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18/06/2013 | FRANCE | N°11BX03233

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 18 juin 2013, 11BX03233


Vu, I°), sous le n°11BX03233, la requête sommaire enregistrée le 12 décembre 2011 sous forme de télécopie et le mémoire ampliatif enregistré le 23 décembre 2011 sous forme de télécopie et régularisé par courrier le 29 décembre 2011, présentés pour M. D...B...demeurant ... par Me A...;

M. B...demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n°1000745 en date du 6 octobre 2011 du tribunal administratif de Basse-Terre en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande de condamnation du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes à l

ui verser des dommages et intérêts ;

2°) de porter la somme que le centre hospital...

Vu, I°), sous le n°11BX03233, la requête sommaire enregistrée le 12 décembre 2011 sous forme de télécopie et le mémoire ampliatif enregistré le 23 décembre 2011 sous forme de télécopie et régularisé par courrier le 29 décembre 2011, présentés pour M. D...B...demeurant ... par Me A...;

M. B...demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n°1000745 en date du 6 octobre 2011 du tribunal administratif de Basse-Terre en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande de condamnation du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes à lui verser des dommages et intérêts ;

2°) de porter la somme que le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes a été condamné à lui verser en réparation de ses préjudices à 185 446,99 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, II°), sous le n°12BX00020, la requête sommaire enregistrée le 5 janvier 2012 sous forme de télécopie, régularisée par courrier le 9 janvier 2012, et le mémoire ampliatif enregistré le 14 février 2012 sous forme de télécopie, régularisé par courrier le 16 février 2012, présentés pour le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes, par MeC... ;

Le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000745 du 6 octobre 2011 du tribunal administratif de Basse-Terre ;

2°) de rejeter la demande indemnitaire présentée par M.B... ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant des indemnités allouées ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de M. Jean-Pierre Valeins, président assesseur ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...a été victime, le 12 septembre 1995, d'un accident du travail au cours duquel son bras droit a été blessé par une bétonneuse ; que lors de son admission au service des urgences du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes, la plaie qu'il présentait au niveau de la face antérieure de son bras droit a été suturée, mais la lésion du plexus brachial droit provoquée par l'accident n'a pas été diagnostiquée ; que les douleurs ressenties au bras droit par M.B..., résultant de cette lésion, ont persisté ; que le diagnostic de lésion du plexus brachial droit par étirement des racines nerveuses n'a été clairement posé que le 7 juin 2000 ; que, M. B...a demandé au tribunal administratif de Basse-Terre la condamnation de l'établissement hospitalier à l'indemniser des préjudices résultant de l'erreur de diagnostic commise par l'hôpital lors de sa prise en charge initiale ; que, par un jugement du 6 octobre 2011, le tribunal administratif de Basse-Terre, estimant que la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes était engagée, a condamné ce dernier à verser à M. B...d'une part, une indemnité correspondant à la perte de revenus subis et d'autre part, une indemnité de 13 000 euros, en réparation des souffrances physiques, du préjudice moral et des troubles subis par l'intéressé dans ses conditions d'existence du fait de l'erreur de diagnostic ; que, par la requête n°11BX03233, M. B...interjette appel de ce jugement en ce qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande de réparation ; que, par la requête n°12BX00020, le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes interjette appel du jugement ; que ces requêtes sont relatives au même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que la circonstance que les premiers juges n'aient pas chiffré le préjudice de M. B...résultant de la perte de revenus imputable au retard fautif du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes dans l'établissement du diagnostic de lésion du plexus brachial droit est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué dès lors qu'il a précisé les modalités du calcul de la perte de revenus que le centre hospitalier devait indemniser ;

3. Considérant, en revanche, que le tribunal administratif de Basse-Terre a omis de statuer sur la demande de M. B...tendant à l'indemnisation du préjudice résultant du défaut de communication par le centre hospitalier, dans le cadre des opérations d'expertise, de son dossier médical ; qu'il s'ensuit que le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur ce chef de préjudice ; qu'il y a lieu d'évoquer dans cette mesure ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier pour défaut de communication du dossier médical :

