Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière (SCI) 11-62 a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 août 2013 par lequel l'établissement public foncier local (EPFL) Pays Basque a décidé d'exercer le droit de préemption délégué par la commune de Saint-Jean-de-Luz sur la parcelle cadastrée section AZ n° 96, d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Saint-Jean-de-Luz du 22 août 2013 portant subdélégation de l'exercice du droit de préemption urbain à l'EPFL, d'enjoindre à l'EPFL de lui céder la parcelle concernée au prix de 220 000 euros et de mettre à la charge solidaire de l'EPFL Pays basque et de la commune de Saint-Jean-de-Luz la somme de 2 048 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1301863 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 28 août 2013, a enjoint à l'EPFL Pays Basque de s'abstenir de céder à un tiers la parcelle cadastrée section AZ n° 96 et de proposer la cession à la SCI 11-62 aux conditions fixées dans la déclaration d'intention d'aliéner du 2 août 2013, a mis à la charge de la commune de Saint-Jean-de-Luz et de l'EPFL le versement à la SCI 11-62 de la somme globale de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
I°) Par une requête enregistrée le 9 septembre 2015 sous le n° 15BX03050 et un mémoire enregistré le 10 octobre 2016, la commune de Saint-Jean-de-Luz, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 7 juillet 2015 ;
2°) de rejeter les conclusions présentées par la SCI 11-62 ;
3°) de mettre à la charge de la SCI 11-62 la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en prononçant l'injonction de proposer le bien en priorité à la SCI 11-62, le tribunal a commis une erreur de droit ; en effet, en application de l'article L. 213-11-1 du code de l'urbanisme, dans ses dispositions entrées en vigueur le 27 mars 2014, l'annulation d'une décision de préemption doit être suivie par le rétablissement de l'ancien propriétaire dans ses droits ; la vente conclue avec MmeE..., ancienne propriétaire, n'était pas parfaite ; le jugement est donc irrégulier ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'arrêté du 22 août 2013 était bien exécutoire à la date à laquelle le droit de préemption a été exercé dès lors que, conformément à l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, il a été transmis au contrôle de légalité le 28 août 2013 et que, conformément à l'article L. 2122-29 du même code, il a été affiché en mairie de façon continue du 26 août au 30 octobre 2013 ; l'arrêté a par ailleurs été publié au registre des délibérations du conseil municipal et au recueil des actes administratifs ;
- la délibération du 23 juillet 1987 instituant le droit de préemption a été régulièrement affichée et publiée ; la sincérité des attestations du maire ne saurait être mise en cause sauf à agir en inscription de faux ; la SCI n'a en rien justifié d'une méconnaissance des règles de convocation des conseillers municipaux ou de publication de la délibération ;
- au regard des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l'urbanisme, l'arrêté en litige pouvait légalement se référer pour motiver l'exercice du droit de préemption au projet d'aménagement et de développement durable (PADD) du plan local d'urbanisme de la commune qui identifie des îlots du centre ville à reconquérir au titre des priorités pour améliorer l'offre de logement ; l'antériorité et la réalité du projet d'aménagement sont établies par un courrier du maire du 28 septembre 2012 à des bailleurs sociaux, par le programme pluriannuel d'intervention 2014-2018, par le plan local d'urbanisme adopté en 2012, par l'aire de mise en valeur du patrimoine approuvée en 2011, par divers échanges et par une réunion de travail ; trois parcelles ont été précédemment préemptées les 17 janvier et 23 mai 2013 et une réunion du 19 septembre 2013 démontre l'insertion de la décision litigieuse dans un programme global d'aménagement ;
- l'erreur manifeste d'appréciation alléguée tient à des préoccupations financières de l'acquéreur évincé et à une situation géographique dont il n'est pas précisé en quoi elle compromettrait la réalisation du projet ; ce moyen ne peut donc être retenu.
Par des mémoires enregistrés les 19 avril et 26 octobre 2016 la SCI 11-62, représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'EPFL Pays Basque à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que la somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie.
