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17/01/2013 | FRANCE | N°11BX01191

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 17 janvier 2013, 11BX01191


Vu le recours, enregistré le 16 mai 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat (direction de contrôle fiscal sud-ouest), qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902199 du 27 janvier 2011 du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a déchargé la société du Four de la ville de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle avait été assujettie pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 ;

2°) de rétablir les impositions, en droit et intérêts de retard, dont l

a décharge a été ordonnée par le jugement attaqué ;

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Vu le recours, enregistré le 16 mai 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat (direction de contrôle fiscal sud-ouest), qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902199 du 27 janvier 2011 du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a déchargé la société du Four de la ville de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle avait été assujettie pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 ;

2°) de rétablir les impositions, en droit et intérêts de retard, dont la décharge a été ordonnée par le jugement attaqué ;

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Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Dominique Boulard, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

- les observations de Me Othman Farah, avocat de la SCI du Four de la ville ;

1. Considérant que la taxe sur la valeur ajoutée, à laquelle la société civile immobilière du Four de la ville a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007 et dont le jugement partiellement attaqué par le ministre de l'économie et des finances lui a accordé la décharge, procède de ce que le service des impôts a estimé qu'elle avait exercé une activité de marchand de biens au cours de cette période et de ce que les opérations alors réalisées par elle de ventes par lots d'un immeuble acquis en 1999 relevaient du 6° de l'article 257 du code général des impôts ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée (...)/ 6° Les opérations qui portent sur des immeubles (...) ou parts de sociétés immobilières et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux (...) " ; que, d'autre part, l'article 35 du même code précise à ce sujet que : " I. Présentent également le caractère de bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : /1° Personnes qui habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés (...) " ;

3. Considérant que la société civile immobilière du Four de la ville a été créée le 7 janvier 1999 ; que ses statuts définissaient alors son objet social comme consistant en " l'acquisition d'immeubles, de droits ou biens immobiliers, la prise à bail à long terme, bail à construction ou bail emphytéotique d'immeubles, la réalisation de tous travaux de construction, entretien, amélioration, rénovation, l'exploitation par voie de location ou autres des biens appartenant à la société, et plus généralement, toutes opérations mobilières, immobilières ou financières se rattachant directement ou indirectement à cet objet, de nature à en faciliter la réalisation, pourvu qu'elles ne soient pas susceptibles de porter atteinte au caractère exclusivement civil de l'activité sociale " ; que la société a acquis le 15 janvier 1999 un immeuble situé 40 quai Baluze à Tulle (Corrèze) ; qu'après avoir sollicité une subvention auprès de l'Agence nationale pour l'habitat (ANAH) pour la réhabilitation de cet immeuble en vue de sa location à usage d'habitation et obtenu en mars 2000 un agrément en ce sens, elle a décidé la division dudit immeuble en 14 lots destinés à être revendus après rénovation ; qu'elle a demandé à cet effet un permis de construire qui lui a été accordé le 15 juillet 2003 ; que, par une délibération du 31 décembre 2003, la société a pris la forme et le nom d'une société de construction-vente, soit la société de construction-vente du Four de la ville et a modifié son objet social de façon à permettre, outre son activité locative, la " construction (...) de tous immeubles, de toutes destinations et de tous usages " ainsi que " la vente en totalité ou par fractions, des immeubles construits, avant ou après leur achèvement ", tout en maintenant " l'exclusion de toute opération susceptible de faire perdre à la société son caractère civil " ; qu'après avoir réalisé des travaux de rénovation, qu'elle avait effectivement engagés depuis le 1er décembre 2003, la société du Four de la ville a revendu, au titre de la période en litige, plusieurs lots issus de la division de l'immeuble, soit six appartements en mars et décembre 2005, et deux appartements en mars 2007 ;

