Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Nicollin Antilles a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe la condamnation du Syndicat de valorisation des déchets de la Guadeloupe (SYVADE) à lui verser une provision de 83 165,25 euros sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, outre la somme de 7 240,81 euros au titre des intérêts moratoires, ainsi qu'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par ordonnance n° 1600295 du 6 juin 2016, le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe a condamné le SYVADE à verser à la société Nicollin Antilles une indemnité provisionnelle d'un montant de 83 165,25 euros majorée des intérêts moratoires jusqu'à la date de paiement du principal.
Procédure devant la cour :
Par requête et un mémoire enregistrés respectivement les 24 juin et 8 août 2016, le SYVADE, représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1600295 du 6 juin 2016 du juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe ;
2°) de rejeter la demande de la société Nicollin Antilles ;
3°) mettre à la charge de la société Nicollin Antilles la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- en premier lieu, la société Nicollin Antilles ne peut prétendre que seuls son devis et le bon de commande du SYVADE engageraient les deux parties ;
- en deuxième lieu, la société Nicollin Antilles affirme, de manière purement péremptoire, que le SYVADE aurait continué à utiliser la plateforme après le mois de janvier 2014, ce qu'elle se garde bien de le démontrer ;
- en troisième lieu, la société Nicollin Antilles ne craint pas d'affirmer qu'elle aurait maintenu la plateforme de déchargement des déchets pour respecter le principe de continuité du service public et ne pas pénaliser le SYVADE mais il n'appartient pas à un prestataire de l'administration de décider les conditions permettant d'assurer la continuité du service public ;
- en quatrième lieu, la société Nicollin Antilles affirme également à tort que le SYVADE ne contesterait pas que le service n'aurait pas été fait.
Par mémoire enregistré le 25 juillet 2016, la société Nicollin Antilles, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et de mettre à la charge du SYVADE la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- depuis la mise en place de la plateforme, le SYCTOM de la Guadeloupe, et le SYVADE ensuite, n'ont jamais contesté les factures émises mensuellement et les ont réglées jusqu'à celle de janvier 2014 incluse. De plus, les documents initiaux du marché, que ce soit le devis ou bien le bon de commande initial pour la mise à disposition de cette plateforme, ne prévoient pas l'élaboration de bons ou de lettres de commande dans la mesure où c'est une location mensuelle qui est prévue dans les documents datés du 11 avril 2011. D'autant que durant toute cette période, y compris durant la période litigieuse entre février 2014 et octobre 2015, le SYVADE n'a pas cessé d'utiliser la plateforme et c'est dans un souci de continuité du service public, que la société Nicollin Antilles n'a pas cessé d'exécuter les prestations et a laissé à la disposition du SYVADE la plateforme de déchargement des déchets, et ce jusqu'au transfert du contrat au profit de la CDA Sud Basse Terre, et ce malgré l'absence de lettres de commande.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Le président de la cour a désigné M. Péano, président de chambre, comme juge des référés et de tout recours présenté sur le fondement des dispositions du livre V du code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge du référé de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. En revanche, il ne saurait trancher une question de droit présentant une difficulté sérieuse et se prononcer sur la difficulté ainsi soulevée pour accorder la provision demandée.
2. Le SYCTOM de la Guadeloupe, syndicat intercommunal ayant la compétence du traitement des déchets sur une partie du territoire de la Guadeloupe, dont Terre-de-Haut et notamment l'Île des Saintes, a été renommé en Syndicat de valorisation des déchets de la Guadeloupe SYVADE. Par l'émission d'un bon de commande signé en date du 14 avril 2011, le SYCTOM de la Guadeloupe a passé une commande auprès de la société Nicollin Antilles ayant pour objet la location d'une plateforme de déchargement de déchets située sur le territoire de Terre-de-Haut sur Plie des Saintes et qui a vocation à accueillir l'ensemble des déchets ménagers et assimilés du territoire de l'Ile des Saintes pour les acheminer vers la " Guadeloupe Continentale ". Par arrêté préfectoral du 2 mai 2013, la compétence de traitement des déchets ménagers liés aux Iles de Terre de Haut, dont fait partie les îles Saintes, est transférée à la communauté d'agglomération du Sud Basse-Terre, avec prise d'effet au 1er janvier 2014. Exposant que durant la période entre février 2014 et octobre 2015, le SYVADE n'a pas cessé d'utiliser la plateforme sans pour autant honorer les factures correspondantes qu'elle lui a adressées, la société Nicollin Antilles a obtenu du juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe la condamnation de l'établissement public à lui verser une indemnité provisionnelle d'un montant de 83 165,25 euros majorée des intérêts moratoires jusqu'à la date de paiement du principal.
