La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/06/2014 | FRANCE | N°13BX00040

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 11 juin 2014, 13BX00040


Vu la requête enregistrée le 7 janvier 2013, présentée pour Mme D...A..., épouseC..., demeurant..., par Me B... ;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0800021 du 20 novembre 2012 de la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation des décisions du 4 juillet 2007 de l'inspecteur d'académie de l'Ariège et du 18 décembre 2007 de l'inspecteur d'académie de la Haute-Garonne qui rejettent ses réclamations préalables d'indemnisation, et, d'autre part, à la condamnat

ion de l'Etat à lui verser les sommes de 660 euros au titre de la perte de rému...

Vu la requête enregistrée le 7 janvier 2013, présentée pour Mme D...A..., épouseC..., demeurant..., par Me B... ;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0800021 du 20 novembre 2012 de la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation des décisions du 4 juillet 2007 de l'inspecteur d'académie de l'Ariège et du 18 décembre 2007 de l'inspecteur d'académie de la Haute-Garonne qui rejettent ses réclamations préalables d'indemnisation, et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes de 660 euros au titre de la perte de rémunération, de 689,31 euros au titre des frais de déplacements, de 23 822 euros au titre de la reconstitution de la carrière et de 15 000 euros au titre du préjudice moral, et d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter de la réclamation préalable du 22 mai 2007 ;

2°) d'annuler les décisions précitées du 4 juillet 2007 et du 18 décembre 2007

3°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes susmentionnées en réparation de ses divers préjudices, ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2007 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) d'assortir ces condamnations d'une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le décret n° 90-680 du 1er août 1990 modifié ;

Vu l'arrêté du 2 octobre 1991 relatif aux conditions de délivrance du diplôme professionnel de professeur des écoles pris pour l'application du décret du 1er août 1990 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2014 :

- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme D...C...a été reçue en juin 2004 au concours de professeur des écoles, spécialité occitan, au titre du département de l'Ariège ; qu'elle a été autorisée par le recteur de l'académie de Toulouse, pour raisons familiales, à effectuer son année de stage en 2004-2005 non à l'institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) de Foix, mais à celui de Toulouse ; qu'au titre de sa spécialité, elle devait cependant suivre un module d'occitan, dispensé uniquement par le centre de formation de Tarbes ; qu'en raison de son absentéisme à ce module, le jury académique n'a pas validé son année de stage ; que par un arrêté du 10 juillet 2005, le recteur d'académie l'a autorisée à effectuer une seconde année de stage en situation ; que par un arrêté du 25 août 2005, il l'a affectée à l'école de Lézat-sur-Lèze (Ariège) pour l'année scolaire 2005-2006, en service à temps partiel comme elle l'avait demandé ; qu'elle a dû à nouveau suivre le module d'occitan à Tarbes, lequel a été validé en juin 2006 ; qu'à l'issue de cette seconde année de stage, Mme C...a été titularisée dans le corps de professeur des écoles du département de la Haute-Garonne à compter du 1er septembre 2006 ; que par un courrier du 22 mai 2007, elle a adressé à l'inspecteur d'académie de l'Ariège une demande indemnitaire préalable tendant à la réparation des préjudices résultant, selon elle, des décisions du recteur des 10 juillet et 25 août 2005 ; que par une décision du 4 juillet 2007, cet inspecteur a rejeté la demande de Mme C...; que par un courrier du 29 novembre 2007, elle a renouvelé la même demande auprès de l'inspecteur d'académie de la Haute-Garonne, qui a également rejeté cette demande par une décision du 18 décembre 2007 ; que Mme C...fait appel de l'ordonnance de la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté comme irrecevable sa demande tendant, d'une part, à l'annulation des deux décisions précitées du 4 juillet et du 18 décembre 2007 et, d'autre part, à ce que l'Etat soit condamné à lui verser les sommes de 660 et 689,31 euros au titre de la perte de rémunération et des frais entraînés par les déplacements qu'elle a dû effectuer à Tarbes pour suivre le module d'occitan dans le cadre de sa seconde année de stage, la somme de 23 822 euros au titre de la reconstitution de sa carrière et de 15 000 euros au titre de son préjudice moral, sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2007, date de sa première réclamation préalable ;

Sur la régularité de l'ordonnance :

