Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes a demandé au tribunal administratif de Pau d'une part la condamnation solidaire de la société TLR architecture, de M. F...E..., de M. D...C...et de la Société Egis Bâtiments du Sud-Ouest à lui verser la somme de 48 699,14 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des désordres subis par les réseaux d'eaux pluviales du lycée Albert Camus à Mourenx, d'autre part, la condamnation solidaire la société TLR architecture, de M. F...E..., de M. D...C...et de la Société Egis Bâtiments du Sud-Ouest avec la société Laffitte Frères, la société Rey-Betbéder et la société Qualiconsult, à lui verser la somme de 72 712,71 euros TTC en réparation des désordres constitués par la couverture du réseau d'eaux pluviales, et à payer les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 14 524,80 euros TTC.
Par jugement n° 1200977 du 11 février 2014 le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 avril 2014, et des mémoires enregistrés le 5 novembre 2014 et le 28 octobre 2015, la Région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes, représentée par la Scp Noyer-Cazcarra, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 février 2014 ;
2°) de condamner solidairement la société TLR Architecture, M.E..., M. C...et la société Egis Bâtiment à lui verser la somme de 48 699,14 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des désordres subis par les réseaux d'eaux pluviales du lycée Albert Camus à Mourenx ;
2°) de condamner solidairement la société TLR Architecture, M.E..., M.C..., la société Egis Bâtiment la société Laffitte Frères, la société Rey-Betbéder et la société Qualiconsult à lui verser la somme de 72 712,71 euros TTC en réparation des désordres constitués par la couverture du réseau d'eaux pluviales, et à payer les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 14 524,80 euros TTC.
3°) de mettre solidairement à la charge de la société TLR Architecture, M.E..., M.C..., la société Egis Bâtiment la société Laffitte Frères, la société Rey-Betbéder et la société Qualiconsult la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur,
- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant la région Aquitaine-Limousin
Poitou-Charentes, de MeA..., représentant la société Egis Bâtiments Sud-Ouest et de Me H... représentant la société Rey-Betbeder.
Une note en délibéré pour la société Rey-Betbéder a été enregistrée le 25 ami 2016.
Considérant ce qui suit :
1. Dans le cadre des travaux d'extension du lycée de la cité scolaire Albert Camus à Mourenx, et de la construction d'un atelier des Industries et Procédés Chimiques (IPC), ainsi que d'un internat de 120 lits, la région Aquitaine a passé le 10 mai 2001 un marché par lequel elle a confié la maîtrise d'oeuvre de l'opération à un groupement solidaire d'entreprises composé de la société TLR Architecture, mandataire du groupement, de Messieurs E...et C...et de la société Sechaud Ingenierie Bâtiment et aux droits de laquelle est venue la société Egis Bâtiments Sud-Ouest.
La mission de maîtrise d'oeuvre comprenait les études d'esquisse, d'avant-projet, les études de projet, l'assistance au maître d'ouvrage pour la passation des contrats de travaux, l'examen de la conformité au projet, la direction de l'exécution des contrats de travaux, et l'assistance lors des opérations de réception des travaux et pendant la période de garantie de parfait achèvement.
Le marché correspondant au lot n° 14 intitulé " voirie et réseaux divers " comprenant des travaux relatifs à l'assainissement, l'eau potable le gaz et l'électricité, l'éclairage extérieur le téléphone, la voirie et les espaces verts, a été attribué au groupement momentané solidaire composé des sociétés Laffite Frères et Rey-Betbéder.
Les travaux ont fait l'objet d'une réception le 30 juillet 2003.
En janvier 2004, la région a décidé de procéder à l'extension de l'atelier IPC qui venait d'être construit. La maîtrise d'oeuvre de ces travaux a été confiée au même groupement d'entreprises que celui ayant assuré la maîtrise d'oeuvre de la première phase des travaux. Le lot n° l 1 intitulé "Aménagements extérieurs et VRD", a été attribué le 29 avril 2005 à la société Rey-Betbeder.
Au cours de la phase avant-projet de l'opération d'extension de l'atelier IPC, la société Sechaud Ingenierie Bâtiment, membre du groupement de maîtrise d'oeuvre a relevé diverses anomalies ayant trait aux travaux de réseaux réalisés, lors de la première phase des travaux, dans le cadre du lot n° 14 dont étaient titulaires les sociétés Laffitte et Rey-Betbéder, et consistant en l'existence de réseaux "affleurant", un diamètre des réseaux d'eaux usées et d'eaux pluviales inférieur aux prescriptions du marché, et la remise tardive du dossier des ouvrages exécutés, d'ailleurs inexploitable.
L'expert désigné en référé a conclu le 25 octobre 2010 à une insuffisance de la capacité tampon du réseau d'eaux pluviales de la première et deuxième phase, une insuffisance d'enfouissement du réseau d'eaux pluviales et une insuffisance de sa couverture.
Sur la responsabilité contractuelle de l'équipe de maîtrise d'oeuvre pour manquement à son obligation de conseil au cours des opérations de réception :
2. La responsabilité des maîtres d'oeuvre pour manquement à leur devoir de conseil au cours des opérations de réception peut être engagée, dès lors qu'ils se sont abstenus d'appeler l'attention du maître d'ouvrage sur des désordres affectant l'ouvrage et dont ils avaient connaissance, en sorte que la personne publique soit mise à même de ne pas réceptionner l'ouvrage ou d'assortir la réception de réserves, que les vices en cause aient ou non présenté un caractère apparent lors de la réception des travaux, dès lors que le maître d'oeuvre en avait eu connaissance en cours de chantier. Un manquement au devoir de conseil lors de la réception constitue ainsi une cause de responsabilité contractuelle spécifique au maître d'oeuvre et qui déroge au principe de l'extinction des relations contractuelles du fait de la réception des travaux.