Elle soutient que :
- l'arrêté du 22 août 2013 ne pouvait valablement déléguer ou subdéléguer à l'EPFL l'exercice du droit de préemption puisqu'il n'avait pas été régulièrement publié ; la commune et l'EPFL ont disposé d'un délai suffisant pour produire des justificatifs en première instance ; ils ne peuvent se prévaloir en appel de productions qu'ils se sont abstenus de produire devant le tribunal ; le délai mis à produire ces éléments laissent penser qu'ils ont été fabriqués pour les besoins de la cause ; le registre des actes administratifs n'est pas produit ;
- aucune pièce du dossier ne démontre la nature du projet ; la motivation de l'arrêté s'appuie sur une phraséologie technocratique et laconique qui ne répond pas aux exigences des textes et de la jurisprudence ;
- l'intérêt général de l'exercice du droit de préemption n'est pas davantage démontré ; il est douteux que le développement urbain de la commune puisse être satisfait par l'acquisition d'une petite parcelle de 250 m² entourée de constructions, déjà bâtie et incluse dans un quartier proche du centre ville particulièrement dense ; l'acquisition de parcelles de 250 m² au prix de 220 000 euros laisse penser que le développement urbain projeté ne pourra intervenir avant une centaine d'année et au prix d'un important endettement ; il n'est pas démontré que le projet d'implantation d'une entreprise dans le quartier concerné serait contraire à un objectif d'intérêt général de développement ou de renouvellement urbain ; évincer une entreprise qui a son siège dans le quartier va au contraire à l'encontre du but du PADD ;
- l'absence ou l'insuffisance de motivation ne peuvent être régularisées par des éléments apportées en cours d'instance ;
- le PADD n'évoque pas le recours à la préemption et n'identifie pas le quartier Fargeot parmi les îlots à reconquérir ;
- le projet d'aménagement dont il est fait état ne s'appuie que sur des réflexions, prospectives ou études non abouties ;
- il n'est pas démontré que la délibération du 23 juillet 1987 ait été régulièrement publiée ; l'attestation produite par un maire qui n'était pas celui de l'époque et qui n'indique pas la durée d'affichage ni l'affichage du compte rendu de la réunion du conseil municipal, ne peut être retenue ; il n'est pas démontré que la délibération ait été publiée dans deux journaux diffusés dans le département, contrairement aux exigences de l'article de l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur ;
- l'injonction prononcée résulte d'une application logique en l'espèce de l'article L. 213-11 du code de l'urbanisme, un compromis de vente ayant été conclu avec Mme E...;
- les motifs d'annulation retenus par le tribunal doivent donc être confirmés ;
- en tout état de cause, la délibération du 23 juillet 2010 autorisant le maire à exercer le droit de préemption ou à le déléguer n'est pas suffisamment précise ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que la parcelle est située en zone inondable et qu'il est contraire aux objectifs de la commune d'exclure une activité artisanale du quartier concerné.
Par mémoire enregistré le 10 octobre 2016 l'EPFL Pays Basque, représenté par Me B..., conclut à l'annulation du jugement du 7 juillet 2015, au rejet des conclusions de la SCI 11-62 et à ce que soit mis à la charge de la SCI les dépens ainsi que le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du 22 août 2013 a été régulièrement publié ;
- la réalité du projet pour lequel le droit de préemption a été exercé est établie par des éléments antérieurs à la décision attaquée ;
- la commune a attesté du caractère exécutoire de la délibération du 23 juillet 1987 ;
- l'injonction est injustifiée ; ce n'est qu'après renonciation de l'ancien propriétaire qu'il est prévu de proposer l'acquisition à l'acquéreur évincé ;
- l'avis de France Domaine n'avait pas à être recueilli avant la décision du maire du 22 août 2013 mais seulement avant l'exercice du droit de préemption par le délégataire ;
- les modalités du portage n'avaient pas à être précisées avant que l'établissement ne préempte ;
- l'arrêté du 22 août 2013 qui ne décide pas d'exercer le droit de préemption n'avait pas à être motivé au regard des objectifs de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme ;
- les délibérations qui délèguent l'exercice du droit de préemption n'ont pas à être notifiées au propriétaire ; l'arrêté du maire portant délégation du droit de préemption, qui est un acte règlementaire, n'avait donc pas à faire l'objet d'une notification ;
- la délibération du 23 juillet 2010 n'avait pas à définir les modalités du portage qui d'ailleurs sont nécessairement différentes d'un projet à un autre ; cette délibération a pu légalement renvoyer à celle du 23 juillet 1987 s'agissant des modalités d'exercice du droit de préemption ; en tout état de cause, la définition de ces modalités n'était pas requise ;
- aucune erreur d'appréciation n'a été commise dès lors que le quartier Fargeot doit faire l'objet d'un renouvellement urbain et non d'un réaménagement commercial ; la situation en zone inondable n'empêche pas un projet de renouvellement urbain dès lors qu'il respecte les dispositions du plan de prévention des risques d'inondation de la Nivelle.
Par ordonnance du 4 novembre 2016, la clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 6 décembre 2016 à 12h00.
