Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le directeur général des finances publiques de la Guyane a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler le titre exécutoire émis le 29 octobre 2014 par l'association syndicale d'aménagement hydraulique et foncier de Mana (ASAH) à l'encontre de France domaines pour le recouvrement de la redevance syndicale de 2014 d'un montant de 19 535,04 euros.
Par un jugement n° 1401295 du 19 février 2015, le tribunal administratif de Guyane a annulé ce titre exécutoire.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 avril 2015, l'association syndicale d'aménagement hydraulique et foncier de Mana (ASAH), représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal Administratif de Guyane en date du 19 février 2015 ;
2°) de rejeter la demande du directeur général des finances publiques de la Guyane ;
3°) d'enjoindre au directeur général des finances publiques de la Guyane de régler la somme due en vertu de ce titre exécutoire dans un délai de trente jours à compter de la date de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge du directeur général des finances publiques de la Guyane la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- France Domaines est propriétaire des parcelles 23, 24 et 25 du polder rizicole géré par ses soins. France Domaines est donc membre de l'association, à tout le moins depuis 2009, et doit à ce titre acquitter la cotisation. L'adhésion de France Domaines à l'ASAH résulte d'un arrêté préfectoral du 2 décembre 1985 confirmé par l'arrêté préfectoral du 9 juin 2009 conformément à l'article 9 de la loi de 1865 et à l'article 1er du décret d'application du 3 mai 2006 de l'ordonnance du 1er juillet 2004. Au surplus, Frances Domaines est adhérent de l'association en vertu d'une décision implicite du ministre en application de l'article 11 de la loi de 1865. Il n'est d'ailleurs ni allégué ni démontré que l'Etat n'aurait pas été régulièrement consulté lors de la constitution de l'association ;
- l'Etat ne peut plus remettre en cause son adhésion à l'ASAH, le délai de quatre mois prévu à l'article 17 de la loi de 1865 étant expiré. Le principe de loyauté contractuelle fait obstacle à ce que l'Etat puisse utilement se prévaloir des irrégularités ayant entaché son adhésion. Enfin, l'Etat s'est comporté comme un adhérent de l'association en participant aux assemblées générales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- selon l'application Sagace, le jugement attaqué a été notifié le 19 février 2015 de sorte que l'appel, enregistré le 23 avril 2015, est tardif ;
- l'arrêté préfectoral de mise en conformité des statuts de l'ASAH n'emporte pas adhésion de l'Etat à l'association. Il n'a jamais donné son consentement à l'adhésion de l'Etat à cette association. Les documents ne peuvent d'ailleurs pas être regardés comme un commencement de preuve d'une telle adhésion. L'arrêté préfectoral du 9 juin 2009 a pour seul objet la mise en conformité des statuts de l'association avec la nouvelle règlementation comme le prévoit l'article 60 de l'ordonnance du 1er juillet 2004. La procédure d'adhésion relève d'autres dispositions de l'ordonnance du 1er juillet 2004 et de son décret d'application du 3 mai 2006 ;
- le seul fait que l'Etat soit propriétaire de la parcelle F779 ne signifie pas qu'il est membre de l'association ;
- les dispositions de l'ordonnance du 1er juillet 2004 relatives à l'adhésion tacite ne sont pas applicables à l'Etat ;
- l'Etat ne contribue pas aux missions de l'ASAH qui est chargé de la gestion d'un polder rizicole. Il résulte des articles 1er et 3 des statuts de l'ASAH que les adhérents ont pour objectif d'entreprendre des travaux d'amélioration foncière des parcelles dont ils sont propriétaires. France Domaine n'a jamais matérialisé sa volonté d'effectuer de tels travaux sur ses parcelles ;
- à titre subsidiaire, à supposer que l'Etat soit adhérent de l'association, il n'est, en tout état de cause, pas inclus dans le champ des contributeurs de la redevance syndicale. Une telle redevance n'est due que par les propriétaires exploitants et les titulaires de baux emphytéotiques. En l'espèce, il résulte de la délibération du conseil syndical du 12 décembre 1989, que la redevance est calculée en fonction des surfaces attribuées et des surfaces ensemencées. Or aucune surface n'est attribuée à l'Etat et l'Etat n'ensemence pas ces terrains. D'ailleurs, les délibérations du conseil syndical font bien la distinction entre les propriétaires de parcelles, les propriétaires exploitants et les titulaires de baux emphytéotiques.