2. Considérant que par sa décision du 4 juillet 2007, l'inspecteur d'académie de l'Ariège a rejeté les demandes indemnitaires de MmeC..., tout en s'estimant incompétent s'agissant du remboursement des frais liés à la formation en occitan effectuée à Tarbes en 2005-2006, au motif que " les conditions de formation et de remboursement des frais de formation ne dépendaient pas de son autorité, mais de celle de l'IUFM " ; qu'il s'est également déclaré incompétent s'agissant de la demande de reconstitution de carrière, au motif que, depuis le 1er septembre 2006, la carrière de Mme C...dépendait de l'inspecteur d'académie de la Haute-Garonne ; qu'il indique cependant avoir transmis copie du courrier de l'intéressée au recteur ; que par sa décision du 18 décembre 2007, prise en réponse à une demande indemnitaire identique formée par MmeC..., l'inspecteur d'académie de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de reconstitution de carrière et s'est estimé incompétent pour rémunérer ou indemniser la formation suivie à Tarbes en occitan au motif où Mme C...était à l'époque professeur dans le département de l'Ariège ;

3. Considérant que, pour rejeter les conclusions à fin d'annulation et d'indemnisation présentées par Mme C...comme entachées d'une irrecevabilité manifeste sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le premier juge a considéré que le délai de recours contentieux à l'encontre de la décision du 4 juillet 2007 était expiré et que la décision du 18 décembre 2007 devait être regardée comme une décision confirmative de la précédente et donc insusceptible de rouvrir le délai de recours contentieux ;

4. Considérant toutefois que la demande de Mme C...doit être regardée dans son ensemble comme une demande de plein contentieux, tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser des indemnités en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité des décisions prises par le recteur les 10 juillet et 25 août 2005 ; qu'il résulte de l'instruction que sa réclamation adressée à l'inspecteur d'académie de l'Ariège a été transmise par celui-ci au recteur d'académie de Toulouse ; que l'absence de réponse du recteur à cette réclamation a fait naître une décision implicite de rejet, qui a lié le contentieux ; que, dans ces conditions, la demande de la requérante doit être regardée comme dirigée contre cette décision implicite de rejet laquelle, en l'absence de décision expresse, n'a pu faire courir le délai du recours contentieux en application de l'article R. 421-3 du code de justice administrative ; que, par suite, c'est à tort que le premier juge a estimé que la demande de Mme C...était irrecevable au motif, d'une part, qu'en tant qu'elle était dirigée contre la décision de l'inspecteur d'académie de l'Ariège du 4 juillet 2007, elle était tardive et, d'autre part, que la décision de l'inspecteur d'académie de la Haute-Garonne était une décision confirmative de la précédente ; que, par suite, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Toulouse ;

Au fond :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 10 du décret n° 90-680 du 1er août 1990 relatif au statut particulier des professeurs des écoles dans sa rédaction applicable au litige : " Les professeurs des écoles stagiaires reçoivent une formation professionnelle d'une année, qui constitue la deuxième année de formation professionnelle et qui comprend des périodes de formation théorique et pratique, dont les stages en responsabilité, organisées par les instituts universitaires de formation des maîtres. (...) Les professeurs des écoles stagiaires sont affectés dans un département de l'académie au titre de laquelle ils ont été recrutés. Le choix du département est effectué en fonction des voeux des intéressés et dans l'ordre de leur classement à l'un des concours prévus au 1° de l'article 4 du présent décret. " ; que selon l'article 12 du même décret : " A l'issue du stage prévu au premier alinéa de l'article 10 ci-dessus, l'aptitude des stagiaires au professorat est constatée par la délivrance du diplôme professionnel de professeur des écoles, qui est le certificat d'aptitude au professorat des écoles. / Lors de leur titularisation, les professeurs des écoles sont affectés dans le département dans lequel ils ont été affectés en qualité de stagiaire. S'il n'y a pas de poste vacant dans ce département, ils peuvent être affectés dans un autre département de l'académie ou, en cas d'impossibilité, dans un département d'une autre académie. / Ils sont préalablement informés des départements qui leur sont proposés. " ; que l'article 1er de l'arrêté du 2 octobre 1991 relatif aux conditions de délivrance du diplôme professionnel de professeur des écoles pris pour l'application du décret du 1er août 1990 dispose : " Le diplôme professionnel de professeur des écoles validant l'année de stage effectuée par les candidats admis aux concours prévus à l'article 4 du décret du 1er août 1990 susvisé est délivré par le recteur selon des modalités fixées par le présent arrêté " ; que selon l'article 3 du même arrêté : " Le jury académique se prononce après avoir pris connaissance, d'une part, du dossier individuel du professeur stagiaire comportant les résultats de celui-ci à l'issue de sa formation en deuxième année d'institut universitaire de formation des maîtres et, d'autre part, des propositions du directeur de l'institut universitaire de formation des maîtres. En ce qui concerne les professeurs stagiaires en situation, le jury se prononce au vu du résultat d'une inspection effectuée par un des membres du jury dans une classe confiée au professeur stagiaire. Cette inspection est suivie d'un entretien. " ; que l'article 4 de ce même arrêté dispose : " Après délibération, le jury établit la liste des professeurs stagiaires qu'il estime aptes à se voir délivrer le diplôme professionnel de professeur des écoles " ; qu'enfin, aux termes de l'article 6 de cet arrêté : " Le recteur arrête la liste des professeurs stagiaires qui ont obtenu le diplôme professionnel de professeur des écoles. Il arrête par ailleurs la liste des professeurs des écoles stagiaires autorisés à accomplir une seconde année de stage et la liste des professeurs stagiaires licenciés ou remis à la disposition de leur administration d'origine. " ;

