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08/06/2015 | FRANCE | N°14BX03562

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 08 juin 2015, 14BX03562


Vu la requête enregistrée le 18 décembre 2014, présentée pour Mme F...A...B...épouseC..., demeurant..., par Me E...;

Matondo B...épouse C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404132 du 19 novembre 2014 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2014 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destina

tion;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de...

Vu la requête enregistrée le 18 décembre 2014, présentée pour Mme F...A...B...épouseC..., demeurant..., par Me E...;

Matondo B...épouse C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404132 du 19 novembre 2014 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2014 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à tout le moins de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme F...A...B...épouseC..., née en 1969 à Kinshasa, de nationalité congolaise (République Démocratique du Congo), est entrée irrégulièrement en France, le 22 août 2010 selon ses dires ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 24 août 2011, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 1er juin 2012 ; que l'intéressée, qui a épousé le 21 janvier 2012 un compatriote résidant en France, M.D..., a sollicité la délivrance d'une carte de séjour en qualité d'étranger malade le 4 janvier 2013 ; qu'elle fait appel du jugement du 9 novembre 2014 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2014 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé , sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; que l'article R. 313-22 du même code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...B...présente une pathologie cardio-respiratoire ; que, par un avis du 10 janvier 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a considéré que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale, que le défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existait, dans son pays d'origine, un traitement approprié et que le traitement nécessité par son état de santé devait, en l'état actuel, être poursuivi pendant une durée indéterminée ;

4. Considérant que Mme A...B...n'ayant soulevé en première instance aucun moyen de légalité externe, elle n'est pas recevable à soulever en appel un moyen tiré d'un défaut de motivation dont seraient entachés l'avis du médecin de l'agence régionale de santé émis le 10 janvier 2014 et le refus de séjour contesté ;

5. Considérant qu'il ressort des termes même de l'arrêté contesté que le préfet ne s'est pas senti lié par cet avis et a cherché à apprécier si les éléments présentés par l'intéressée constituaient des motifs justifiant son admission au séjour au titre de son état de santé ; que par suite, le moyen tiré de ce que le préfet se serait cru en situation de compétence liée doit être écarté ;

6. Considérant que si la requérante soutient qu'il n'y a pas de traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, la seule production d'un certificat médical établi par un médecin généraliste le 16 décembre 2014, à une date au demeurant postérieure à l'arrêté contesté, lequel se borne à affirmer " à ma connaissance, pas de possibilité de soins dans son pays d'origine ", ne suffit pas à infirmer l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, lequel, a conclu à l'existence d'un traitement approprié en République démocratique du Congo ; que, dans ces conditions, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas entaché sa décision de refus de titre de séjour d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant que Mme A...B...fait valoir que, contrairement à ce qu'a relevé le préfet dans la décision en litige, elle ne dispose plus d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine et qu'il n'a pas mentionné que son époux réside depuis plus de trente ans en France où il dispose de la totalité de ses attaches familiales et personnelles ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que lors de sa demande de titre de séjour du 4 janvier 2013, Mme A...B...a indiqué que ses deux enfants mineurs ainsi que son frère et ses trois soeurs résidaient en RDC ; qu'elle s'est également déclarée célibataire et hébergée par un ami ; que si, en appel, l'intéressée soutient que ses deux enfants vivraient désormais au Canada avec leur père et qu'elle n'a plus aucune attache familiale dans son pays d'origine, elle n'en justifie pas alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait, au cours de la demande d'instruction de son dossier, informé le préfet de ces nouveaux éléments, non plus que de son mariage, le 21 janvier 2012 ; que dans ces conditions, le préfet, qui n'a pas commis d'erreur de fait et qui a examiné tous les éléments de la situation familiale et personnelle de Mme A...B...dont il disposait à la date de sa décision, ne peut être regardé comme ne s'étant pas livré à un examen attentif de sa situation personnelle ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

9. Considérant que Mme A...B...fait valoir qu'elle est désormais mariée avec un compatriote, titulaire d'une carte de séjour de longue durée et qu'elle n'a plus aucune attache dans son pays d'origine où elle ne peut retourner dans la mesure où elle ne pourra pas y recevoir un traitement approprié à sa pathologie ; que cependant, comme cela a été dit ci-dessus, elle ne justifie pas de ce que ses enfants mineurs ainsi que son frère et ses soeurs ne vivraient plus en République démocratique du Congo, contrairement à ce qu'elle a affirmé au moment de sa demande de titre de séjour ; qu'elle ne justifie pas non plus, par la production en appel d'un contrat de location, d'avis d'échéances de loyers et d'un avis d'imposition, tous établis aux noms des deux époux au titre de la seule année 2012, avoir encore une vie commune avec son époux, dès lors qu'elle s'est déclarée célibataire lors de sa demande de titre de séjour effectuée en janvier 2013 et a produit deux attestations d'hébergement par un ami datées de décembre 2012 et mai 2013 ; qu'enfin, comme cela a également été dit ci-dessus, Mme A...B...n'établit pas qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en cas de retour en RDC ; que dans ces conditions, compte tenu de ce que l'intéressée, qui est sans charges de famille en France, n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-et-un ans, et compte tenu également de ses conditions d'entrée et de séjour en France ainsi que du caractère récent de son mariage, le refus de séjour contesté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui lui ont été opposés ; que, par suite, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation de Mme A...B... ;

En ce qui concerne la mesure portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'en l'absence d'illégalité entachant la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...). " ; que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 ci-dessus, et alors que Mme A...B...ne fait pas valoir qu'elle entrerait dans un cas de circonstance humanitaire exceptionnelle, le préfet n'a, en prenant la mesure d'éloignement contestée, commis ni erreur de droit ni erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 ;

12. Considérant que pour les motifs déjà exposés au point 9, en prenant cette mesure d'éloignement, le préfet de la Haute-Garonne n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'en l'absence d'illégalité entachant la décision portant refus de délivrance de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale ;

14. Considérant que pour les motifs déjà exposés au point 9 ci-dessus, le préfet de la Haute-Garonne n'a, en fixant le pays de renvoi, ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

16. Considérant que le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A...B... ; que par suite, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A... B...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

18. Considérant que la requérante ne justifie pas avoir engagé, dans la présente instance, des frais mentionnés à l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, ses conclusions, tendant à la condamnation de l'Etat aux entiers dépens, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme A...B...est rejetée.

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No 14BX03562


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX03562
Date de la décision : 08/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. JOECKLÉ
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : DUCOS MORTREUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-06-08;14bx03562 ?
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