Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la société Spie Sud-Ouest à lui payer une indemnité de 453 101,23 euros en réparation des préjudices résultant des désordres constatés dans le cadre de l'exécution des travaux de construction du pôle de néphrologie hémodialyse et du service réanimation du groupe hospitalier Pellegrin.
Par un jugement n° 1102439 du 4 octobre 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande, rejeté les conclusions de la société Spie Sud-Ouest présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et mis à sa charge les dépens de l'instance.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 22 novembre 2013, 17 février 2015 et 16 mars 2015, le CHU de Bordeaux, représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 4 octobre 2013 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Spie Sud-Ouest à lui payer une indemnité ;
2°) de condamner la société Spie Sud-Ouest à lui payer la somme de 453 101,23 euros et d'indexer le montant de 423 101,23 euros sur l'indice BT01 du coût de la construction ;
3°) de mettre à la charge de la société Spie Sud-Ouest les dépens de l'instance et la somme de 7 176 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau,
- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public,
- et les observations de Me de la Marque, représentant la SAS Spie-Sud-Ouest.
Considérant ce qui suit :
1. Le 10 novembre 2003, la Sas Amec Spie Sud-Ouest s'est vu attribuer le lot n° 12 "chauffage-ventilation-désenfumage" du marché conclu avec le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux pour la construction du pôle de néphrologie-hémodialyse et d'un service de réanimation. Par un jugement du 4 octobre 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, rejeté la demande du CHU de Bordeaux tendant à la condamnation de la société Spie Sud-Ouest, sur les terrains de la responsabilité contractuelle et de la responsabilité décennale, à lui payer une indemnité de 453 101,23 euros en réparation des préjudices résultant des malfaçons constatées, d'autre part, mis à la charge de la société Spie Sud-Ouest les frais de l'expertise ordonnée en référé le 21 mai 2007. Le CHU de Bordeaux fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande indemnitaire. Par la voie de l'appel incident, la société Spie Sud-Ouest demande à la cour de mettre les frais de l'expertise à la charge du CHU de Bordeaux.
Sur la responsabilité contractuelle :
2. Aux termes de l'article 41.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, alors en vigueur, auquel renvoie l'article 9.2 du CCAG: " L'entrepreneur avise à la fois la personne responsable du marché et le maître d'oeuvre, par écrit, de la date à laquelle il estime que les travaux on été achevés ou le seront. Le maître d'oeuvre procède, l'entrepreneur ayant été convoqué, aux opérations préalables à la réception des ouvrages dans un délai qui, sauf stipulation différente du cahier des clauses administratives particulières, est de vingt jours à compter de la date de réception de l'avis mentionné ci- dessus ou de la date indiquée dans cet avis pour l'achèvement des travaux si cette dernière date est postérieure. (.....). En cas d'absence de l'entrepreneur à ces opérations, il en est fait mention audit procès-verbal et ce procès-verbal lui est alors notifié ". Aux termes de l'article 41.2 du même cahier : " Les opérations préalables à la réception comportent : - la reconnaissance des ouvrages exécutés ; - les épreuves éventuellement prévues par le cahier des clauses administratives particulières ; - la constatation éventuelle de l'inexécution des prestations prévues au marché ; - la constatation éventuelle d'imperfections ou malfaçons ; - sauf stipulation différente du cahier des clauses administratives particulières prévue au 11 de l'article 19, la constatation du repliement des installations de chantier et de la remise en état des terrains et des lieux ; - les constatations relatives à l'achèvement des travaux. Ces opérations font l'objet d'un procès-verbal dressé sur-le-champ par le maître d'oeuvre et signé par lui et par l'entrepreneur ; si ce dernier refuse de le signer, il en est fait mention (...)". Aux termes de l'article 41.3 : " Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'oeuvre, la personne responsable du marché décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. Si elle prononce la réception, elle fixe la date qu'elle retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée à l'entrepreneur dans les quarante-cinq jours suivant la date du procès-verbal. A défaut de décision de la personne responsable du marché notifiée dans le délai précisé ci-dessus, les propositions du maître d'oeuvre sont considérées comme acceptées (...) ". La réception, acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve, met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation.
3. En application des stipulations précitées des articles 41.1 et 41.2 du cahier des clauses administratives générales, le maître d'oeuvre doit procéder aux opérations préalables à la réception des ouvrages, qui comporte la constatation éventuelle d'imperfections, et en dresse procès-verbal. Si le dernier alinéa de l'article 41.3 prévoit une réception tacite des ouvrages à compter de la date d'établissement du procès-verbal, celle-ci n'est présumée avoir été prononcée qu'au terme d'une procédure contradictoire ne laissant aucun doute sur la commune intention des parties de procéder à la réception, éventuellement partielle, des travaux, et d'une durée suffisante pour permettre au maître d'ouvrage, en concertation avec le maître d'oeuvre, de mesurer la portée de sa décision. La signature par l'entrepreneur du procès-verbal, expressément prévue par l'article 41.2 précité, sauf refus exprès de l'entrepreneur de signer, auquel cas il en est fait mention, constitue une formalité substantielle dans le cadre de cette procédure.