3. En revanche, en l'absence de réserves portant sur les désordres en cause, la responsabilité contractuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre au titre du défaut dans la direction ou le contrôle des travaux ne peut plus être recherchée après l'intervention de la réception. Par suite, les désordres ignorés du maître d'oeuvre mais qui, par leur nature ou leur importance, auraient dû attirer son attention, ne peuvent engager sa responsabilité qu'au titre d'un défaut dans la direction ou le contrôle des travaux, qui ne peut plus être invoquée sur le terrain contractuel après les opérations de réception, mais seulement sur le terrain de la garantie décennale.
4. Il ressort des pièces du dossier que le 24 juillet 2003, la société Séchaud avait fait parvenir aux autres membres du groupement de maîtrise d'oeuvre une note faisant état d'une insuffisance de la capacité tampon du réseau, et de la nécessité de le compléter à concurrence des prévisions du marché, sans que la réception des travaux de la première phase, intervenue le 30 juillet 2003, n'ait comporté de réserve ayant trait à la conformité du réseau d'eaux pluviales et d'eaux usées avec les prescriptions contractuelles.
En se bornant à soutenir que la non-conformité du réseau d'eaux pluviales n'aurait pas dû échapper à la vigilance du groupement de maîtrise d'oeuvre, la région Aquitaine n'établit pas qu'à l'exception de l'insuffisance de la capacité tampon, ce groupement de maîtrise d'oeuvre aurait eu effectivement connaissance, avant les opérations de réception, des autres désordres concernant ce réseau.
Par suite la région Aquitaine est seulement fondée à invoquer la responsabilité solidaire du groupement au titre de l'insuffisance de la capacité tampon du réseau d'eaux pluviales, désordres pour lesquels l'expert a chiffré le montant de la réparation à 14 210 euros.
5. En l'absence d'assujettissement de la région Aquitaine à la TVA, cette somme doit être augmentée du montant de la TVA applicable. Elle portera intérêt à compter du dépôt du rapport d'expertise.
6. En revanche la région ne peut prétendre au remboursement des frais qu'elle aurait engagés à tort dans le cadre du raccordement de la deuxième partie du réseau, lesquels constituent un litige distinct.
Sur les appels en garantie :
7. Le préjudice subi par le maître d'ouvrage privé de la possibilité de refuser la réception des ouvrages ou d'assortir cette réception de réserves, du fait d'un manquement du maître d'oeuvre à son obligation de conseil, et dont ce dernier doit réparer les conséquences financières, n'est pas directement imputable aux manquements aux règles de l'art commis par les entreprises en cours de chantier. Il suit de là que les appels en garantie formulés par les maîtres d'oeuvre à l'encontre des entreprises chargées de la réalisation des travaux doivent être rejetés.
8. Les appels en garantie que les membres du groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre dirigent les uns contre les autres et qui reposent sur des conventions de droit privé qu'il n'appartient pas au juge administratif de connaître sont ainsi irrecevables et ne peuvent par suite qu'être rejetés.
Sur la responsabilité décennale de l'équipe de maîtrise d'oeuvre et des entreprises Lafitte , Rey-Betbéder et Qualiconsult :
9. Si la région Aquitaine invoque l'insuffisance du diamètre des réseaux eaux pluviales et eaux usées, et soutient que la société Lafitte Frères n'a pas compensé l'insuffisant enfouissement du réseau d'évacuation des eaux pluviales par un enrobage en béton prévu, en pareil cas, pour renforcer sa solidité, l'expertise a relevé sur le premier point que cette non-conformité était sans influence sur le fonctionnement de l'ouvrage, et sur le deuxième point que les désordres relevés sont seulement de nature à fragiliser l'ouvrage, sans que puisse être formellement établie la perspective d'une atteinte à la solidité ou la destination de l'ouvrage dans un délai compatible avec la durée de la garantie décennale, le seul désordre constaté par l'expert se limitant à une fissure de l'enrobé.
10. En l'absence de caractère décennal des désordres, la région Aquitaine n'est pas fondée à demander réparation des préjudices causés par l'insuffisance de diamètre des conduites, l'absence de renforcement de la capacité de support du réseau d'évacuation des eaux pluviales, et l'insuffisant enfouissement de ce réseau.
11. En raison du rejet des conclusions indemnitaires présentées à ce titre par la région Aquitaine, les appels en garantie formés par les entreprises défenderesses ne peuvent également qu'être rejetés.
12. Il résulte de ce qui précède que la région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant au versement de la somme de 14 210 euros augmentée de la TVA applicable et assortie des intérêts de droit à compter de la date de dépôt du rapport d'expertise, et de leur capitalisation.
Sur les dépens :
13. Les dépens, comprenant les frais d'expertise et le droit de timbre doivent, en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, être mis à la charge de la Sarl TLR Architecture, M. F... E..., M. G... C..., et de la société Egis Bâtiments Sud-Ouest.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La Sarl TLR Architecture, M. F... E..., M. G... C..., et Egis Bâtiments Sud-Ouest verseront à la région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes, la somme de 14 210 euros, augmentée de la TVA applicable et assortie des intérêts de droit à compter de la date de dépôt du rapport d'expertise, et de leur capitalisation.
Article 2 : Les frais d'expertise et le droit de timbre sont mis à la charge de Sarl TLR Architecture, M. F... E..., M. G... C..., et de la société Egis Bâtiments Sud-Ouest.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le jugement n° 1200977 du tribunal administratif de Pau du 11 février 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
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N° 14BX01124