II°) Par une requête enregistrée le 10 septembre 2015 sous le n° 15BX03057 et un mémoire enregistré le 10 octobre 2016, l'EPFL Pays Basque, représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2015 du tribunal administratif de Pau ;
2°) de rejeter les conclusions de la SCI 11-62 ;
3°) de mettre à la charge de la SCI 11-62 les dépens ainsi que le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient les mêmes moyens que ceux exposés dans l'instance n° 15BX03050 susvisée et soutient, en outre, que sa requête d'appel est recevable dès lors qu'il n'est pas représenté par son président mais par son directeur qui est autorisé par le code de l'urbanisme à ester en justice pour le compte de l'établissement et qu'en tout état de cause, le conseil d'administration a donné compétence générale au directeur pour ester en justice et particulièrement dans le cadre de ce litige.
Par des mémoires enregistrés les 13 avril et 27 octobre 2016, la SCI 11-62, représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'EPFL Pays Basque le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la somme de 13 euros en remboursement du droit de plaidoirie.
Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, les mêmes moyens que ceux exposés dans le cadre de l'instance n° 15BX03050 susvisée. Elle soutient, en outre que l'arrêté du maire du 22 août 2013 n'a pas été notifié au propriétaire et à l'acquéreur dans le délai de deux mois à compter de la notification de la déclaration d'intention d'aliéner et que la commune et l'établissement sont donc censés avoir renoncé à l'exercice du droit de préemption urbain.
Par une ordonnance du 4 novembre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 décembre 2016 à 12h00.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeF..., représentant la société civile immobilière (SCI) 11-62, et de MeA..., représentant l'établissement public foncier local (EPFL) Pays Basque.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 22 août 2013, le maire de la commune de Saint-Jean-de-Luz a délégué à l'établissement public foncier local (EPFL) Pays Basque le droit de préemption urbain de la commune concernant la parcelle cadastrée section AZ n° 96 appartenant à MmeE..., pour une superficie de 250 mètres carrés. Le 28 août suivant, le directeur de l'EPFL Pays Basque a décidé d'exercer le droit de préemption sur le bien concerné. La société civile immobilière (SCI) 11-62, titulaire d'un compromis de vente du 18 juillet 2013, a saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté municipal du 22 août 2013 et de la décision du 28 août 2013. Le tribunal administratif, par jugement du 7 juillet 2015, a prononcé l'annulation de la décision du 28 août 2013 et a rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté du 22 août 2013. La commune de Saint-Jean-de-Luz et l'EPFL Pays Basque relèvent appel du jugement du 7 juillet 2015.
Sur la régularité du jugement :
2. A l'appui de sa contestation de la régularité du jugement, la commune de Saint-Jean-de-Luz soutient qu'en enjoignant à l'EPFL, en exécution du jugement, de proposer la cession du bien à la SCI 11-62, le tribunal a méconnu l'article L. 213-11-1 du code de l'urbanisme et, par suite, a entaché son jugement d'erreur de droit. Une telle erreur, à la supposer avérée, relève de l'office qu'exerce le juge d'appel dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel et n'est pas de nature à entacher le jugement d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Pour prononcer l'annulation de la décision du 28 août 2013, le tribunal administratif a retenu une insuffisante motivation de la décision ainsi qu'un défaut de base légale, en l'absence de preuve de la publication, d'une part, de l'arrêté du 22 août 2013 par lequel le maire de la commune de Saint-Jean-de-Luz a délégué l'exercice du droit de préemption urbain à l'EPFL Pays Basque et, d'autre part, de la délibération du 23 juillet 1987 instituant le droit de préemption urbain. En application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient à la cour de se prononcer sur le bien-fondé des moyens d'annulation retenus et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie l'annulation de la décision attaquée.
4. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement (...) Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. Toutefois, lorsque le droit de préemption est exercé à des fins de réserves foncières dans la cadre d'une zone d'aménagement différé, la décision peut se référer aux motivations générales mentionnées dans l'acte créant la zone. / Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat ou, en l'absence de programme local de l'habitat, lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. Il en est de même lorsque la commune a délibéré pour délimiter des périmètres déterminés dans lesquels elle décide d'intervenir pour les aménager et améliorer leur qualité urbaine ". L'article L. 300-1 du même code vise les actions ou opérations d'aménagement ayant pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels.