4. Il résulte du rapport de l'expert commis par le juge des référés du tribunal administratif que des dysfonctionnements des installations hydrauliques et aérauliques, et des problèmes de réglage ont été constatés dès la mise en service des installations. Pour les niveaux "néphrologie-dialyse", "réanimation hors boxes" et "réanimation-boxes" les travaux ont été réceptionnés avec de nombreuses réserves, respectivement les 2 juin, 15 septembre et 24 novembre 2005. Pour le premier niveau, toutes les réserves n'ont pas été levées le 23 juin 2005. Pour les niveaux "réanimation", la société Amec Spie Sud-Ouest a, le 30 octobre 2006, été mise en demeure d'achever les prestations. Le défendeur fait valoir que l'ordre de service n° 6 du 30 juin 2006 notifié au constructeur le 20 juin 2007, improprement dénommé "PV de réception" n'a été établi unilatéralement qu'à l'effet d'arrêter les pénalités de retard imputables au constructeur qu'il fixe d'un point de vue " purement comptable " au 30 juin 2006 avec effet au 16 juin 2005 pour le niveau "néphrologie-dialyse" et au 15 novembre 2005 pour les niveaux "réanimation" et indique que "ces dates fictives de réception sans réserves " sont mentionnées pour " trouver un accord sur le montant du décompte ". Le document en cause, qui n'est pas établi contradictoirement et signé par les parties, ne peut être regardé comme portant réception des travaux sans réserves et, partant, comme mettant un terme aux relations contractuelles, alors, au demeurant que le 7 décembre suivant, le maître d'ouvrage faisait dresser un constat d'huissier. Il en résulte que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé sur le motif tiré de l'intervention de la réception des travaux sans réserves pour rejeter la demande du CHU de Bordeaux sur le fondement de la responsabilité contractuelle du constructeur.
5. L'expert, non sérieusement contesté sur ces points, a notamment relevé que " les causes proviennent pour les désordres aérauliques du sous traitant " et pour les désordres hydrauliques de la réalisation des travaux par la société, " La société Amec Spie a " manqué de professionnalisme " dans la surveillance des travaux non effectués par son sous-traitant l'Eurl LCI dans les règles de l'art et conformément au CCTP, de montage des réseaux aérauliques, " fourni des documents d'exécution incomplets et des DOE généralistes qui ne permettent pas une exploitation normale des installations par le service technique du CHU. Dans ce cadre, la société Amec Spie a failli aux pièces contractuelles ". Si le défendeur qui soutient que les désordres relèvent " de la seule responsabilité du maître d'oeuvre ", fait valoir que les autres prestations chiffrées relèvent du " défaut de conception concernant le maître d'oeuvre et réceptionnées sans réserves ", il ne résulte pas de l'instruction que le maître d'ouvrage serait intervenu dans la conception du projet dans des conditions de nature à atténuer la responsabilité des constructeurs. En ce qui concerne les désordres hydrauliques, il se borne à faire valoir que le centre hospitalier a choisi cette option technique et que le constructeur a exécuté les travaux dans les règles de l'art et concernant les désordres relatifs au réglage des mises en service, il ne conteste pas au fond cette demande.
6. Reprenant les estimations de l'expert non sérieusement contestées par le constructeur qui se borne à faire valoir que " l'examen des factures démontre le caractère fantaisiste de la demande " sans assortir ses allégations de précisions suffisantes, le demandeur évalue son préjudice à 244 171,71 euros pour la phase de conception des travaux, à 68 418,38 euros pour la phase d'exécution, à 79 252,13 euros pour les frais engagés dans le cadre du raccordement des urgences et à 31 259,01 euros les frais de maîtrise d'oeuvre. Il y a lieu de lui allouer de ce chef l'indemnité de 423 101,23 euros qu'il sollicite.
7. En revanche, en se bornant à invoquer, d'une part, la durée des travaux de reprise évaluée à 17 semaines par l'expert, d'autre part, des considérations générales sur la sécurité des personnes et les troubles dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier, le CHU de Bordeaux ne justifie pas du préjudice pour lequel il sollicite une indemnité de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts.
8. Si le CHU de Bordeaux demande l'indexation de l'indemnité allouée sur l'indice BT01 du coût de la construction à compter du 27 avril 2011, date à laquelle l'expert a déposé son rapport, l'évaluation des dommages subis doit être faite à la date où, leur cause ayant été déterminée et leur étendue prévisible étant connue, il pouvait être procédé aux travaux destinés à y remédier et à les réparer. En l'espèce, cette date peut être fixée comme celle à laquelle l'expert a déposé son rapport qui définit avec une précision suffisante la nature et l'étendue des travaux nécessaires. Le CHU de Bordeaux ne justifie ni même n'allègue s'être trouvé dans l'impossibilité technique ou financière de faire effectuer les travaux à cette période. Sa demande d'actualisation ne peut donc être accueillie.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le CHU de Bordeaux est fondé à demander la condamnation de la société Spie Sud-Ouest à lui payer une indemnité de 393 101,23 euros.
Sur les dépens et les frais de procès non compris dans les dépens :
10. L'article R. 761-1 du code de justice administrative prévoit que les dépens de l'instance sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. En mettant à la charge de la société Spie Sud-Ouest les frais de l'expertise ordonnée en référé le 21 mai 2007, liquidés et taxés à 11 583,51 euros TTC, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte application de ces dispositions.
11. L'article L. 761-1 du code fait obstacle à que le CHU de Bordeaux, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné sur ce fondement. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Spie Sud-Ouest la somme de 1 500 euros à payer au CHU de Bordeaux.
DECIDE
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du 4 octobre 2013 du tribunal administratif de Bordeaux sont annulés.
Article 2 : La société Spie Sud-Ouest versera au CHU de Bordeaux une indemnité de 423 101,23 euros et la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions du CHU de Bordeaux et les conclusions de la société Spie Sud-Ouest sont rejetés.
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N° 13BX03141