Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les arrêtés du 15 mai 2015 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination, d'autre part, a décidé son placement en rétention administrative.
Par un jugement n° 1502296 du 19 mai 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 juillet 2015, M. B...A..., représenté par Me Broca, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 mai 2015 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler lesdits arrêtés du préfet de la Haute-Garonne du 15 mai 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 15 mai 2015 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
1. En premier lieu, l'arrêté querellé comporte des éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de M.A.... Il est ainsi suffisamment motivé en fait.
2. En deuxième lieu, la rédaction de cet arrêté, dont il résulte que le préfet ne s'est pas borné à tirer les conséquences de l'arrêt du 7 novembre 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a confirmé la légalité de l'arrêté préfectoral du 3 juin 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français, révèle que ladite autorité s'est livrée à un examen particulier de la situation de l'intéressé.
3. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ".
4. M.A..., de nationalité marocaine, est entré régulièrement en France le 26 mars 2011 sous couvert d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française qu'il avait épousée au Maroc le 22 juillet 2010 et dont il s'est séparé en août 2011. De cette union est née une fille le 8 octobre 2011. Le jugement du 12 février 2013 qui a prononcé le divorce a homologué la convention conclue entre les époux en vertu de laquelle l'enfant réside au domicile de la mère et M. A...bénéficie d'un droit de visite de l'enfant à ce domicile un samedi sur deux et doit verser une contribution de 120 euros par mois. Plusieurs mains courantes déposées en juillet, août et septembre 2013 par la mère de l'enfant font état de ce que M. A...ne s'est pas présenté au domicile de celle-ci pour exercer son droit de visite. Si le requérant fait état des plaintes qu'il a déposées en janvier 2014, avril 2014 et juin 2014 pour non-présentation d'enfant, d'une part, il ne donne aucune indication sur les suites qui ont été données à ces plaintes, d'autre part, il ne démontre aucunement avoir été dans l'impossibilité de voir sa fille après juin 2014. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, qui ne verse plus de contribution, ait eu des liens avec son enfant depuis cette date ni qu'il ait cherché depuis lors à en avoir. M. A...se prévaut par ailleurs de ce qu'il vit depuis mai 2012 avec une ressortissante marocaine, titulaire d'une carte de résident depuis 2004, qu'il a épousée en janvier 2015 et dont il a eu deux filles nées respectivement le 10 avril 2013 et le 30 octobre 2014. Toutefois, le requérant a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans au Maroc où vivent notamment ses parents et son frère. Il a fait l'objet le 3 juin 2013 d'un refus de séjour assorti d'une mesure d'éloignement et la légalité de cet arrêté a été confirmée par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 novembre 2014. S'il fait valoir que son épouse réside depuis l'âge de cinq ans en France où se trouve sa famille la plus proche, il ne ressort pas des pièces du dossier que les attaches dont dispose en France son épouse, qui n'a pas d'activité professionnelle, soient telles que la cellule familiale qu'elle constitue avec M. A...et leurs enfants en bas âge ne puisse se reconstituer au Maroc, pays dont ils ont tous la nationalité et dans lequel M. A...lui-même dispose, comme il a été dit, de fortes attaches. Dans ces conditions, la mesure d'éloignement en litige ne peut être regardée comme ayant porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise.
5. En quatrième lieu, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 stipule : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
6. D'une part, M. A...et son épouse ont la même nationalité et le requérant ne fait état d'aucun élément probant qui ferait obstacle à ce qu'ils reconstituent ensemble leur cellule familiale au Maroc avec leurs filles en bas âge. D'autre part, si M. A...est père d'un enfant français, issu d'une précédente union, aucun élément n'est versé au dossier permettant de penser qu'il entretenait des liens avec cet enfant à la date de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision d'éloignement en cause aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
7. En cinquième lieu, compte tenu de ce qui vient d'être dit, en se bornant à faire état de l'ancienneté de sa présence sur le territoire français et de sa situation familiale, le requérant n'établit pas que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'admission exceptionnelle au séjour pour des circonstances humanitaires ou des motifs exceptionnels.
8. Enfin, la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, qui ne comporte que des orientations générales, n'est pas utilement invocable à l'appui d'un recours dirigé contre une décision portant obligation de quitter le territoire français.
En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :
9. En premier lieu, la décision, qui indique que M. A...s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement et n'a pas déclaré sa nouvelle adresse, ce qui révèle un risque de fuite justifiant le refus de délai de départ volontaire, est suffisamment motivée en fait.
10. En deuxième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) ".
11. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a précédemment fait l'objet d'une mesure d'éloignement, dont la légalité a été confirmée par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 novembre 2014, et qu'il s'est soustrait à son exécution. De plus, lors de son interpellation du 15 mai 2015, il a seulement présenté un titre de séjour expiré et un permis de conduire, qui ne constituent pas des documents d'identité ou de voyage en cours de validité. Dans ces conditions, sa situation entrait dans le champ d'application des dispositions précitées des d) et f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui permettent à l'autorité administrative de priver l'étranger d'un délai de départ volontaire.
12. Enfin, M. A...ne démontre pas que le refus de lui accorder un délai de départ volontaire reposerait sur une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
13. La décision fixant le pays de renvoi de M. A...comporte les considérations de droit et de fait qui la fondent et est dès lors suffisamment motivée.
14. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A...n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 15 mai 2015 portant placement en rétention administrative :
15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la mesure d'éloignement sans délai de départ volontaire prise à son encontre à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté décidant son placement en rétention administrative.
16. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (. . .) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (. . .) ". Aux termes de l'article L. 561-2 du même code: "Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au Il de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. (. . .) ".
17. Ainsi qu'il a été dit plus haut, il ressort des pièces du dossier que M. A...s'est maintenu irrégulièrement en France après l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 7 novembre 2014 confirmant la légalité des décisions de refus de séjour et d'éloignement prises à son encontre, et n'établit pas qu'il aurait alors cherché à régulariser sa situation administrative. En outre, lors de son interpellation du 15 mai 2015, il ne disposait pas d'un passeport en cours de validité. Dans ces conditions, en estimant qu'il ne présentait pas des garanties suffisantes propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement prise à son encontre et qu'il ne pouvait ainsi bénéficier d'une mesure d'assignation à résidence, le préfet n'a pas entaché sa décision d'un erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes. Ses conclusions à fin d'injonction et présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, être accueillies.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
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N° 15BX02383