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11/12/2012 | FRANCE | N°12BX00415

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 11 décembre 2012, 12BX00415


Vu la requête enregistrée le 20 février 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 1er mars 2012, présentée pour M. Dumond Emile X, demeurant ..., par Me Doutrelong ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1100754 du 19 janvier 2012, par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2011 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté cont

esté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer une carte de séjour tempora...

Vu la requête enregistrée le 20 février 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 1er mars 2012, présentée pour M. Dumond Emile X, demeurant ..., par Me Doutrelong ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1100754 du 19 janvier 2012, par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2011 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de quinze jours suivant notification de l'arrêt à intervenir, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Dominique Boulard, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

1. Considérant que, par arrêté du 25 mai 2011, le préfet de la Guyane a refusé d'admettre au séjour M. X, ressortissant haïtien né en 1972, entré en France selon ses déclarations en 1999 ; que, par ce même arrêté, le préfet l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé Haïti comme pays de renvoi ; que M. X fait appel du jugement du tribunal administratif de Cayenne ayant rejeté son recours dirigé contre cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

3. Considérant que, pour refuser d'admettre au séjour M. X, le préfet de la Guyane a estimé, dans son arrêté contesté, qu'il ne remplissait pas les conditions requises pour la délivrance d'un titre de séjour au regard des dispositions de l'article L.313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que son arrêté relève ainsi que M. X " ne peut justifier de sa présence illégale sur le territoire de la Guyane depuis 2001 " et indique qu'il " a fait l'objet d'un refus d'asile en 2001 et d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière en 2006 " ; qu'il ajoute que, si M. X " vit avec la mère de son enfant ", celle-ci est " en situation irrégulière ", et que lui-même " n'est pas dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine " où résident ses parents, de sorte " que les liens personnels et familiaux de l'intéressé en France n'offrent pas les conditions requises de l'ancienneté ni de la stabilité " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des factures libellées à son nom, des certificats de vaccination et des divers avis d'imposition sur le revenu produits par le requérant, que M. X réside sur le territoire français au moins depuis l'année 2000 ; que son fils y est né en 2003 et y était scolarisé à la date de l'arrêté contesté ; que M. X a reconnu son fils dès sa naissance et veille activement à son éducation, comme le montrent les documents versés au débats ; qu'il a eu cet enfant de sa compagne, ressortissante haïtienne, avec laquelle il est lié par une relation ancienne et stable ; qu'à la date de l'arrêté attaqué, celle-ci avait déposé une demande de titre de séjour, laquelle a donné lieu, peu après ledit arrêté, à la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, elle-même suivie de la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ; que, s'il est vrai que M. X était en situation irrégulière en France depuis son arrivée dans ce pays, il soutient, sans être nullement contredit, avoir sollicité auprès de l'administration, au moins à six reprises, en 2007, 2008, 2010 et 2011, la régularisation de sa situation et que ces demandes répétées n'ont donné lieu à aucune décision expresse, malgré les convocations auprès des services de la préfecture que ces demandes ont suscitées et auxquelles il ne s'est pas soustrait ; que, si la mère de M. X réside en Haïti, son père y est décédé en 1999 et deux des frères du requérant résident en France, l'un titulaire d'une carte de résident de dix ans, l'autre titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; que, dans ces conditions, le refus de séjour décidé le 25 mai 2011 par le préfet de la Guyane, qui n'oppose aucune défense au requérant en appel, pas plus qu'il ne l'a fait en première instance, a porté une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et familiale de M. X protégé par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par les dispositions susmentionnées de l'article L.313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'illégalité de ce refus entraîne l'illégalité des autres mesures prises sur son fondement par l'arrêté en litige ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guyane en date du 25 mai 2011 ; qu'il est donc fondé à demander l'annulation de ce jugement et de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution... " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1... d'une astreinte... " ;

7. Considérant que l'annulation du refus de titre de séjour opposé à M. X, implique, eu égard à son motif, qu'il soit admis au séjour au titre de sa vie privée et familiale; qu'il convient donc d'enjoindre au préfet de la Guyane de délivrer au requérant une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale", dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros que M. X demande en remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cayenne n°1100754 du 19 janvier 2012 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de la Guyane du 25 mai 2011 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Guyane de délivrer à M. X une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale", dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus de la requête de M. X est rejeté.

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N° 12BX00415


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00415
Date de la décision : 11/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP CHONG-SIT et DOUTRELONG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-12-11;12bx00415 ?
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