettes, qui est de nature à entraîner à lui seul, comme l'ont relevé les premiers juges, le rejet de sa comptabilité ; qu'en outre, l'entreprise n'a pas produit de journal auxiliaire de caisse ou de livre de caisse, non plus que l'inventaire des stocks de boissons au 31 décembre 2003 ; qu'au surplus, des recoupements opérés auprès de fournisseurs de la société ont révélé que ceux-ci lui avaient vendu en 2004 des produits, selon des factures libellées à son nom ou à celui de son principal associé, mais livrés au lieu d'exploitation et réglés quasi exclusivement en espèces, qui n'avaient pas été portés dans ses achats comptabilisés ; que, dans ces conditions, l'administration a pu à bon droit regarder la comptabilité de la société, pour l'ensemble de la période en cause, comme entachée de graves irrégularités au sens de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales et procéder à la reconstitution de ses chiffres d'affaires ; qu'en application de ce même article et dès lors que les impositions contestées ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires émis le 8 décembre 2006 et notifié par lettre du 10 janvier 2007, la charge de la preuve de leur exagération incombe à la société requérante ;
Considérant que l'administration a reconstitué les recettes du bar et du restaurant, réalisées au cours de la période vérifiée, en fonction de données résultant du dépouillement des notes effectivement délivrées aux clients du 1er juin au 23 juin 2005, pendant les opérations de contrôle ; que le vérificateur a évalué les ventes de vins et des autres boissons en appliquant les tarifs pratiqués aux achats qu'il a estimé revendus, après avoir déterminé les dosages et déduit les pertes, les offerts et la consommation du personnel ; que le chiffre d'affaires du restaurant a été évalué selon la méthode dite des vins en déterminant la part des ventes de vins par rapport à celle des solides ; que la méthode de reconstitution, comme l'ont rappelé les premiers juges, est suffisamment explicitée dans les deux propositions de rectification, à la fois dans les nombreux tableaux qui sont annexés à chacun de ces documents et dans le corps de ces propositions qui en font la synthèse ; qu'en particulier, les annexes des propositions de rectification retracent le détail des notes dépouillées et précisent le calcul du chiffre d'affaires par boisson ; que ces documents mettaient la société à même de comprendre la méthode de reconstitution utilisée par le vérificateur et de la contester ; que, comme l'indique le jugement dont il convient de reprendre la motivation sur ce point, l'erreur commise par le vérificateur dans la détermination des ventes de boissons du premier exercice, lors de la proposition de rectification de 2005, est en faveur de la société redevable ; que, contrairement à ce qu'elle soutient en appel, cette erreur n'affecte pas les autres modalités de la reconstitution ; que les imprécisions susceptibles d'affecter un descriptif donné dans une annexe pouvaient être palliées par les renseignements contenus dans les autres annexes et par ceux résultant de la synthèse opérée dans le corps des propositions ; que les éléments de la reconstitution, attachés aux conditions concrètes d'exercice, résultaient du débat avec le gérant de la société en exercice lors du contrôle, dont les indications à cet égard sont précisément retranscrites par les propositions de rectification ; que la circonstance que ce gérant n'était pas celui en exercice lors du début d'activité de la société vérifiée n'enlève pas au débat qu'il a eu avec le vérificateur son caractère contradictoire et, contrairement à ce que soutient la société requérante, ne porte pas atteinte aux droits de la défense ;
Considérant que, faute de pièces justificatives des recettes comptabilisées, le vérificateur a pu opérer la reconstitution des recettes réalisées par l'entreprise en fonction des notes et factures qu'elle a délivrées à ses clients pendant les opérations de contrôle ; que la période retenue, portant sur trois semaines du mois de juin, de même que le nombre de notes et factures analysées par le vérificateur, soit un millier environ de ces documents, sont suffisamment significatifs de son activité ; que la méthode elle-même de reconstitution, telle qu'elle est décrite plus haut, adaptée à l'activité de l'entreprise, ne saurait être regardée comme radicalement viciée dans son principe ; que la réalité des minorations d'achats pratiquées en 2004 est établie par les recoupements opérés auprès des fournisseurs évoqués plus haut ; que, si la société fait valoir qu'une part des achats omis en 2004 aurait été enregistrée dans la comptabilité de 2005, elle n'apporte en tout état de cause pas la preuve de la régularisation qu'elle invoque ; que l'état lacunaire des stocks et la minoration d'achats autorisaient le vérificateur à procéder à une évaluation des achats revendus ; qu'il a pu s'appuyer en partie sur des éléments issus des données comptables, sans que cette évaluation n'en soit elle-même radicalement viciée ;
