Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2015, présentée pour MmeC..., demeurant ... par Me A...;
Mme C...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1403760 du 20 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 12 juin 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et interdiction de retour pendant deux ans et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler la décision du 12 juin 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois dans l'attente d'une nouvelle décision ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2015 :
- le rapport de Mme Catherine Monbrun, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
1. Considérant que MmeC..., ressortissant nigériane, relève appel du jugement du 20 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2014 du préfet de la Gironde refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour durant deux ans et fixant le pays de destination ;
Sur l'arrêté pris dans son ensemble :
2. Considérant qu'au soutien du moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué, Mme C...ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges ;
Sur la décision portant refus de séjour :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ; que l'article R. 313-22 du même code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). " ; que selon l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dernières dispositions : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois. " ;
4. Considérant, d'une part, que si la requérante soutient que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Aquitaine n'a pas été adressé au préfet de la Gironde sous le couvert du directeur de l'agence régionale de santé en méconnaissance des dispositions précitées de l'arrêté du 9 novembre 2011, il ne ressort pas des pièces du dossier, à supposer même que l'omission d'une telle formalité ait pu priver l'intéressée d'une garantie, que cette transmission n'ait pas été faite ; que, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C...ait porté à la connaissance du préfet de la Gironde, préalablement à l'intervention de l'arrêté contesté, des éléments relatifs à sa situation personnelle susceptibles d'être qualifiés de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de séjour serait irrégulière, faute d'avoir été précédée de la consultation du directeur général de l'agence régionale de santé ;
5. Considérant que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 16 avril 2014 mentionne que l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale, mais, d'une part, que le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et d'autre part, qu'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine ; que si la requérante produit un certificat médical en date du 9 septembre 2014 attestant qu'elle présente une neurofibromatose d'origine génétique, se traduisant par l'apparition de neurofibromes très disgracieux sur tout le corps et " qui pourraient se développer en interne dans le cerveau " et " qu'une surveillance est donc nécessaire sur du long terme ", ce certificat, au demeurant postérieur à la décision attaquée, ne suffit pas à remettre en cause l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé ; qu'il en va de même de la documentation générale, produite par la requérante et émanant du site du ministère des affaires étrangères, relative aux recommandations générales en matière de santé, données aux ressortissants français désirant se rendre au Nigéria ;
6. Considérant qu'en vertu des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
7. Considérant que si Mme C...soutient qu'elle est présente sur le territoire national depuis plus de trois ans, qu'elle n'est pas défavorablement connue des services de police et qu'elle apprend le français, il ressort cependant des pièces du dossier qu'elle est entrée irrégulièrement en France en 2011 et s'y est maintenue, en dépit d'une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 26 février 2013 à laquelle elle n'a pas déféré et dont la légalité a été confirmée tant par le tribunal administratif de Bordeaux que la cour administrative d'appel de Bordeaux ; qu'elle est célibataire et sans enfant et n'établit ni même n'allègue avoir des attaches familiales en France ; que ses parents et ses trois frères et soeurs résident au Nigeria, pays où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans ; qu'ainsi, la décision de refus de séjour n'a pas porté au droit de Mme C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs pour lesquels cette décision a été prise ; que le préfet de la Gironde n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la vie personnelle de l'intéressé ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant qu'un étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lorsque la loi prescrit qu'il doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour ; que toutefois, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme C... n'établit pas qu'elle devait se voir attribuer de plein droit un titre de séjour ; que dans ces conditions, elle n'est pas fondé à soutenir qu'elle ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;
9. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 ci-dessus, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressé, doivent également être écartés ;
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans :
10. Considérant qu'il y a lieu d'écarter les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse et de l'erreur manifeste d'appréciation par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
11. Considérant, en premier lieu, que la décision litigieuse vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle mentionne également les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile rejetant sa demande d'asile et relève que l'intéressée n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, cette décision énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne saurait être accueilli ;
12. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants " ; qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui doit faire l'objet d'une mesure d'éloignement de s'assurer, sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
13. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par Mme C...a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 19 octobre 2011 et que le recours de l'intéressée contre ce refus a été rejeté par la Cour nationale du droit d'asile le 30 janvier 2013 ; que, si la requérante fait valoir qu'elle est susceptible de subir des persécutions de la part du mouvement fondamentaliste musulman Boko Haram ou d'être atteinte par le virus Ebola, ses allégations à caractère très général ne sauraient établir qu'elle se trouverait effectivement, en cas de retour dans son pays d'origine, exposée à un risque réel, direct et sérieux pour sa vie et sa liberté ; que, dans ces conditions, en désignant le Nigéria comme pays d'éloignement, le préfet de la Gironde, dont il n'apparaît pas qu'il se soit senti lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ;
DECIDE
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
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N° 15BX00331