5. Il résulte de ces dispositions que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.
6. L'arrêté du 28 août 2013 du directeur de l'EPFL Pays basque est motivé par " le PADD du plan local d'urbanisme (...) dans lequel la municipalité affirme sa volonté de favoriser le développement urbain, notamment en matière d'habitat, par des réflexions et des projets en renouvellement urbain ", par " les différentes délibérations prises par le conseil municipal (...) ayant pour objectifs la mise en oeuvre d'une politique publique en faveur du développement urbain et notamment, d'analyser les potentialités d'aménagement de zones nouvelles dans le cadre de réflexions communales sur les opportunités d'une politique de renouvellement urbain " et, enfin, par l'opportunité d'exercer le droit de préemption sur le bien concerné " afin de permettre à la mise en oeuvre d'un projet permettant d'assurer une politique de développement urbain conforme aux articles L. 300-1 et L. 210-1 du code de l'urbanisme ".
7. L'arrêté contesté ne renvoie à aucune délibération clairement identifiée du conseil municipal en dehors de celle du 23 juillet 1983 instituant le droit de préemption urbain sur l'ensemble des zones urbaines et d'urbanisation future et de celle du 21 octobre 2011 approuvant le plan local d'urbanisme. D'ailleurs, ni la commune ni l'EPFL n'allèguent que le conseil municipal aurait pris, antérieurement à l'arrêté attaqué du 28 août 2013 une délibération ayant pour objet la création d'une zone d'aménagement différé, la mise en oeuvre d'un programme local de l'habitat, la mise en oeuvre d'un programme de construction de logements locatifs sociaux ou encore la délimitation d'un périmètre dans lequel la commune entendrait intervenir pour l'aménager et améliorer sa qualité urbaine. L'approbation du projet d'aménagement et développement durable de la commune, si elle traduit la volonté de la collectivité de favoriser l'accès au logement de personnes jeunes et à revenus modestes et d'améliorer l'offre de logements par l'identification d'îlots à " reconquérir ", ne peut être regardée comme une délibération de la commune décidant la mise en oeuvre d'un programme de construction de logements locatifs sociaux ni comme une délibération délimitant un périmètre d'intervention en vue de son aménagement et de l'amélioration de sa qualité urbaine. Les documents produits tant en première instance qu'en appel par la commune et par l'EPFL, qui ne sont d'ailleurs pas visés dans l'arrêté du 28 août 2013, se bornent à confirmer la volonté de la commune de densifier certains quartiers et d'améliorer l'offre de logements accessibles aux personnes à revenus modestes, et de conduire des études en ce sens, notamment en matière de requalification urbaine. En tout état de cause, et à supposer même qu'il serait justifié d'une opération ou d'une action d'aménagement précise que la commune entendrait mener dans le quartier concerné, la décision du 28 août 2013 de préempter le bien appartenant à Mme E...ne fait pas apparaître par ses mentions la nature du projet d'aménagement envisagé. Ainsi que l'a estimé le tribunal, la décision attaquée n'est donc pas motivée conformément aux exigences de l'article L. 210-1 précité du code de l'urbanisme.
8. S'agissant de la publication de la délibération du 23 juillet 1987, l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme applicable à la date de cette délibération, dispose que : " La délibération par laquelle le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent décide, en application de l'article L. 211-1, d'instituer ou de supprimer le droit de préemption urbain ou d'en modifier le champ d'application est affichée en mairie pendant un mois. Mention en est insérée dans deux journaux diffusés dans le département. / Les effets juridiques attachés à la délibération mentionnée au premier alinéa ont pour point de départ l'exécution de l'ensemble des formalités de publicité mentionnées audit alinéa. Pour l'application du présent alinéa, la date à prendre en considération pour l'affichage en mairie est celle du premier jour où il est effectué ".
9. La commune produit un certificat du maire attestant que la délibération a été régulièrement affichée " conformément aux dispositions légales et règlementaires en vigueur " mais ne mentionnant pas la date de cet affichage. La commune ne produit par ailleurs aucun élément établissant l'insertion d'une mention de cette délibération dans deux journaux diffusés dans le département. En l'absence d'élément permettant d'attester que la délibération était exécutoire au 28 août 2013, l'arrêté contesté doit être regardé comme privé de base légale.
10. S'agissant de la publication de l'arrêté du 22 août 2013, l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales dispose que : " Les arrêtés pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés, ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département (...) Le maire peut certifier, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes (...) ".
