Vu la requête enregistrée le 17 décembre 2012, présentée pour Mlle A...D...et M. C...D..., demeurant..., ayants droit de M. B...D..., par Me E...;
Les consorts D...demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000729 du 17 octobre 2012 du tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté la demande de M. B...D...tendant à la condamnation du foyer départemental Lannelongue à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation du préjudice causé par la rupture de son contrat de travail, avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2010, ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de condamner le foyer départemental Lannelongue à leur verser la somme de 20 000 euros à titre d'indemnités, majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2010 ;
3°) de mettre à la charge du foyer départemental Lannelongue la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les décisions du 21 février 2013 du bureau d'aide juridictionnelle admettant Mlle A... D...et M. C...D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu la directive 1999/70/CE du Conseil de l'Union européenne du 28 juin 1999 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée ;
Vu la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2013 :
- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;
- les observations de Me De Oliveira, avocat du foyer départemental Lannelongue ;
1. Considérant que M. B...D...a été recruté par le foyer départemental Lannelongue à Saint-Trojan-les-Bains (Charente-Maritime) à compter du 15 février 1999 au titre de contrats emploi-solidarité reconduits jusqu'au 14 février 2000 ; qu'à compter du 15 février 2000, il a été employé par le même foyer départemental au moyen de contrats emploi-consolidé renouvelés jusqu'au 14 février 2004 ; qu'à compter du 15 février 2004, il a été recruté par le foyer départemental en qualité d'agent d'entretien spécialisé puis d'agent d'entretien qualifié, au moyen de contrats à durée déterminée renouvelés jusqu'au 31 août 2008 ; que sa demande devant le tribunal administratif tendant à la condamnation du foyer départemental Lannelongue à lui verser une somme de 20 000 euros au titre des préjudices causés par son éviction du service, a été reprise en cours d'instance par ses enfants, Mlle A... D... et M. C... D..., suite à son décès le 7 février 2012 ; que les consorts D...font appel du jugement du 17 octobre 2012 du tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté la demande de M. D... tendant à la condamnation du foyer départemental Lannelongue à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation du préjudice causé par la rupture de son contrat de travail, avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2010, ainsi qu'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, à l'exception de ceux réservés aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. " ; qu'aux termes du I de l'article 19 de la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique : " Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de la publication de la présente loi ou bénéficie, à cette date, d'un congé en application des dispositions du décret mentionné à l'article 10 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article 9 de la même loi. / Lorsque, à la date de publication de la présente loi, l'agent est en fonction depuis six ans au moins, de manière continue, son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que par décision expresse et pour une durée indéterminée. " ; que l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique dispose : " Par dérogation à l'article 3 du titre Ier du statut général, les emplois permanents mentionnés au premier alinéa de l'article 2 peuvent être occupés par des agents contractuels lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient, notamment lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires hospitaliers susceptibles d'assurer ces fonctions ou lorsqu'il s'agit de fonctions nouvellement prises en charge par l'administration ou nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées. / Les emplois à temps non complet d'une durée inférieure au mi-temps et correspondant à un besoin permanent sont occupés par des agents contractuels. / Les agents ainsi recrutés peuvent être engagés par des contrats d'une durée indéterminée ou déterminée. Les contrats à durée déterminée mentionnés ci-dessus sont d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par décision expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période de reconduction mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée. " ; qu'il résulte de ces dispositions que seuls les agents ayant été recrutés, en application de l'article 9 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, sur des emplois permanents peuvent bénéficier, après six années de fonctions et par décision expresse, d'un contrat à durée indéterminée ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les contrats conclus entre M. D...et le foyer départemental Lannelongue, entre le 15 février 2004 et le 31 août 2008, l'ont été sur le fondement de l'article 9 de la loi précitée du 9 janvier 1986, afin de pourvoir à un manque de personnel ; que, toutefois, les contrats conclus entre le 15 février 1999 et le 14 février 2004 l'ont été non sur le fondement de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 mais au titre de contrats emploi-solidarité et de contrats emploi-consolidé en application des dispositions des articles L. 322-4-7 et L. 322-4-8-1 du code du travail relatif aux contrats aidés qui sont contrats de droit privé ; que, par suite, M. D...ne peut se prévaloir de six années de services effectifs dans un emploi occupé sur le fondement de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 lui permettant de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée ;
4. Considérant que M. D...ne peut se prévaloir directement des dispositions de la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 du Conseil de l'Union européenne concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée pour soutenir qu'il devait bénéficier d'un contrat à durée indéterminée, dès lors que cette directive a été transposée en droit interne par la loi du 26 juillet 2005 ; qu'au demeurant cette loi ayant prévu des raisons objectives justifiant le renouvellement des contrats à durée déterminée, ainsi qu'une durée maximale totale et un nombre spécifié de renouvellements, les dispositions de la loi du 9 janvier 1986 modifiée par loi du 26 juillet 2005 ne sont pas incompatibles avec les objectifs de la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 ;
5. Considérant que le dernier contrat de M. D... prenait fin au 31 août 2008 ; que, dans ces conditions, la décision du foyer départemental de ne pas le reconduire à son terme ne saurait constituer une décision de licenciement, mais un refus de renouvellement ; qu'il en résulte que les conclusions des requérants tendant au versement d'une indemnité de licenciement doivent être rejetées ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'en ne requalifiant pas les contrats de M. D...en contrat à durée indéterminée, le foyer départemental Lannelongue n'a pas commis d'illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité ; que les consorts D...ne sont dès lors pas fondés à demander réparation du préjudice qu'aurait subi M. D... en raison de l'absence de requalification de ses contrats ;
7. Considérant que les requérants soutiennent, enfin, que la conclusion le 1er juillet 2008 d'un contrat de travail d'une durée de deux mois, alors que les précédents étaient d'une durée de trois mois, a constitué une discrimination en raison de l'état de santé de leur père, " qu'elle a été prise en considération de la personne " et " révèle une infraction pénale " ; que, toutefois, M. D...n'avait pas de droit acquis au renouvellement de son contrat par un nouveau contrat de même durée ; que les requérants ne démontrent pas l'existence d'une discrimination illégale ayant eu pour conséquence la limitation de la durée du dernier contrat de l'intéressé en raison de son état de santé ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'en limitant à deux mois la durée du dernier contrat, le foyer départemental Lannelongue ait entaché sa décision d'erreur de droit ou de détournement de pouvoir ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conditions de renouvellement des contrats et de cessation des fonctions de M. D...n'ont pas constitué de faute de nature à engager la responsabilité du foyer départemental Lannelongue ;
9. Considérant que si les consorts D...demandent le versement de deux mois de salaire pour non-respect du délai de préavis, il ne résulte pas de l'instruction que M. D...n'aurait pas été payé jusqu'à la fin de son contrat ; que les requérants ne justifient pas de l'existence d'un préjudice particulier du fait de l'absence de respect du préavis ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande ;
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du foyer départemental Lannelongue, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts D...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme que le foyer départemental Lannelongue demande sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE
Article 1er : La requête des consorts D...est rejetée.
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No 12BX03166