Vu la requête, enregistrée le 8 février 2013, présentée pour le groupement forestier de l'Aumelet, dont le siège est 74 avenue Gambetta à Le Blanc (36300), par la SCP Paule le Bail - Jean-Philippe le Bail, avocat ;
Le groupement forestier de l'Aumelet demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100742 du 6 décembre 2012 en tant que le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 mars 2011 par laquelle le préfet de l'Indre a, sur recours gracieux obligatoire, fait opposition à sa déclaration d'un plan d'eau sur le territoire de la commune de Thenay (Indre) ;
2°) d'annuler la décision contestée ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise judiciaire et de répartir à parts égales la charge des frais d'expertise entre l'Etat et lui-même ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2015 :
- le rapport de Mme Béatrice Duvert, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;
- et les observations de Me Le Bail, avocat du groupement forestier de l'Aumelet ;
1. Considérant que, par un arrêté du 18 juin 2009, le préfet de l'Indre s'est opposé à la déclaration du groupement forestier de l'Aumelet tendant à la régularisation de la création d'un plan d'eau servant de défense à l'incendie, situé sur le territoire de la commune de Thenay (Indre) ; que la décision du 21 août 2009 de rejet du recours gracieux obligatoire formé contre cet arrêté ayant été annulée par un jugement du tribunal administratif de Limoges du 7 octobre 2010, le préfet de l'Indre a repris l'instruction dudit recours gracieux obligatoire et, par une décision du 4 mars 2011, de nouveau rejeté ce recours ; que le groupement forestier de l'Aumelet interjette appel du jugement du tribunal administratif de Limoges du 6 décembre 2012 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 4 mars 2011 :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant que le groupement forestier de l'Aumelet n'avait, en première instance, présenté que des moyens d'illégalité interne contre la décision du 4 mars 2011 ; qu'ainsi, les moyens d'illégalité externe tirés des vices de procédure dont serait entaché la consultation du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) et de l'insuffisance de motivation de la décision contestée, qui relèvent d'une cause juridique distincte de celle invoquée en première instance, ont le caractère d'une demande nouvelle en appel et sont, par suite, irrecevables ;
En ce qui concerne la légalité interne :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 214-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations ne figurant pas à la nomenclature des installations classées, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 214-2 du même code : " Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l'article L. 214-1 sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d'Etat après avis du Comité national de l'eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu'ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques compte tenu notamment de l'existence des zones et périmètres institués pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 214-3 dudit code : " (...) / II.- Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3. / Dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, l'autorité administrative peut s'opposer à l'opération projetée s'il apparaît qu'elle est incompatible avec les dispositions du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ou du schéma d'aménagement et de gestion des eaux, ou porte aux intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 une atteinte d'une gravité telle qu'aucune prescription ne permettrait d'y remédier. Les travaux ne peuvent commencer avant l'expiration de ce délai. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 211-1 de ce code : " I. - Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer : / 1° (...) la préservation des écosystèmes aquatiques (...) / 2° La protection des eaux (...) / 3° La restauration de la qualité de ces eaux et leur régénération ; / (...) 7° Le rétablissement de la continuité écologique au sein des bassins hydrographiques. / (...) " ; que l'article R. 214-1 du même code dispose : " La nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation ou à déclaration en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 figure au tableau annexé au présent article. / (...) 3. 2. 3. 0. Plans d'eau, permanents ou non : / (...) 2° Dont la superficie est supérieure à 0,1 ha mais inférieure à 3 ha (D) [déclaration]. / (...) " ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 214-10 du code de l'environnement : " Les décisions prises en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 et L. 214-8 peuvent être déférées à la juridiction administrative dans les conditions prévues à l'article L. 514-6 " ; qu'en vertu de l'article L. 514-6, ces décisions sont soumises à un contentieux de pleine juridiction ;