4. Considérant que, s'il n'est pas contesté que, lors des opérations d'expertise, soit quinze ans après la prise en charge initiale de M.B..., le centre hospitalier n'a pas communiqué à l'expert le dossier médical de M.B..., il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que celui-ci a disposé des documents nécessaires pour remplir la mission qui lui avait été confiée par le président du tribunal administratif ; que, par suite, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de communication du dossier soit à l'origine d'un préjudice subi par l'intéressé ; que ses conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier en raison du défaut de production du dossier en cause ne peuvent donc qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier pour faute médicale :

En ce qui concerne la prescription opposée par le centre hospitalier :

5. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 1 de la loi du 31 décembre 1968 applicables en l'espèce: " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis./ Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public " ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par (...) / Tout recours formé devant une juridiction relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...) / Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption (...) " ; que l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 dispose que : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise ordonnée par le président du tribunal administratif de Basse-Terre, que la lésion du plexus brachial droit par étirement des racines nerveuses dont souffre M. B...est imputable à son accident du travail intervenu le 12 septembre 1995, mais que l'examen clinique qui a été fait lors de sa prise en charge le même jour par le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes n'a conduit qu'à un diagnostic de lésion du membre supérieur droit ; que le bon diagnostic et donc l'erreur de diagnostic commise par le centre hospitalier n'ont pu être connus par le requérant que le 7 juin 2000 ; que, par suite, ce n'est qu'à cette date que l'intéressé a pu avoir connaissance de la faute commise par le centre hospitalier ; que la prescription quadriennale alors en vigueur n'a commencé à courir qu'à compter du 1er janvier 2001 ; que la prescription décennale en matière de responsabilité médicale prévue par les dispositions de l'article L.1142-28 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé s'étant substituée à la prescription quadriennale et l'article 101 de la loi du 4 mars 2002 rendant le nouveau délai de prescription immédiatement applicable, l'action contre le centre hospitalier n'était pas prescrite lorsque, le 30 novembre 2010, l'intéressé a présenté au tribunal administratif sa demande de condamnation du centre hospitalier universitaire à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par son erreur de diagnostic; que, dans ces conditions, le centre hospitalier n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Basse-Terre a écarté l'exception de prescription qu'il invoquait ;

En ce qui concerne la responsabilité du centre hospitalier :

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise diligentée en référé, que si l'atteinte irrémédiable du plexus brachial droit de M.B..., d'où résulte la paralysie dont il souffre, est imputable aux lésions dues à son accident de travail du 12 septembre 1995, l'examen clinique de la victime, lors de sa prise en charge ce même jour, a conduit à la pose du diagnostic de lésion du membre supérieur droit par le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes ; que l'hypothèse d'un traumatisme pléxique n'a été évoquée qu'en 1999, pour être confirmée le 7 juin 2000, alors qu'il présentait un tableau clinique clair de lésion du plexus brachial par étirement des racines nerveuses C8 T1 +/- C7, justifiant des investigations et l'avis d'un spécialiste en neurochirurgie ; que les signes cliniques initialement présentés par la victime et ses doléances répétées, qui n'ont pas été prises en compte, auraient dû conduire l'hôpital à effectuer des examens complémentaires et à une prise en charge plus précoce de sa douleur ; que cette carence du centre hospitalier universitaire, qui a contribué à retarder la pose du diagnostic, doit être regardée comme fautive et de nature à engager sa responsabilité ; qu'ainsi, à supposer même que M. B...ait refusé de se prêter à la réalisation d'un électromyogramme, cette circonstance n'est pas de nature à atténuer la responsabilité du centre hospitalier universitaire, dès lors qu'il ressort des conclusions expertales que cet examen, qui présente une utilité pour la prise de décision thérapeutique, est sans intérêt pour la pose du diagnostic ; que le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre n'est, par suite, pas fondé à soutenir que M. B...aurait contribué à la réalisation de son préjudice et que le tribunal administratif aurait retenu à... ; que, toutefois, la faute commise par le centre hospitalier n'a fait perdre à M. B...qu'une chance de voir la douleur résultant de la lésion dont il était atteint prise en charge plus précocement ; qu'il sera fait une juste appréciation des faits de l'espèce en fixant à 80 % cette perte de chance ; que le jugement sera réformé dans cette mesure ;

En ce qui concerne les préjudices subis par M.B... :

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

8. Considérant que le requérant n'établit ni en première instance ni davantage en appel, avoir engagé des frais médicaux qui seraient restés à sa charge ;