Par ordonnance du 25 octobre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 janvier 2017 à midi.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi du 21 juin 1865 relative aux associations syndicales ;
- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ;
- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-André Braud,
- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. L'association syndicale d'aménagement hydraulique et foncier de Mana (ASAH) est chargée de la gestion du polder rizicole de Savane Sarcelle. France Domaine étant propriétaire des parcelles 23, 24 et 25 de ce polder, l'ASAH a, le 29 octobre 2014, émis un titre exécutoire à l'encontre de France Domaine pour le recouvrement de la redevance syndicale de 2014 d'un montant de 19 535,04 euros. L'Etat ne s'estimant pas débiteur de cette redevance, le directeur général des finances publiques de la Guyane a sollicité l'annulation de ce titre exécutoire devant le tribunal administratif de la Guyane. L'ASAH relève appel du jugement du tribunal administratif de la Guyane en date du 19 février 2015 annulant ce titre exécutoire au motif que l'Etat n'a pas la qualité de membre adhérent de l'ASAH.
2. Aux termes de l'article 31 de l'ordonnance n° 2004-632 susvisée : " I. - Les ressources d'une association syndicale autorisée comprennent : 1° Les redevances dues par ses membres (...) ". Aux termes de l'article 58 de cette ordonnance : " La loi du 21 juin 1865 relative aux associations syndicales et la loi du 5 août 1911 relative aux associations syndicales autorisées sont abrogées sauf en ce qui concerne la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. "
3. Aux termes de l'article 4 de la loi du 21 juin 1865 susvisée : " (...) Pourront adhérer à une association syndicale, (...) pour les biens de l'Etat, le ministre des finances. ". Aux termes de l'article 9 de cette loi : " Les propriétaires intéressés aux travaux spécifiés à l'article 1er pourront être réunis par un arrêté préfectoral en associations syndicales autorisées, soit sur la demande d'un ou plusieurs d'entre eux, soit sur l'initiative du maire, du préfet ou du sous-préfet (...) ". L'article 11 de cette même loi dispose : " (...) Les propriétaires intéressés qui, dûment convoqués et avertis des conséquences de leur abstention, ne formuleraient pas leur opposition par écrit avant la réunion de l'assemblée générale ou par un vote à cette assemblée, seront considérés comme ayant adhéré à l'association (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 2006-504 susvisé : " Lorsqu'un immeuble dépendant de son domaine est inclus dans le périmètre d'une association syndicale, la collectivité territoriale, l'établissement public de coopération intercommunale ou le syndicat mixte peut adhérer à celle-ci s'il y est autorisé par délibération de son organe délibérant. Lorsqu'il en est de même pour un immeuble dépendant du domaine de l'Etat, celui-ci peut adhérer par décision du préfet."
4. Il ressort des pièces du dossier que l'ASAH a été constituée par un arrêté du préfet de la Guyane du 2 décembre 1985. L'ASAH soutient que l'Etat est redevable de cette redevance en tant que membre de l'association. Pour établir cette qualité de membre de l'association, l'ASAH se prévaut, d'une part, d'une décision implicite d'adhésion du ministre des finances en application des articles 4 et 11 de la loi du 21 juin 1865 alors applicable et, d'autre part, d'une décision du préfet de la Guyane en application de l'article 9 de cette même loi.
