Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme Aéroport de la Réunion Roland Garros (SA ARRG) a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner l'association aéroclub Roland Garros à lui verser une provision de 261 950 euros sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.
Par une ordonnance n° 1400619 du 9 février 2015, le président du tribunal administratif de La Réunion, statuant en référé, a condamné l'association aéroclub Roland Garros à verser à la SA ARRG une provision de 800 euros et rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 mars 2015, la SA Aéroport de La Réunion Roland Garros, représentée par Me K==, demande au juge d'appel des référés :
1°) d'annuler cette ordonnance du tribunal administratif de La Réunion en tant qu'elle n'a fait droit que partiellement à sa demande de condamnation de l'association aéroclub Roland Garros à lui verser une provision d'un montant de 261 950 euros ;
2°) de condamner l'association aéroclub Roland Garros à lui verser une provision de 261 950 euros correspondant à la créance qu'elle détient sur elle, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative ;
3°) de condamner l'association aéroclub Roland Garros au paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu :
- l'ordonnance attaquée ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports, notamment son article 7 ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marianne Pouget ;
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Puziès, rapporteur public ;
- et les observations de Me J== représentant la société aéroport de La réunion Rolland Garros.
Une note en délibéré présentée pour la société aéroport de La réunion Rolland Garros a été enregistrée le 7 avril 2016.
Considérant ce qui suit :
1. En vertu d'une concession conclue avec le ministre chargé de l'aviation civile et accordée et modifiée par des arrêtés ministériels des 17 janvier 1972, 30 octobre 2002 et 23 juillet 2007, la chambre de commerce et d'industrie de La Réunion (CCIR) s'est vu confier la construction, l'entretien et l'exploitation de l'aérodrome Saint-Denis-Gillot devenu aéroport Roland Garros de Saint-Denis de La Réunion. Par un traité passé en application de l'article 7 de la loi du 20 avril 2005 susvisée, devenu définitif le 14 juin 2011, la CCIR a fait apport de la totalité de sa branche d'activité aéroportuaire à la société anonyme Aéroport de la Réunion de Roland Garros nouvellement créée. En sa qualité de nouveau gestionnaire de la concession aéroportuaire, la société Aéroport de La Réunion Rolland Garros a demandé à l'association aéroclub Roland Garros, titulaire de deux conventions d'autorisation temporaire d'occupation du domaine public aéroportuaire conclues respectivement le 11 août 1995 et le 12 décembre 2003 avec la CCIR, alors en charge de la gestion de l'aéroport, le paiement de redevances domaniales et de frais d'atterrissage dont elle restait débitrice ainsi que le règlement de factures de fourniture de carburant Avgas. Le montant des sommes restant dues s'élevant, selon la société aéroport de La Réunion Rolland Garros à 261 951,61 euros, cette dernière a demandé au juge des référés du tribunal administratif de La Réunion de condamner l'association aéroclub Roland Garros à lui verser la somme de 261 950 euros à titre de provision. Par une ordonnance du 9 février 2015, le président du tribunal administratif, statuant en référé, a condamné l'association aéroclub Roland Garros à verser à la société requérante la somme de 800 euros à titre de provision et rejeté le surplus de sa demande. La société Aéroport de La Réunion de Roland Garros relève appel de cette ordonnance en tant qu'elle n'a fait droit à sa demande qu'à hauteur de 800 euros.
2. L'association n'a pas produit de mémoire en défense en cause d'appel. Il doit toutefois être rappelé qu'en première instance, à titre principal, l'association a conclu au rejet de la demande de la société requérante comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître. Le moyen d'ordre public a ainsi été expressément soulevé dans le présent litige.
