Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Haute-Vienne a rejeté sa demande de titre de séjour et d'autre part, d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a explicitement refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1601192,1601482 du 2 février 2017, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 avril 2017, M. C...représenté par Me Moreau, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 février 2017 du tribunal administratif de Limoges ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2016 du préfet de la Haute-Vienne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 15 euros par jour de retard, à défaut, de statuer à nouveau, dans le délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
En ce qui concerne le refus de titre :
- la décision est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que l'avis du médecin de l'agence régionale de la santé n'est pas conforme aux dispositions de l'arrêté du 9 novembre 2011 en ce qu'il ne précise pas si son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine et qu'il ne se prononce pas sur l'intégralité de sa situation médicale ;
- la décision contestée méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- le préfet a commis une erreur de droit dès lors qu'il s'est senti lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision contestée est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- la mesure d'éloignement méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale, en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision méconnaît les dispositions des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;
- la décision contestée est insuffisamment motivée au regard de la situation de son pays d'origine ;
- cette décision méconnaît les stipulations des articles 2, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2017, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête et soutient que les moyens sont infondés.
Par ordonnance du 9 mai 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 6 juin 2017 à 12 heures.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mars 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue,
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant de la République du Congo, né le 12 février 1964, est entré en France le 10 mars 2014 selon ses déclarations. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rejetée une première fois par un arrêté du 18 mai 2015 du préfet de la Haute-Vienne. M. C...a formé une nouvelle demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le silence gardé par le préfet de la Haute-Vienne a fait naître une décision implicite de rejet. Par un arrêté du 16 septembre 2016, le préfet de la Haute-Vienne a opposé un refus explicite de rejet qui s'est substitué à la première décision, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement du 2 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 septembre 2016.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...). ".
3. Ces dispositions ont pour objet de permettre au préfet, auquel il incombe de prendre en considération les modalités d'exécution d'une éventuelle mesure d'éloignement dès le stade de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de disposer d'une information complète sur l'état de santé de l'étranger, y compris sur sa capacité à voyager sans risque à destination de son pays d'origine. Si, depuis l'intervention de l'arrêté du 9 novembre 2011, le médecin de l'agence régionale de santé n'est plus tenu d'indiquer dans son avis si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine lorsqu'aucun élément du dossier ne suscite d'interrogation sur sa capacité à supporter le voyage vers son pays d'origine, dans le cas contraire, l'omission de l'indication en cause entache d'irrégularité la procédure suivie et partant affecte la légalité de l'arrêté pris à sa suite.
4. Le requérant soutient sans être contredit qu'il a produit devant l'administration des certificats médicaux circonstanciés et notamment un certificat médical du Dr A...en date du 18 décembre 2015 indiquant que " M. C...présente un certain nombre de pathologies et en particulier une pathologie neurologique qui rend impossible un voyage en avion ". Cette information aurait donc dû conduire le médecin de l'agence à se prononcer sur la capacité du requérant à voyager dans son avis du 17 mars 2016 et l'omission de cette précision entache d'irrégularité la procédure suivie et l'arrêté en litige qui doit par suite être annulé dès lors que l'intéressé a été privé d'une garantie.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ". L'article L. 911-3 de ce code dispose que : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ".
7. L'annulation prononcée implique seulement que le préfet de la Haute-Vienne procède à un nouvel examen de la situation de M. C...dans le délai de deux mois suivant la notification de cet arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative :
8. En application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi n° 91-64 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Moreau, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 2 février 2017 du tribunal administratif de Limoges et l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 16 septembre 2016 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Vienne de réexaminer la situation de M. C... dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Moreau, avocat de M.C..., une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., au ministre de l'intérieur, au préfet de la Haute-Vienne et à Me Moreau.
Délibéré après l'audience du 29 juin 2017 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Marianne Pouget, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le.13 juillet 2017.
Le rapporteur,
Florence MadelaigueLe président,
Philippe PouzouletLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX01227