3. En l'espèce, le marché conclu par la société Nicollin Antilles se présente sous la forme d'un marché à bons de commande qui s'exécute par émission de bons de commande successifs selon les besoins. Chaque bon de commande précise celles des prestations décrites dans le marché dont l'exécution est demandée. Il en détermine la quantité. Par ailleurs, le titulaire d'un marché à bons de commande comportant un minimum a droit à être indemnisé du préjudice éventuellement subi lorsque le montant minimal de prestations spécifié n'a pas été exécuté.
4. Dans le cas où comme en l'espèce, le marché ne fixe pas de minimum, il ne confère à son titulaire aucune garantie quant à son exécution et ne crée aucune obligation de passer des bons de commandes pour la collectivité signataire. Ni la circonstance que depuis la mise en place de la plateforme, le SYCTOM de la Guadeloupe, et le SYVADE ensuite, n'ont pas contesté les factures émises mensuellement pour la location de la plateforme et les ont réglées jusqu'à celle de janvier 2014 incluse ni le fait que les documents initiaux du marché, que ce soit le devis ou bien le bon de commande initial pour la mise à disposition de cette plateforme, ne prévoient l'élaboration de bons ou de lettres de commande dans la mesure où c'est une location mensuelle qui est prévue dans les documents datés du 11 avril 2011, n'imposaient au SYVADE de poursuivre l'exécution du marché et d'émettre de nouveaux bons de commande alors notamment qu'il n'est pas fait état d'une durée d'exécution ou d'une possibilité de reconduction tacite prévues par le marché. Eu égard aux caractéristiques du marché, le SYVADE, qui n'est obligé qu'au paiement du minimum éventuellement prévu, n'était pas tenu de payer à la société Nicollin Antilles les factures qu'elle lui a adressées en l'absence de bons de commande ou d'ordre de service précisant celles des prestations décrites dans le marché dont l'exécution est demandée, alors même que le devis initial faisait état d'une location mensuelle. De plus, la société, qui ne peut pas utilement ici invoquer le principe de continuité du service public, ne fait pas davantage état de stipulations contractuelles qui auraient imposé au SYVADE d'émettre systématiquement des bons de commande ou des ordres de service, notamment lorsqu'il n'avait pas jugé opportun de recourir à ces services. Dès lors, la société Nicollin Antilles n'est pas fondée à soutenir que le SYVADE aurait méconnu ses obligations contractuelles en ne lui adressant ni bons de commande ni ordres de service durant la période entre février 2014 et octobre 2015,
5. Enfin, en produisant les factures émanant de ses service, la société Nicollin Antilles n'apporte, au soutien de son affirmation selon laquelle le SYVADE n'aurait pas cessé d'utiliser la plateforme, aucun document de nature à l'établir, voire même à établir qu'elle aurait exécuté des prestations lui ouvrant droit à indemnisation.
6. Dans ces conditions, contrairement à ce qu'a admis le premier juge, alors que le SYVADE n'avait produit aucun mémoire en défense devant lui, la créance dont se prévaut la société Nicollin Antilles ne saurait être regardée, en l'état de l'instruction, comme présentant le caractère non sérieusement contestable requis par les dispositions précitées de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.
7. Il résulte de ce qui précède que le SYVADE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe l'a condamné à verser une provision à la société Nicollin Antilles. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions d'aucune des parties tendant au remboursement des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
ORDONNE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1600295 du 6 juin 2016 du juge des référés du tribunal administratif de la Guadeloupe est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la société Nicollin Antilles devant le tribunal administratif de la Guadeloupe est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du SYVADE et les conclusions de la société Nicollin Antilles présentés au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au Syndicat de valorisation des déchets de la Guadeloupe et à la société Nicollin Antilles.
Fait à Bordeaux, le 20 décembre 2016.
Le juge des référés,
Didier Péano La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
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No 16BX02066