Vu la requête, enregistrée le 17 août 2011 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 18 août 2011, présentée pour la société VM Courtage, dont le siège est 9 impasse des Gandilles à La Salvetat Saint-Gilles (31830), représentée par son gérant en exercice, par Me Seree de Roch ;
La société VM Courtage demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0603515 du 21 juin 2011, par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contributions et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos des années 2000, 2001 et 2002 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2013 :
- le rapport de M. Henri Philip de Laborie, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;
Sur l'étendue du litige :
1. Considérant que si la société VM Courtage relève appel du jugement en date du 21 juin 2011, par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôts sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujetti au titre des exercices clos en 2000, 2001 et 2002, elle déclare ne pas vouloir revenir sur les conclusions de sa demande concernant la comptabilisation toutes taxes comprises des provisions en litige ; que la société requérante est, dès lors, réputée avoir abandonné ces conclusions ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience (...)" ;
3. Considérant que la société VM Courtage soutient qu'elle n'a jamais reçu d'avis d'audience et n'a ainsi pas été en mesure de présenter ses observations à l'audience ; que si le jugement du tribunal administratif de Toulouse, en date du 21 juin 2011, mentionne que les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience, aucune trace d'une notification d'un avis d'audience à la société VM Courtage ne figure au dossier ; qu'il suit de là que la société VM Courtage est fondée à soutenir que ledit jugement est entaché d'irrégularité ; qu'il y a lieu, pour ce motif, d'en prononcer l'annulation;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par la société VM Courtage devant le tribunal administratif de Toulouse, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contributions et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos des années 2000, 2001 et 2002 ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) " ;
6. Considérant que la société VM Courtage soutient que la procédure est irrégulière dans la mesure où la notification de redressement comme la confirmation des redressements n'indiquent pour la période vérifiée que les années 2000 et 2001, alors que les redressements ont également concerné l'année 2002 ; que, cependant, il résulte de l'instruction que l'avis de vérification du 28 mai 2003 adressé à la société VM Courtage a indiqué que le contrôle porterait sur la déductibilité des provisions et le bien-fondé de leur inscription au bilan des exercices du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002 ; que si le service a omis, sur les deux premières pages de la notification de redressement du 29 octobre 2003, l'indication de l'année 2002 au titre de la période vérifiée, cette omission n'a pas fait obstacle à ce que la requérante ait été mise à même de pouvoir formuler ses observations, dès lors que la notification de redressement précitée contient la nature et l'exposé des motifs et du montant des rectifications envisagées ; qu'en particulier, elle traite également de façon expresse, à la page 5 chapitre IV, des redressements affectant l'année 2002, ainsi que des conséquences financières qui en résultent, de sorte que la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'a pas été destinataire d'une information suffisamment claire et précise ; que dans ces circonstances, l'omission sur les deux premières pages de la notification de redressement du 29 octobre 2003 de l'indication de l'année 2002 au titre de la période vérifiée relève d'une erreur matérielle sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; que la réponse aux observations du contribuable en date du 5 décembre 2003 mentionne sans équivoque les exercices 2000 à 2002 ; que, dès lors, les moyens tirés du vice de procédure et du défaut de motivation doivent être écartés ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
7. Considérant que si la société VM Courtage se prévaut, pour justifier ses provisions pour dépréciation des comptes clients, de la spécificité de sa clientèle, cette circonstance, à la supposer fondée, n'est pas de nature à l'exonérer de ses obligations légales en matière de constitution de provisions ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : / (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que les événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ... " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut, notamment, porter en provision et déduire de ses bénéfices imposables d'un exercice, dans la mesure où se trouvent comptabilisés au titre de ce même exercice des produits qui leur correspondent, le montant de charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces charges soient nettement précisées quant à leur