5. Considérant qu'en vertu des articles L. 214-3 et R. 214-1 précités du code de l'environnement, le groupement forestier de l'Aumelet a souscrit le 14 mai 2009 une déclaration portant sur la régularisation de la création d'un plan d'eau de moins de trois hectares ; que le préfet de l'Indre s'est opposé à cette opération en retenant plusieurs motifs ; qu'il a d'abord retenu que la création du plan d'eau situé sur le bassin versant du " Brion " porterait atteinte à ce cours d'eau désigné comme en très bon état écologique par le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Loire-Bretagne et dont la préservation est essentielle au regard des objectifs de bon état écologique à l'horizon 2015 fixés par la directive cadre sur l'eau ; que le préfet a ensuite relevé que le projet " n'est pas compatible avec le SDAGE et notamment les dispositions 1C - limiter et encadrer la création des plans d'eau " ; qu'enfin, l'autorité administrative a motivé la décision contestée par l'absence d'intérêt économique et/ou collectif de l'opération ; qu'il s'ensuit que le requérant ne peut valablement soutenir que la décision contestée serait fondée sur le seul motif tiré de ce que le cours d'eau Le Brion est désigné en très bon état écologique par le SDAGE et inclus dans les objectifs de bon état écologique à l'horizon 2015 fixés par la directive cadre sur l'eau ; qu'à supposer que le préfet n'ait retenu que ce seul motif, cette circonstance ne serait pas de nature à entacher sa décision d'erreur de droit ;
6. Considérant, d'une part, que si le groupement forestier de l'Aumelet soutient que son massif forestier, qui s'étend sur cent hectares de chêneraie, ne dispose d'aucun point d'eau, il n'est pas établi que l'opération en cause présenterait pour autant un intérêt au regard de l'objectif de lutte contre l'incendie, alors qu'il n'est pas contesté que le service départemental d'incendie et de secours, présent lors de la séance du CODERST du 10 janvier 2011, n'a pas estimé le projet pertinent et qu'une part importante des parcelles boisées du groupement forestier est éloignée du projet de plan d'eau ; que si le requérant fait, par ailleurs, état de ce que les gros gibiers déserteraient les massifs sans point d'eau, le ministre réplique, sans être contredit, que ces animaux se satisfont de ressources très diffuses, telles que rosées et flaques ; que si dans le dernier état de ses écritures, le groupement forestier de l'Aumelet invoque la nécessité de la création d'un plan d'eau de grande capacité pour permettre l'attraction et la sédentarisation du gibier d'eau, ainsi que le développement d'une population piscicole, il n'apporte pas d'élément permettant d'établir que le plan d'eau en cause permettrait, au regard de ses caractéristiques et de son environnement, le développement pérenne d'activités de chasse aux gibiers d'eau et de pêche ; que, dès lors, l'intérêt cynégétique d'un projet de création du plan d'eau en cause, estimé entre deux et cinq mille mètres cubes entre le début de l'automne et la fin du mois de mai, n'est pas justifié ;
7. Considérant, d'autre part, que le groupement forestier de l'Aumelet fait valoir que l'opération en cause n'aurait pas d'incidence sur le cours d'eau Le Brion ; que, toutefois, le requérant n'apporte aucun élément permettant de contester utilement que l'alimentation du plan d'eau suppose un prélèvement dans le cours d'eau en fin d'été pour compenser l'évaporation de l'eau constatée à cette période et que ledit prélèvement induit une baisse du niveau du plan d'eau d'environ quarante centimètres ; qu'en particulier, la réalité d'essais de fonctionnement et de vidange du plan d'eau réalisés entre 2005 et 2009 qui concluraient à une absence de perturbation du cours d'eau n'est corroborée par aucune pièce du dossier ; que si le groupement forestier fait également état d'une absence d'écoulement des eaux entre le projet, qui ne recevrait que des eaux de ruissellement forestières, et ledit cours d'eau, et produit à l'appui de cette affirmation une note hydrogéologique relative au site du projet de juin 2013, il n'est toutefois pas exclu par cette note que, tout au moins en période de crues, la vallée du Brion soit alimentée par les eaux de ruissellement susmentionnées ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit aux points 5 à 7, qu'en prenant la décision contestée, le préfet de l'Indre n'a pas méconnu les dispositions précitées du II de l'article L. 214-3 du code de l'environnement ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise judiciaire sollicitée, que le groupement forestier de l'Aumelet n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 mars 2011 du préfet de l'Indre ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le groupement forestier de l'Aumelet demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du groupement forestier de l'Aumelet est rejetée.
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N° 13BX00451