7. Considérant que Mme C...soutient que la décision du jury académique de ne pas l'inscrire sur la liste d'aptitude au diplôme de professeurs des écoles à la fin de l'année scolaire 2004-2005 était illégale, en ce que le jury s'est uniquement fondé sur ses absences au module d'occitan et non sur ses compétences ou ses qualités pédagogiques ; que les appréciations d'un jury en matière pédagogiques étant souveraines, le juge ne peut exercer son contrôle que sur le fait que le jury se serait fondé sur des motifs étrangers aux aptitudes ou aux compétences du stagiaire ; qu'en l'espèce, les absences répétées de Mme C...à la formation d'occitan qu'elle était tenue de suivre au titre de sa spécialité dans cette langue n'ont pas permis au jury d'apprécier ses aptitudes et ses compétence dans cette matière ; que, par suite, en ayant refusé de l'inscrire sur la liste d'aptitude, le jury ne s'est pas fondé sur des motifs étrangers aux aptitudes et aux compétences de l'intéressée ;

8. Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'arrêté du 2 octobre 1991, le recteur de l'académie de Toulouse était tenu de ne pas délivrer le diplôme de professeurs des écoles à Mme C... qui n'avait pas été inscrite sur la liste d'aptitude établie par le jury académique ; qu'en revanche, l'année de stage de l'intéressée n'ayant pas été validée, le recteur pouvait soit la licencier, soit l'autoriser à accomplir une seconde année de stage, ce qu'il a fait par sa décision du 10 juillet 2005 ; qu'il résulte de l'instruction que le recteur a tenu compte à la fois de la situation familiale de Mme C...et de ses bons résultats dans les autres matières que l'occitan pour prendre cette décision qui n'est dès lors pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée ;

9. Considérant que par son arrêté du 25 août 2005, le recteur a décidé d'affecter Mme C..., pour sa seconde année de stage, à l'école de Labarthe-sur-Lèze et ce, à mi-temps ; qu'ayant été reçue au concours de professeurs des écoles au titre du département de l'Ariège, la requérante n'est pas fondée à se plaindre d'une telle affectation dans ce département, alors qu'il résulte de l'instruction que cette école est, dans l'Ariège, une des affectations les plus proches possibles de son domicile, situé dans la Haute-Garonne ; qu'il résulte également de l'instruction que le mi-temps a été accordé à Mme C...sur sa demande et qu'au surplus son emploi du temps avait été aménagé de sorte que toutes ses heures soient regroupées en début de semaine, afin de lui laisser le temps de s'occuper de sa fille handicapée et de suivre le module d'occitan à Tarbes, l'intéressée ayant refusé une solution sans déplacements de contrat personnalisé de formation en didactique de l'occitan ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration n'ayant pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité, Mme C...n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui verser les indemnités ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au prononcé d'une astreinte dont sont assorties ses conclusions indemnitaires et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : L'ordonnance n° 0800021 de la présidente de la 5ème chambre du tribunal administratif de Toulouse du 20 novembre 2012 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Toulouse et le surplus de ses conclusions présentées devant la cour sont rejetés.

''

''

''

''

2

No 13BX00040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00040
Date de la décision : 11/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Effets des annulations - Reconstitution de carrière.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : CABINET DESPRES et NAKACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-06-11;13bx00040 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award