Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Sogera a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler l'arrêté du 20 avril 2012 par lequel le conseil exécutif de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy a refusé de lui accorder un permis de construire une résidence secondaire sur la parcelle cadastrée section AZ n° 0207.
Par un jugement n° 1200055 du 26 février 2015, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 24 avril 2015, le 15 décembre 2015 et le 5 octobre 2016, la société Sogera, représentée par la SCP A...-Jouteux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Barthélemy du 26 février 2015 ;
2°) d'annuler le refus de permis de construire du 20 avril 2012 ;
3°) d'enjoindre à la collectivité de Saint-Barthélemy de délivrer le permis de construire sollicité ;
4°) de mettre à la charge de l'autorité administrative la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la société Sogera.
Considérant ce qui suit :
1. Le 12 décembre 2011, la société Sogera a déposé une demande de permis de construire une maison à usage de résidence secondaire sur la parcelle cadastrée section AZ n° 207 située à Saint-Barthélemy. Par décision du 20 avril 2012, le président du conseil exécutif de la collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy a rejeté cette demande. La société Sogera relève appel du jugement rendu le 26 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 20 avril 2012.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si l'administration peut faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision, il n'appartient pas au juge, en l'absence d'une demande en ce sens de l'administration, de procéder d'office à une substitution de motifs, qui n'est pas d'ordre public.
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le tribunal administratif n'a pas communiqué à la société Sogera le mémoire en défense de la collectivité de Saint-Barthélemy au motif qu'il a été présenté postérieurement à la clôture de l'instruction. Il en résulte que la demande de substitution de motifs contenue dans ce mémoire ne pouvait être prise en compte, faute d'avoir été soumise aux débats et que le tribunal ne pouvait s'estimer saisi d'une telle demande pour juger que le refus de permis de construire du 20 avril 2012 était légalement fondé sur les dispositions de l'article 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, lesquelles ne constituaient pas le motif initialement retenu par l'auteur de cette décision. Par suite, les premiers juges, qui ont ainsi procédé d'office à une substitution de motifs, ont entaché sur ce point leur jugement d'irrégularité. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen d'annulation, le jugement doit être annulé et il y a lieu, pour la cour, de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande de la société Sogera.
Sur la légalité du refus de permis de construire du 26 mars 2012 :
En ce qui concerne la légalité externe :
4. En vertu de l'article 80 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, la décision rejetant une demande de permis de construire doit être motivée. Pour rejeter la demande dont il était saisi, le président du conseil exécutif a visé les dispositions d'urbanisme applicables, en particulier le code de l'urbanisme de la collectivité de Saint-Barthélemy ainsi que la carte et le règlement d'urbanisme approuvés le 24 février 2012. Il a ensuite relevé que le terrain d'assiette du projet se situait dans une zone naturelle, laquelle n'a pas vocation à recevoir des constructions, bâtiments ou occupations du sol en application de l'article D.1.1 du règlement de la carte d'urbanisme. Enfin, la décision précise que le projet de construction d'une résidence secondaire déposé par la société Sogera n'entre dans aucune des exceptions, prévues à l'article D. 1.2, à la règle d'inconstructibilité posée par l'article D.1.1. Ce faisant, l'autorité compétente a suffisamment motivé sa décision en droit comme en fait.
En ce qui concerne la légalité interne :
5. L'administration peut faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
6. Le refus de permis de construire du 20 avril 2012 était initialement fondé sur les dispositions de la carte d'urbanisme de la collectivité de Saint-Barthélemy qui classait le terrain d'assiette du projet en zone naturelle inconstructible. Toutefois, la délibération du 24 février 2012, par laquelle le conseil territorial de cette collectivité a approuvé ce document d'urbanisme, a été annulée par jugement, devenu définitif, du tribunal administratif de Saint-Barthélemy du 23 octobre 2013. Dans ses écritures devant la cour, la collectivité invoque un nouveau motif fondé sur la méconnaissance par le projet des dispositions du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy remises en vigueur à la suite de l'annulation de la carte d'urbanisme. Ce faisant, la collectivité de Saint-Barthélemy doit être regardée comme demandant que ce nouveau motif soit substitué à celui initialement retenu dans la décision contestée.
7. Aux termes de l'article LO6214-3 du code général des collectivités territoriales, applicable à la collectivité d'outre-mer Saint-Barthélemy : " I - La collectivité fixe les règles applicables dans les matières suivantes : (...) 2° Urbanisme ; construction ; habitation ; logement (...) ". Aux termes de l'article 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy : " En l'absence de carte d'urbanisme opposable aux tiers, les règles de constructibilité sont les suivantes : 1°) En dehors des espaces urbanisés de la collectivité, seuls peuvent être autorisés l'adaptation, le changement de destination, la réfection ou l'extension extrêmement mesurée des constructions existantes ainsi que les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation agricole, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt général ; 2°) Sur l'ensemble du territoire de la collectivité, les règles nationales d'urbanisme prévues aux articles R. 111-2 à R. 111-24 du code national d'urbanisme sont applicables ". Aux termes de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme : " En dehors des parties urbanisées des communes, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation ou sa destination : a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle n° 207, couverte d'arbustes et située sur la pente d'un morne, est contiguë à trois autres parcelles vierges de constructions, elles aussi intégralement recouvertes de végétations et insérées dans un secteur au relief escarpé présentant, dans son ensemble, un caractère naturel. A cet égard, en raison de son importante superficie, qui s'étend sur 4 025 mètres carrés, la parcelle de la société Sogera contribue à accentuer le caractère naturel du secteur considéré. S'il existe, par ailleurs, plus d'une dizaine de constructions aux alentours de la parcelle n° 207, ces dernières présentent un caractère relativement disséminé que renforce le relief accidenté existant. Ainsi, compte tenu de ces considérations, la parcelle n° 207 qui doit accueillir le projet de construction de la société Sogera doit être regardée comme située en dehors des parties urbanisées de la collectivité de Saint-Barthélemy alors même qu'elle est viabilisée et contiguë à trois parcelles construites.
9. Dès lors, le projet de la société Sogera qui prévoit la construction d'une maison à usage d'habitation n'entre dans aucune des exceptions à la règle de la constructibilité limitée énoncées à l'article 2 précité du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy. Par suite, le motif tiré de ce que le terrain d'assiette du projet se situe en dehors des parties urbanisées de la collectivité fonde légalement le refus de permis du 20 avril 2012.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sogera n'est pas fondée à demander l'annulation du refus de permis de construire du 20 avril 2012. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. En revanche, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions en mettant à la charge de la société Sogera la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par la défenderesse et non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : Le jugement n° 1200055 du 26 février 2015 du tribunal administratif de Saint-Barthélemy est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société Sogera devant le tribunal administratif est rejetée.
Article 3 : La société Sogera versera à la collectivité de Saint-Barthélemy la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 15BX01423