Sur la compétence de la juridiction administrative :
En ce qui concerne la demande de provision relative à la fourniture de carburant Avgas :
3. Les factures de carburant Avgas dont la société requérante demande le paiement à l'association aéroclub Roland Garros correspondent à des achats de carburant effectués par cette dernière entre 2008 et 2013 pour les besoins de ses aéronefs et hélicoptères légers. Contrairement à ce que soutient la société requérante, la fourniture de carburant n'est pas au nombre des services que le concessionnaire assurerait au titulaire de l'autorisation d'occupation du domaine public comme " relevant de l'usage normal des lieux attribués " au sens de l'article 24 du cahier des clauses et conditions générales des autorisations d'occupation temporaire délivrées par les concessionnaires d'aérodromes et ne constitue donc ni une " prestation intégrée à l'exécution des conventions d'occupation du domaine public " ni une fourniture directement liée à l'occupation. Les contrats dont s'agit ne sont pas davantage un accessoire des conventions d'occupation du domaine public dont est titulaire l'association aéroclub Roland Garros. Qu'ils se rapportent à la période pendant laquelle la chambre de commerce était chargée de l'exploitation de l'aéroport ou qu'ils concernent la période à partir de laquelle la société requérante, personne morale de droit privée, est devenue concessionnaire de la gestion de l'aéroport, ils présentent le caractère de contrats de droit privé et les litiges relatifs à ces contrats ressortissent dès lors à la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion a rejeté la demande susmentionnée et il y a lieu de confirmer que cette demande est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
En ce qui concerne la demande de provision relative aux frais d'atterrissage :
4. Aux termes du I de l'article L. 6325-1 du code des transports, reprenant les termes de l'ancien article L. 224-2 du code de l'aviation civile : " Les services publics aéroportuaires rendus sur les aérodromes ouverts à la circulation aérienne publique donnent lieu à la perception de redevances pour services rendus fixées conformément au deuxième alinéa de l'article L. 410-2 du code de commerce. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 224 1 du code de l'aviation civile : " Sur les aérodromes ouverts à la circulation aérienne publique et sur les aérodromes mentionnés aux articles R. 231-1 et R. 232-2, les services publics aéroportuaires donnant lieu à la perception de redevances en application de l'article L. 224-2 sont les services rendus aux exploitants d'aéronefs et à leurs prestataires de service à l'occasion de l'usage de terrains, d'infrastructures, d'installations, de locaux et d'équipements aéroportuaires fournis par l'exploitant d'aérodrome, dans la mesure où cet usage est directement nécessaire, sur l'aérodrome, à l'exploitation des aéronefs ou à celle d'un service de transport aérien ". Aux termes de l'article R. 224-2 du code de l'aviation civile : " (...) 1° Les redevances comprennent notamment : / - la redevance d'atterrissage, correspondant à l'usage, par les aéronefs de plus de six tonnes, des infrastructures et équipements aéroportuaires nécessaires à l'atterrissage, au décollage, à la circulation au sol, ainsi que, le cas échéant, aux services complémentaires, tels que le balisage, l'information de vol et les aides visuelles ; les tarifs de cette redevance sont fonction de la masse maximale certifiée au décollage de l'aéronef ".
5. Il résulte de l'instruction que la somme de 1 056 euros dont la société demande le paiement à titre de provision a trait à l'atterrissage des appareils exploités par l'association aéroclub Roland Garros. Le service rémunéré par cette redevance et exploité par la société requérante présente un caractère industriel et commercial. Il ne résulte ni de son objet ni de ses conditions de gestion, qui n'impliquent la mise en oeuvre directe d'aucune prérogative de puissance publique, que ce service qui, aux termes de l'article R. 224-1 précité du code de l'aviation civile, a trait à l'usage des infrastructures aéroportuaires nécessaires au service de transport aérien, revêtirait un caractère administratif, alors même qu'il implique l'usage d'ouvrages publics, qu'il est soumis à une tarification dont les conditions d'évolution sont fixées par voie réglementaire et que le défaut de paiement des redevances peut donner lieu, en vertu de l'article L. 6123-2 du code des transports, à une saisie conservatoire de l'aéronef, qui n'est au demeurant susceptible d'être requise par l'exploitant de l'aérodrome qu'auprès du juge judiciaire. Dans ces conditions, la demande de provision en cause, relative à la redevance d'atterrissage due à la société Aéroport de La Réunion Roland-Garros, personne morale de droit privé, par l'association en rémunération d'un service public industriel et commercial, relève de la compétence du juge judiciaire. Par suite, il y a lieu d'annuler l'ordonnance en tant qu'elle condamne l'association aéroclub Roland Garros au paiement d'une provision de 800 euros et statuant par la voie de l'évocation, de rejeter la demande susmentionnée de la société requérante comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
En ce qui concerne la demande de provision relative aux redevances domaniales :
6. Aux termes de l'article L. 2111-16 du code général de la propriété des personnes publiques, le domaine public aéronautique comprend " notamment les emprises des aérodromes et les installations nécessaires pour les besoins de la sécurité de la circulation aérienne situées en dehors de ces emprises ". L'article L. 2331-1 du même code dispose : " Sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : (...) 2° Au principe ou au montant des redevances d'occupation ou d'utilisation du domaine public, quelles que soient les modalités de leur fixation ".