nature, qu'elles soient susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante et qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice ; que, s'agissant des provisions pour dépréciation de créances, les créances faisant l'objet de telles provisions doivent être inscrites à l'actif et résulter d'une gestion commerciale normale ; que les évènements en cours à la clôture de l'exercice doivent rendre probable la perte envisagée ; qu'enfin le risque de non-recouvrement des créances doit être nettement précisé ; qu'il appartient alors à l'entreprise de préciser les créances faisant l'objet d'une telle provision et, pour chacune d'elles, par exercice, les éléments qui lui confèrent un caractère douteux ; que, toutefois, le seul défaut de paiement à l'échéance n'autorise pas la constitution d'une telle provision ;
9. Considérant qu'au titre de l'exercice 2000, la société VM Courtage soutient que les clients Redjem, Agro alimentaire, Boucherie CC, Meknes, Romulus, H 31, Sorovia, Cherif, Halles, Kallouch et Sava connaissaient des difficultés de paiement justifiant la constitution de provisions pour dépréciation ; que, toutefois, l'existence de créances restant à recouvrer à hauteur des provisions comptabilisées par la société VM Courtage n'est pas établie par les pièces du dossier ; que, dès lors, l'inscription comme provision pour dépréciation des créances sur ces clients ne sauraient être admise ;
10. Considérant que pour le client Sorovia aucun lien n'est établi entre, d'une part, les factures produites n° 31 du 30 novembre 1998 et n°32 du 31 décembre 1998 pour des montants hors taxes respectifs de 15 437,20 francs et 18 556,56 francs et, d'autre part, le montant de la provision comptabilisée pour 14 145 francs, alors qu'une lettre relance du 11 juillet 2000 ne porte que sur un reliquat de 1 727 francs relatif à des factures des mois de mars à août 1999 ;
11. Considérant que s'agissant du client Kallouch, si la société VM Courtage produit en appel un courrier émanant d'un huissier de justice portant signification d'un jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulouse le 17 avril 2001, un tel courrier ne permet pas de connaître la nature et la quotité du litige qui aurait opposé ce client à la requérante ; que, dès lors, le bien-fondé de la provision correspondante n'est pas démontré ;
12. Considérant que si la société VM Courtage apporte la preuve de la cessation de paiement, au 3 septembre 1997, de son client Romulus par l'extrait K-bis du registre du commerce et des sociétés, elle ne justifie pas de l'existence de créances à son profit ni de leur caractère litigieux autorisant la constitution de la provision comptabilisée ;
13. Considérant que la société VM Courtage soutient, d'une part, que les autres provisions réintégrées relèvent de litiges divers sur lesquels l'administration n'aurait demandé aucune explication et, d'autre part, que l'absence de production de ces créances aux redressement ou liquidation judiciaires ne fait pas obstacle à leur constitution ; qu'il résulte cependant de l'instruction que le service a demandé à la requérante, par un courrier du 4 août 2003, de présenter tous documents permettant d'établir le bien-fondé des provisions pour dépréciation des comptes clients ; que ce même courrier précisait la nature et le montant des créances provisionnées en litige ; qu'à défaut de réponse appropriée l'administration était fondée à réintégrer les provisions dont s'agit ;
Sur la doctrine :
14. Considérant que l'instruction administrative référencée sous le numéro
" E 3322 ", invoquée par la société sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, en se bornant à rappeler que la perte ou la charge qu'un contribuable entend provisionner doit trouver son origine dans l'exercice à la clôture duquel la provision est constituée et que la constitution de provisions pour créances douteuses est essentiellement une question de fait qui doit être appréciée au vu des circonstances propres à chaque affaire, ne contient pas d'interprétation de la loi fiscale opposable à l'administration dont la requérante serait fondée à se prévaloir ; que si la société souligne que cette instruction indique qu'il n'est pas nécessaire que les débiteurs soient déclarés en faillite pour inscrire une créance en provision, cette circonstance est sans incidence sur le litige, dès lors que, ainsi qu'il a été indiqué, l'existence même des créances n'est pas établie ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société VM Courtage n'est pas fondée à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contributions et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos des années 2000, 2001 et 2002 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société VM Courtage la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse, en date du 21 juin 2011, est annulé.
Article 2 : La demande de la société VM Courtage, présentée devant le tribunal administratif de Toulouse, est rejetée.
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No 11BX02327