4. Considérant que la société, qui avait initialement déposé les déclarations fiscales dont relèvent les sociétés civiles immobilières dites de gestion, s'est, à la suite de sa transformation en société de construction-vente, placée, en matière d'impôts directs, sous le régime de l'article 239 ter du code général des impôts ; qu'au terme d'une vérification de sa comptabilité, l'administration fiscale a estimé que les travaux de rénovation légère entrepris par la société ne pouvaient être regardés comme des travaux de construction au sens de l'article 239 ter du code général des impôts et, par suite, ne lui permettaient pas d'entrer dans le champ de cet article ; qu'elle a, en conséquence, par une notification du 19 mai 2008, tenu la société pour imposable à l'impôt sur les sociétés ; qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, seul impôt en jeu dans le présent litige, l'administration a regardé les ventes précitées réalisées en 2005 et 2007, qui n'avaient donné lieu qu'à la perception de droits d'enregistrement, comme relevant du 6° de l'article 257 du code général des impôts, ainsi qu'il est dit plus haut au point 1 ; qu'elle a par conséquent imposé ces ventes sur la marge conformément à l'article 268 du code général des impôts et accepté en outre la déduction de la taxe grevant les travaux de rénovation ;

5. Considérant que la société, tout en admettant n'avoir effectué que des travaux de rénovation légère, non assimilables à une opération de construction, a soutenu devant le tribunal administratif de Limoges ne pas avoir pour autant réalisé des opérations sur son immeuble en tant que marchand de biens ; qu'elle a ainsi fait valoir que ces opérations ne portaient que sur un seul immeuble, que cet immeuble avait été acheté pour être loué et non pour être vendu, et que sa vente n'avait été décidée que lorsqu'il est apparu que, malgré la subvention dont l'attribution avait été décidée par l'ANAH, l'opération de gestion locative n'était pas économiquement réalisable ; que, pour prononcer la décharge de la taxe en litige, le tribunal administratif de Limoges a jugé que, si la condition d'habitude requise par les dispositions de l'article 35 auxquelles renvoie le 6° de l'article 257 était remplie, " eu égard à l'étalement et au nom des transactions " portant sur l'immeuble, l'intention spéculative n'était pas établie en 1999, date d'achat dudit immeuble ; que l'administration soutient le contraire à l'appui de son recours en faisant valoir que l'immeuble en cause, dont elle souligne qu'il n'a jamais été loué, avait été acheté par la société en vue d'être revendu par elle ;

6. Considérant qu'il n'est pas établi que lorsqu'elle a acheté l'immeuble situé quai Baluze à Tulle en 1999, la société intimée avait l'intention de le revendre ; qu'il résulte au contraire de l'instruction, et notamment des démarches engagées auprès de l'ANAH, qui a accordé son agrément afin que soit octroyée une subvention d'un montant de 64 164 euros pour la réhabilitation de cet immeuble très ancien situé au centre de la ville en vue de sa location, que la société avait en 1999 l'intention d'exercer cette activité locative, laquelle était conforme à son objet social ; que n'est pas de nature à infirmer l'existence de cette intention initiale, la circonstance qu'elle n'ait pas mené ce projet à son terme et qu'elle n'ait jamais loué cet immeuble, lequel requérait, avant sa location et en raison de sa vétusté, de lourds travaux de rénovation en raison desquels la société a demandé à l'ANAH une prorogation du délai de deux ans qui lui avait été imparti pour leur réalisation ; que le fait que l'un des associés exerçait la profession d'architecte et était à même d'apprécier l'ampleur des travaux de rénovation ne révèle pas que, dès l'origine, la société aurait jugé impossible la réalisation de ceux-ci ou aurait estimé que leur coût ferait obstacle à un projet de gestion locative ; que l'abandon de ce projet locatif pour cet immeuble, seulement à la fin de l'année 2003, dont la société indique qu'il est lié aux incertitudes, notamment quant aux délais de paiement, affectant le versement effectif de la subvention, et le complément apporté à son objet social à la même date ne suffisent pas à mettre en doute l'existence d'un tel projet en 1999 lors de l'achat dudit immeuble ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal administratif a estimé que l'intention spéculative n'était pas établie à la date de cet achat et jugé que les opérations en litige ne relevaient pas du 6° de l'article 257 du code général des impôts pour ordonner la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée réclamée à la société et des pénalités correspondantes ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ;

8. Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 et de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société du Four de la ville de la somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'économie et des finances est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 300 euros à la société du Four de la ville sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11BX01191


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX01191
Date de la décision : 17/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Dominique BOULARD
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : BAUDOIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-01-17;11bx01191 ?
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