Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...a demandé le 12 décembre 2015 au tribunal administratif de Bordeaux d'une part, d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2015 par lequel la préfète de la Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'annuler l'arrêté du même jour par lequel la préfète de la Vienne a ordonné son placement en rétention administrative et, enfin, d'enjoindre à l'administration de lui communiquer son entier dossier, et notamment la procédure ayant donné lieu à son interpellation.
Par un jugement n° 1505454 du 15 décembre 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 mars 2016, M. B...C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux du 15 décembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2015 de la préfète de la Vienne portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 300 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 20 juillet 1991 au profit de Me D....
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de MmeE..., a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...C..., ressortissant kosovar né en 1992, déclare être entré en France le 22 août 2010 en compagnie de toute sa famille. Le 10 septembre 2010, il a sollicité l'asile auprès des services de la préfecture de la Loire-Atlantique. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 mai 2011, confirmée le 21 décembre 2011 par la Cour nationale du droit d'asile. Sa demande de réexamen présentée le 4 juillet 2012 a été de nouveau rejetée par décisions du 18 juillet 2012 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et du 23 mai 2013 de la Cour nationale du droit d'asile. Le 2 mai 2012, M. C...a fait l'objet d'un arrêté du préfet de Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif de Nantes par un jugement du 11 septembre 2012 et, en dernier lieu, par un arrêt du 28 mai 2013 de la cour administrative d'appel de Nantes. Le 18 avril 2014, M. C...a sollicité la reconnaissance du statut d'apatride qui lui a été refusée par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 28 avril 2015. L'intéressé a exercé un recours à l'encontre de cette décision devant le tribunal administratif de Nantes. M. C...a été interpellé par les services de police de Poitiers le 10 décembre 2015 et a fait l'objet, le même jour, d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et fixation du pays de renvoi, ainsi que d'un arrêté ordonnant son placement en rétention administrative pris par la préfète de la Vienne. M. C...relève appel du jugement du 15 décembre 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
3. M. C...est entré en France de manière irrégulière en 2010 à l'âge de dix-huit ans en compagnie de son épouse et de leur premier enfant. Il fait valoir que deux autres enfants sont nés depuis leur arrivée sur le territoire national, qu'il a multiplié les démarches d'intégration et s'est beaucoup engagé dans le milieu associatif dans lequel il serait d'ailleurs susceptible d'être embauché en cas de régularisation de sa situation. Cependant, M. C...qui s'est maintenu en France le temps de l'examen de ses deux demandes d'asile et n'a pas déféré à l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 2 mai 2012, ne démontre pas l'insertion dont il se prévaut. Si l'intéressé soutient que ses parents, ses trois soeurs et son frère résident également en France et que son père a bénéficié d'un titre de séjour en raison de son état de santé, il ne produit en tout état de cause aucune pièce pour étayer l'ensemble de ces allégations, pas plus qu'il ne justifie entretenir des relations stables et intenses avec eux. En outre, rien ne s'oppose à ce que le requérant reconstruise avec son épouse, qui se trouve également en situation irrégulière et a fait l'objet d'une mesure d'éloignement, et leurs enfants, dont il n'est même pas allégué qu'ils seraient scolarisés, la cellule familiale dans le pays où ils sont légalement admissibles. Si se déclarant apatride, M. C...soutient qu'il ne peut pas envisager une vie privée et familiale normale hors de France, la circonstance que les autorités serbes et monténégrines aient indiqué qu'il n'était pas ressortissant de leur pays et que les autorités kosovares n'aient pas répondu dans les temps à la demande de réadmission adressée par les services de la préfecture, ne signifie pas qu'il ne pourrait pas être légalement admis dans un autre pays, alors d'ailleurs que le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au statut d'apatride. Compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. C...en France, l'obligation de quitter le territoire français en litige n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la légalité de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
4. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;(...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) ".
5. La décision contestée énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent. La préfète relève notamment, après avoir visé le a), le d) et le f) de l'article L. 511-1-II 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que M. C...est entré irrégulièrement en France, qu'il s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement, qu'il a déclaré lors de son audition par la police ne pas avoir de domicile fixe et personnel mais être domicilié.... Elle mentionne ensuite un certain nombre d'éléments ayant trait à la vie privée et familiale de l'intéressé. Dans ces conditions, la décision est suffisamment motivée en droit comme en fait, quand bien même elle ne précise pas que la décision de rejet de la demande d'admission au statut d'apatride présentée par M. C..., dont l'arrêté fait expressément état, a fait l'objet d'un recours toujours pendant devant le tribunal administratif de Nantes.
6. Il ressort des pièces du dossier que M.C..., qui n'a pas été en mesure de justifier d'une entrée régulière sur le territoire français, ne s'est pas soumis à la précédente mesure d'éloignement prononcée à son encontre par une décision du préfet de la Loire-Atlantique du 2 mai 2012, dont la légalité a été confirmée en dernier lieu par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 28 mai 2013. En outre, il n'est pas contesté qu'il ne justifiait pas, au moment de la décision attaquée, d'un document d'identité ou de voyage original et en cours de validité. Par suite, la préfète de la Vienne, a pu, sans commettre d'erreur de droit, décider de ne pas lui octroyer de délai de départ volontaire. Elle n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé, et la circonstance que l'appelant reste dans l'attente de l'examen du recours qu'il a formé devant le tribunal administratif de Nantes à l'encontre de la décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides refusant de lui accorder le statut d'apatride, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
7. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible (...) ".
8. La décision désignant le pays de destination en litige indique que M. A...se disant StefanC..., ressortissant de nationalité kosovare, alias B...C...de nationalité monténégrine, pourra être éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel il établirait être légalement admissible. Si l'appelant conteste être de nationalité kosovare, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en rejetant, le 28 avril 2015, sa demande d'admission au statut d'apatride, après avoir relevé que l'intéressé avait produit à l'appui de sa demande un extrait de registre des naissances daté du 24 juillet 1998 faisant état de la naissance de Stefan C...à Pec en République du Kosovo, a conclu qu'à supposer établi le parcours allégué, il entrait dans le champ d'application de la loi sur la nationalité au Kosovo, étant né à Pec en 1992 et y ayant résidé jusqu'en 1999. Les éléments produits par l'appelant ne permettent d'établir ni que la nationalité kosovare lui serait refusée, ni qu'il serait d'une autre nationalité que celle qui a été retenue par l'autorité administrative, alors surtout que l'intéressé n'a jamais contesté lors de ses précédents recours exercés à l'encontre de l'arrêté du 2 mai 2012 du préfet de la Loire-Atlantique devant le tribunal administratif et la cour administrative d'appel de Nantes, la nationalité kosovare dont il s'était par ailleurs lui-même prévalu dans le cadre de ses demandes d'asile. Par suite, la décision contestée fixant le pays de destination n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions prises à son encontre par la préfète de la Vienne le 10 décembre 2015.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. C..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint à la préfète de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M.C..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans 1es dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
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No 16BX01021