7. Il résulte de l'instruction que par une convention du 11 août 1995, l'association s'est vu octroyer le droit d'occuper deux hangars et un local de bureaux situés dans l'enceinte de l'aéroport moyennant le paiement d'une redevance annuelle d'un montant initial de 17 400 francs HT soit 2 652,61 euros et que par une convention du 12 décembre 2003, elle a été autorisée à occuper un bâtiment destiné au garage et à la maintenance des aéronefs situé dans l'emprise de la concession aéroportuaire moyennant le paiement d'une redevance annuelle de 882,50 euros. Les deux conventions en litige portant ainsi sur l'occupation de dépendances du domaine public aéronautique, la demande de la requérante tendant à la condamnation de l'association à lui verser une provision de 3 524,35 euros au titre du non-paiement des redevances domaniales relève de la compétence du juge administratif.
8. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ".
9. D'une part, il résulte de l'instruction que le traité d'apport conclu entre la CCIR et la société requérante devenu définitif le 14 juin 2011 porte transfert de tous les biens et droits mobiliers et immobiliers composant la branche complète et autonome d'activité aéroportuaire et qu'en vertu de l'annexe VII de ce traité, les conventions d'occupation du domaine public conclues le 11 août 1995 et le 12 décembre 2013 entre la CCIR et l'association, dont le terme initialement fixé au 31 décembre 2013 a été reporté par avenants respectivement au 30 avril 2014 et au 31 mai 2014, sont au nombre de celles de la concession aéroportuaire qui ont été transmises à la société requérante. Par suite, la société Aéroport de La Réunion Roland Garros, a succédé à la CCIR dans ses droits et obligations au titre de ses deux conventions, alors même que celle conclue le 12 décembre 2013 n'a pas fait l'objet, à la différence de la première, de la conclusion d'un avenant ayant pour objet d'acter sa transmission au nouveau gestionnaire de la concession aéroportuaire.
10. D'autre part, il ressort de l'état récapitulatif produit par la société requérante que les redevances domaniales en litige, dues au titre du dernier trimestre 2013 et du premier trimestre 2014, s'élèvent à 3 524,35 euros, ce que, d'ailleurs, ne contestait pas l'association aéroclub Roland Garros dans ses écritures de première instance. Ainsi, en l'état de l'instruction, l'existence de l'obligation pour l'association de verser à la société requérante une somme de 3 524,35 euros n'est pas sérieusement contestable. Par suite, la société Aéroport de La Réunion Roland Garros est fondée à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, le juge des référés a rejeté sa demande tendant au paiement de cette somme à titre de provision. Dès lors, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, il y a également lieu de réformer l'ordonnance en tant qu'elle rejette la demande de provision relative aux dépendances domaniales et de condamner l'association au paiement de la somme de 3 254,35 euros.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'association aéroclub Roland Garros la somme que demande la société Aéroport de La Réunion Roland Garros au titre des frais non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : L'article 1er de l'ordonnance n° 1400619 du 9 février 2015 du tribunal administratif de La Réunion est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion par la SA Aéroport de La Réunion Roland Garros tendant à la condamnation de l'association aéroclub Roland Garros à lui verser une provision au titre de frais d'atterrissage, tout comme la demande de la société tendant à la condamnation de l'association tendant au paiement de la fourniture de carburant Avgas, sont rejetés comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 3 : L'association aéroclub Roland Garros est condamnée à verser à la SA Aéroport de La Réunion Roland Garros, une provision de 3 524,35 euros au titre des redevances domaniales.
Article 4 : L'article 2 de l'ordonnance n° 1400619 du 9 février 2015 du tribunal administratif de La Réunion est réformé en ce qu'il est contraire aux dispositions qui précèdent.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA Aéroport de La Réunion Roland Garros est rejeté.
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N° 15BX01130