9. Considérant que le tribunal administratif de Basse-Terre, s'appuyant sur les conclusions de l'expertise, a condamné le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes à verser à M. B...une indemnité correspondant à la perte de revenus qu'il a subie, du fait que la rente accident de travail au taux de 70% ne lui a été versée qu'à compter du 1er février 2008, alors qu'elle aurait dû l'être dès le 31 mai 1996 si le diagnostic de lésion du pléxus brachial droit avait été posé plus tôt par cet établissement ; qu'en l'absence de précisions suffisantes tant devant le tribunal administratif qu'en appel, quant aux bases de calcul de sa pension d'invalidité, ce chef de préjudice relatif à la perception d'une pension minorée du fait de la carence fautive du centre hospitalier universitaire ne peut être chiffré ; que, toutefois, eu égard à la circonstance que le centre hospitalier n'est responsable que d'une perte de chance évaluée à 80 %, la somme qui sera versée par le centre hospitalier ne pourra représenter que 80 % de la somme résultant des éléments devant être pris en compte tels qu'indiqués par le jugement attaqué ; que le jugement sera réformé sur ce point ;

10. Considérant que M.B..., qui était embauché par un contrat de travail à durée déterminée au moment de son accident le 12 septembre 1995, arrivant à échéance au 16 janvier 1996, ne justifie pas d'un préjudice résultant de la perte de gains professionnels futurs qui serait en lien avec la faute commise par le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes ; que le jugement ne peut être réformé sur ce point ;

S'agissant des préjudices personnels :

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des constatations de l'expert, que les séquelles fonctionnelles dont M. B...reste atteint, ainsi que le préjudice d'agrément qu'il invoque, sont les conséquences non pas de l'erreur initiale de diagnostic commise par le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre mais les conséquences de l'accident du travail dont il a été victime le 12 septembre 1995 ;

12. Considérant, en revanche, que l'erreur initiale commise par le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes dans la pose du diagnostic de lésion du pléxus brachial droit a entraîné une aggravation des souffrances endurées et leur chronicité, sans lien avec celles engendrées par son accident de travail ; que le tribunal administratif a fait une juste appréciation du préjudice causé par l'aggravation et la chronicité des souffrances endurées en l'évaluant à la somme de 3 000 euros ; que, toutefois, en raison du taux de perte de chance applicable en l'espèce, le centre hospitalier doit être condamné à verser à M. B...la somme de 2 400 euros ; que le jugement doit être réformé sur ce point ;

13. Considérant que le tribunal administratif a estimé que le préjudice moral et les troubles subis par M. B...dans ses conditions d'existence, en lien avec l'absence de prise en compte de ses doléances et l'obligation de consulter de nombreux praticiens durant une dizaine d'années afin d'obtenir un diagnostic médical adéquat, étaient importants ; qu'en condamnant le centre hospitalier universitaire à verser à M. B...la somme de 10 000 euros à ce titre, les premiers juges se sont livrés à une appréciation ni insuffisante ni excessive de ces chefs de préjudice ; que, toutefois, en raison de l'application du taux de perte de chance, le centre hospitalier doit être condamné à verser à M. B...la somme de 8 000 euros ; que, le jugement doit être réformé sur ce point ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme à laquelle le centre hospitalier a été condamné doit être ramenée de 13 000 euros à 10 400 euros et que la somme indemnisant la perte de rente sera limitée à 80 % du préjudice subi ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de pointe-à-Pitre/Les Abymes, qui n'est pas la partie perdante dans l'instance n° 11BX03233, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre du 6 octobre 2011 est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions de M. B...tendant à l'indemnisation du préjudice résultant du défaut de communication par le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes de son dossier médical.

Article 2 : La demande de M. B...devant le tribunal administratif de Basse-Terre tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes à réparer le préjudice résultant du défaut de communication de son dossier médical est rejetée.

Article 3 : La somme à laquelle le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes a été condamné est ramenée de 13 000 euros à 10 400 euros et la somme qu'il devra verser à M. B... telle que déterminée par l'article 3 du jugement devra être réduite de 20 %.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre en date du 6 octobre 2011 est réformé pour sa partie relative à la responsabilité médicale du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes en ce qu'il est contraire aux articles 2 et 3 du présent arrêt.

Article 5 : La requête présentée par M. B...et le surplus de la requête présentée par le centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre/Les Abymes sont rejetés.

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Nos 11BX03233,12BX00020


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