Vu le recours enregistré le 23 juin 2011 présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat (direction de contrôle fiscal Sud-Ouest) ;
Le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°0801745 du 21 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, faisant droit à la demande de M. X en restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il avait spontanément acquittés pour un montant de 26 659 euros au titre de la période courant du 1er janvier 2004 au 30 juin 2006, lui a accordé la restitution demandée et a mis à la charge de l'Etat le versement à M. X de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande de M. X devant le tribunal administratif et de remettre à la charge de ce dernier les droits de taxe sur la valeur ajoutée en litige ;
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Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
Vu le décret n° 96-879 du 8 octobre 1996 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute ;
Vu le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie ;
Vu le décret n° 2007-437 du 25 mars 2007 relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation ;
Vu l'arrêté du 6 janvier 1962 fixant la liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de laboratoire d'analyses médicales non médecins, modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2012 :
- le rapport de M. Philippe Cristille, premier-conseiller ;
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;
- les observations de Me Chenebit, avocat de M. X ;
1. Considérant que M. X, qui exerce l'activité d'ostéopathe et qui est titulaire d'un diplôme d'Etat de masseur-kinésithérapeute, a demandé le 13 novembre 2007 la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il avait spontanément acquittée au titre de la période du 1er janvier 2004 au 30 juin 2006, en estimant pouvoir bénéficier des dispositions de l'article 261 du code général des impôts relatives à l'exonération de cette taxe ; que, par un jugement en date du 21 avril 2011, le tribunal administratif lui a accordé la restitution des droits acquittés qui s'élevaient pour cette période à la somme de 26 659 euros ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat relève appel de ce jugement ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné ( ...) " ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) " ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive, précité, qui est de garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des Etats membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ;
4. Considérant toutefois que, conformément à l'interprétation des dispositions de la sixième directive qui résulte de l'arrêt rendu le 27 avril 2006 par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires C-443/04 et C-444/04, l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de cette directive serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou cette activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles propres à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dans sa version applicable au présent litige : " L'usage professionnel du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l'ostéopathie ou à la chiropraxie délivrée par un établissement de formation agréé par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret. Le programme et la durée des études préparatoires et des épreuves après lesquelles peut être délivré ce diplôme sont fixés par voie réglementaire. (...) / Les praticiens en exercice, à la date d'application de la présente loi, peuvent se voir reconnaître le titre d'ostéopathe ou de chiropracteur s'ils satisfont à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires du diplôme mentionné au premier alinéa. Ces conditions sont déterminées par décret. (...) / Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appelés à les accomplir. / Ces praticiens ne peuvent exercer leur profession que s'ils sont inscrits sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département de leur résidence professionnelle, qui enregistre leurs diplômes, certificats, titres ou autorisations " ;
6. Considérant que le décret du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie et le décret du même jour relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation, pris pour l'application de cet article, n'ont été publiés que le 27 mars 2007 ; que, durant la période en litige, soit du 1er janvier 2004 au 30 juin 2006, M. X était habilité à accomplir, en vertu de la réglementation de sa profession, notamment des articles R. 4321-5 et R. 4321-7 du code de la santé publique habilitant les masseurs-kinésithérapeutes à pratiquer, sur prescription médicale, des actes de " mobilisation manuelle de toutes les articulations, à l'exclusion des manoeuvres de force ", certains actes d'ostéopathie seulement, tandis que les autres actes ne pouvaient être pratiqués que par les docteurs en médecine ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, pour obtenir la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a acquittés sur ses prestations d'ostéopathie au cours de la période litigieuse, M. X doit démontrer que ces prestations étaient au nombre de celles que les masseurs-kinésithérapeutes étaient autorisés à pratiquer en vertu de la réglementation de leur profession, et, à défaut, pour les éventuelles prestations ne faisant pas partie des actes qu'il était habilité à accomplir en vertu de cette réglementation, de produire devant le juge les éléments permettant à ce dernier d'apprécier s'il disposait, pour la fourniture de ces prestations, de qualifications professionnelles propres à leur assurer un niveau de qualité équivalente à celles fournies par un médecin, c'est-à-dire des éléments relatifs à sa pratique permettant d'appréhender, sur une période significative, la nature des actes accomplis et les conditions dans lesquelles ils l'ont été ; qu'est, en revanche, sans incidence, pour apprécier la nature des actes au regard de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période en cause, la circonstance, sur laquelle s'est fondé le tribunal administratif pour accorder la restitution contestée, que l'intéressé a suivi une formation appropriée en matière d'ostéopathie et a obtenu en juin 2008 le droit d'user du titre d'ostéopathe ;
8. Considérant que M. X qui, comme il a été dit, supporte la charge de la preuve, n'apporte aucun élément de nature à démontrer que les prestations d'ostéopathie qu'il a accomplies au cours de la période litigieuse répondaient effectivement aux conditions rappelées au point 7 ci-dessus ;
9. Considérant que si M. X se prévaut de l'instruction du 19 décembre 2005 publiée au bulletin officiel des impôts du 26 décembre 2005 sous la référence 3 A-6-05, cette instruction, qui rappelle notamment que les actes d'ostéopathie ne peuvent être exonérés que s'ils relèvent des techniques et actes professionnels que le masseur-kinésithérapeute est habilité à pratiquer conformément aux dispositions des articles R. 4321-1 à 4123-13 du code de la santé publique, ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle rappelée ci-dessus dont le contribuable serait fondé à se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a fait droit à la demande de M. X tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittée au titre de la période du 1er janvier 2004 au 30 juin 2006 ; que les conclusions présentées par M. X sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°0801745 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 21 avril 2011 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif et ses conclusions présentées devant la cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La taxe sur la valeur ajoutée dont la restitution a été accordée en exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux, soit la somme de 26 659 euros, est remise à la charge de M. X.
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N° 11BX01514