Considérant que la SARL POTIRON, qui, ainsi qu'il est dit plus haut, supporte la charge de la preuve, ne s'acquitte de son obligation pour aucune donnée de la reconstitution ; qu'en particulier, elle n'apporte pas d'éléments, tels que ses propres sondages, qui permettraient une meilleure approche de ses recettes que celle suivie par le vérificateur, ni quant à la part respective des activités de bar et de restaurant, la ventilation des liquides entre ces deux activités, la part des vins vendus au restaurant, les coefficients de revente, les dosages, les offerts ou la consommation du personnel, ni quant à la consistance de ses stocks ou celle de ses achats ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL POTIRON n'apporte pas la preuve de l'exagération des chiffres d'affaires reconstitués au terme d'une procédure régulière, ni, par conséquent, de l'exagération des bases d'impositions dont procèdent les droits et pénalités restant en litige ;
Sur les pénalités :
Considérant, en premier lieu, que l'administration a appliqué aux droits supplémentaires en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts en cas de mauvaise foi ; que, compte tenu de la nature des redressements procédant de minorations de recettes, lesquelles ont été commises à la faveur d'une comptabilité irrégulière, dénuée de toute pièce justificative de recettes, et d'achats minorés, ainsi que de l'importance de ces redressements par rapport aux chiffres d'affaires déclarés, l'administration établit l'intention de la société redevable d'éluder l'impôt ; que la circonstance que ces minorations de recettes ont été révélées par une reconstitution opérée par le vérificateur ne permet pas d'écarter la mauvaise foi de la société requérante ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts : Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visée à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excèdent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ; qu'aux termes dudit article 1759, qui s'est substitué à l'article 1763 A à compter du 1er janvier 2006 : Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées... ;
Considérant que les premiers juges rappellent que les dispositions législatives précitées, en prévoyant que l'administration peut demander à la société toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution, permettent au service de faire porter sa demande, non seulement sur le nom des bénéficiaires, mais aussi sur le montant et la date des distributions, renseignements indispensables à l'assujettissement à l'impôt sur le revenu des intéressés ; qu'ils ajoutent que la circonstance que les recettes ont été reconstituées par exercice ne mettait pas la société dans l'impossibilité de répondre à cette demande, notamment de faire connaître l'identité des bénéficiaires ainsi que la répartition entre eux et par année des recettes dissimulées ; qu'ils estiment, par suite, que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la teneur de la demande qui lui a été adressée par le service l'aurait induite en erreur sur la portée de son obligation et, par suite, entacherait d'irrégularité l'amende qui a été appliquée ; qu'il convient d'adopter ces motifs, retenus à juste titre par le tribunal, pour écarter ce moyen repris en appel par la société à l'appui de ses conclusions dirigées contre la pénalité restant en litige sans qu'elle n'apporte aucun élément de nature à infirmer l'analyse des premiers juges ; qu'à cet égard, elle ne saurait utilement se prévaloir devant la cour de ce qu'elle avait contesté dans sa réponse aux propositions de rectification la reconstitution de ses recettes dont résultaient les revenus tenus pour distribués ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL POTIRON n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement dont elle fait appel non plus que la décharge des droits et pénalités restant en litige ; que, par voie de conséquence, ne peuvent être accueillies ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative:
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL POTIRON est rejetée.
''
''
''
''
5
No 09BX02005