11. La commune produit un certificat du maire du 20 janvier 2014 attestant de l'affichage continu du 26 août au 30 octobre 2013, en mairie, de l'arrêté du 22 août 2013. La production de ce certificat par note en délibéré devant le tribunal, le 29 juin 2015 seulement, n'est pas, à elle seule, de nature à permettre de douter de son authenticité dès lors notamment que ce n'est qu'après avoir entendu les conclusions du rapporteur public à l'audience que la commune et l'EPFL ont eu connaissance de ce que la formation de jugement était susceptible de retenir le moyen tiré de l'absence d'affichage de l'arrêté du 22 août 2013, qui n'avait pas été invoqué par la société demanderesse. Si la commune ne produit pas le registre des actes administratifs de la commune dans lequel l'arrêté doit avoir été enregistré, aucune pièce du dossier ne permet de mettre en doute l'existence même de l'arrêté. Son inexistence n'est d'ailleurs pas alléguée. En l'absence de contestation sur la date de sa transmission au représentant de l'Etat, cet arrêté doit donc être regardé comme exécutoire le 28 août 2013, date à laquelle le directeur de l'EPFL a pris la décision d'exercer le droit de préemption délégué par le maire.
12. Il résulte de ce qui précède que deux des moyens retenus par le tribunal sont de nature à justifier l'annulation de l'arrêté attaqué. La commune de Saint-Jean-de-Luz et l'EPFL Pays Basque ne sont donc pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 28 août 2013.
13. Aux termes de l'article L. 213-11-1 du code de l'urbanisme issu de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 : " Lorsque, après que le transfert de propriété a été effectué, la décision de préemption est annulée ou déclarée illégale par la juridiction administrative, le titulaire du droit de préemption propose aux anciens propriétaires ou à leurs ayants cause universels ou à titre universel l'acquisition du bien en priorité. / Le prix proposé vise à rétablir, sans enrichissement injustifié de l'une des parties, les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle. A défaut d'accord amiable, le prix est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation, conformément aux règles mentionnées à l'article L. 213-4. / A défaut d'acceptation dans le délai de trois mois à compter de la notification de la décision juridictionnelle devenue définitive, les anciens propriétaires ou leurs ayants cause universels ou à titre universel sont réputés avoir renoncé à l'acquisition. / Dans le cas où les anciens propriétaires ou leurs ayants cause universels ou à titre universel ont renoncé expressément ou tacitement à l'acquisition dans les conditions mentionnées aux trois premiers alinéas du présent article, le titulaire du droit de préemption propose également l'acquisition à la personne qui avait l'intention d'acquérir le bien, lorsque son nom était inscrit dans la déclaration mentionnée à l'article L. 213-2 ".
14. Ainsi que le soutient la commune de Saint-Jean-de-Luz, en application de ces dispositions, les premiers juges ne pouvaient, par leur jugement du 7 juillet 2015, enjoindre à l'EPFL Pays Basque de proposer la cession du bien à la SCI 11-62 sans que MmeE..., ancienne propriétaire, ait renoncé à l'acquisition du bien qui lui appartenait, quand bien même la SCI 11-62 était titulaire d'une promesse de vente, dès lors que cette promesse était conclue sous la réserve expresse qu'aucun droit de préemption ne soit exercé. Il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement en tant qu'il prononce cette injonction et de rejeter les conclusions présentées par la SCI 11-62 devant le tribunal administratif de Pau tendant à ce qu'il soit enjoint à l'EPFL Pays Basque de lui proposer la cession de l'immeuble cadastré section AZ n° 96.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'EPFL une somme de 1 500 euros à verser à la SCI 11-62 au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la SCI 11-62, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel, les sommes que demandent la commune de Saint-Jean-de-Luz et l'EPFL Pays Basque à ce titre.
16. La présente instance n'a donné lieu à aucun dépens. Les conclusions de l'EPFL relatives à la charge des dépens sont, par suite, sans objet.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1301863 du 7 juillet 2015 du tribunal administratif de Pau est annulé en tant qu'il enjoint à l'EPFL Pays Basque de proposer la cession de l'immeuble cadastré section AZ n° 96 à la SCI 11-62.
Article 2 : Les conclusions présentées par la SCI 11-62 devant le tribunal administratif de Pau tendant à ce qu'il soit enjoint à l'EPFL Pays Basque de lui proposer la cession de l'immeuble cadastré section AZ n° 96 sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes de la commune de Saint-Jean-de-Luz et de l'EPFL Pays Basque est rejeté.
Article 4 : L'EPFL Pays Basque versera la somme de 1 500 euros à la SCI 11-62 en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Jean-de-Luz, à l'établissement public foncier local Pays Basque, à la société civile immobilière 11-62 et à Mme D... E....
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 12 décembre 2017.
Le président-assesseur,
Christine Mège
Le président-rapporteur,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au préfet des Landes en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX03050, 15BX03057