5. D'une part, il résulte des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 21 juin 1865 applicable lors de la constitution de l'ASAH que l'adhésion, pour les biens de l'Etat, ne peut résulter que d'une décision explicite du ministre des finances. Au demeurant, pour démontrer l'existence d'une décision implicite du ministre des finances, l'ASAH soutient que l'Etat s'est comporté comme un membre de l'association notamment en étant consulté lors de la constitution de l'association et en assistant aux assemblées générales. Cependant la circonstance que les services de l'Etat soient consultés lors de l'édiction d'un arrêté préfectoral ne saurait révéler par elle-même une quelconque volonté d'adhésion à l'association constituée par l'arrêté édicté. De même, la participation à des assemblées générales ne permet pas à elle seule d'établir la qualité d'adhérent du participant. Dès lors, et en l'absence de convocation adressée au représentant de l'Etat satisfaisant aux conditions énoncées à l'article 11 de la loi du 21 juin 1865, l'existence d'une décision implicite du ministre des finances n'est, en tout état de cause, pas établie.
6. D'autre part, il résulte des dispositions précitées de la loi du 21 juin 1865 et du décret du 3 mai 2006 pris en application de l'ordonnance du 1er juillet 2004 abrogeant la loi du 21 juin 1865 et publié au Journal officiel de la République française le 5 mai 2006, que l'adhésion de l'Etat à une association syndicale résulte jusqu'au 5 mai 2006 d'une décision du ministre des finances puis à compter du 6 mai 2006, d'une décision du préfet. Dès lors, pour établir l'existence d'une décision d'adhésion du préfet, l'ASAH ne peut en tout état de cause utilement se prévaloir de l'arrêté du préfet de la Guyane du 2 décembre 1985 autorisant sa constitution dès lors qu'il est antérieur à l'entrée en vigueur du décret. En effet, contrairement à ce que soutient l'association requérante, les dispositions précitées de l'article 9 de la loi du 21 juin 1865 ne permettent pas à l'Etat d'adhérer à l'association par un arrêté préfectoral mais se bornent à indiquer que l'association est constituée par arrêté préfectoral. L'ASAH se prévaut également de l'arrêté du préfet de la Guyane du 9 juin 2009 portant mise en conformité d'office de l'association. En vertu de l'article 1er de cet arrêté " Sont réunis en association syndicale autorisée les propriétaires des terrains compris dans le plan périmétral des parcelles syndiquées et dont les noms figurent sur l'état parcellaire annexé ". Or, en l'absence de production de l'état parcellaire annexé à cet arrêté, ce dernier ne peut en l'état et eu égard à son objet être regardé comme une décision d'adhésion de l'Etat à cette association syndicale autorisée. Par suite, l'ASAH n'établit pas davantage que l'Etat serait l'un de ses membres en vertu d'une décision préfectorale.
7. Aux termes de l'article 17 de la loi du 21 janvier 1865 : " Nul propriétaire compris dans l'association ne pourra, après le délai de quatre mois à partir de la notification du premier rôle des taxes, contester sa qualité d'associé ou la validité de l'association. ". Si l'association requérante se prévaut de ces dispositions, elle ne précise ni ne produit le " premier rôle des taxes " qui aurait été notifié à l'Etat et n'assortit ainsi pas son moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. A supposer qu'il s'agisse du titre exécutoire en litige, ces dispositions ne peuvent être utilement invoquées puisqu'elles n'étaient plus en vigueur, ainsi que cela est rappelé au point 2, à la date d'émission de ce titre.
8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que l'ASAH n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a annulé le titre exécutoire émis le 29 octobre 2014 à l'encontre de France Domaine pour le recouvrement de la redevance syndicale de 2014. Par voie de conséquence, les conclusions de l'ASAH à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association syndicale d'aménagement hydraulique et foncier de Mana est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association syndicale d'aménagement hydraulique et foncier de Mana, au ministre de l'Economie et des Finances. Copie en sera adressée pour information au préfet de la Guyane.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2017 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Claude Pauziès, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller.
Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 juin 2017.
Le rapporteur,
Paul-André BRAUDLe président,
Jean-Claude PAUZIÈS
Le greffier,
Delphine CÉRON
La République mande et ordonne au ministre de l'économie en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 15BX01425