Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai.
Par un jugement n° 1605402 du 18 juillet 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 août 2017 et 20 octobre 2017,
MmeB..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 juillet 2017 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2016 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme
de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé et n'a pas été précédé d'un examen réel et sérieux de sa situation ;
- cet arrêté a méconnu la convention d'Istanbul du 12 avril 2011 et la loi du
4 août 2014 sur l'égalité réelle entre hommes et femmes, notamment son article 47 modifiant l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne pouvait par suite être fondé sur la seule absence de communauté de vie entre les époux ;
- il est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français a méconnu l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et se trouve privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant le séjour ;
- le préfet aurait dû lui octroyer un délai supérieur à trente jours pour quitter le territoire national.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il confirme les termes de son mémoire de première instance.
Par ordonnance du 18 septembre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 octobre 2017.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 octobre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique signée à Istanbul le 7 avril 2011 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C...a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., de nationalité algérienne, née le 20 octobre 1993 à Hadjaj (Algérie), est entrée régulièrement en France le 10 août 2015 munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Elle avait précédemment épousé un ressortissant français le 4 août 2014 et s'est vue délivrer à ce titre un certificat de résidence valable jusqu'au 10 août 2016. Par un arrêté
du 19 octobre 2016 le préfet de la Haute-Garonne a refusé de procéder au renouvellement de ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B...relève appel du jugement du 18 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté
du 19 octobre 2016.
Sur la légalité de l'arrêté du 19 octobre 2016 :
2. En premier lieu, l'arrêté en litige mentionne les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. En outre, le préfet de la Haute-Garonne n'ayant pas accordé à
Mme B...un délai plus court que le délai de principe, fixé à trente jours, pour quitter volontairement le territoire national, il n'avait pas, en l'absence d'éléments de nature à justifier la prolongation de ce délai, à motiver spécifiquement son arrêté sur ce point. Enfin, il ressort des termes de cet arrêté ainsi que des pièces du dossier que le préfet a procédé à un examen particulier et approfondi de la situation de MmeB....
3. En deuxième lieu, il résulte des termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Dès lors, l'article 24 de la
loi du 12 avril 2000, au demeurant abrogé à la date de la décision contestée, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées, ne saurait être utilement invoqué par l'appelante à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
4. En troisième lieu, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité, de sorte que les dispositions de l'article L. 313-12 du
code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient la possibilité pour le préfet de procéder au renouvellement du titre de séjour lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger à raison des violences conjugales qu'il a subies, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens. Toutefois, il appartient à l'autorité préfectorale, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, notamment eu égard aux violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Enfin, les stipulations de la convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique signée à Istanbul le 7 avril 2011 et ratifiées par la France requièrent l'intervention d'actes complémentaires pour produire des effets à l'égard des particuliers et ne peuvent dès lors être utilement invoquées à l'appui de conclusions tendant à l'annulation d'une décision individuelle.
5. Si Mme B...soutient que la communauté de vie avec son époux a cessé en raison des violences conjugales qu'elles a subies, elle produit, à l'appui de ces allégations, des procès verbaux de plainte datés des 10 et 23 février 2016 qui ont été classés sans suite, des certificats médicaux, un avis d'arrêt de travail relatif à un syndrome dépressif ainsi que des attestations qui ne permettent pas d'établir la réalité de ces violences alors que, par une ordonnance du 1er juin 2016, le tribunal de grande instance de Toulouse a refusé de faire droit aux demandes de protection présentées par l'appelante au motif que les violences conjugales dont elle se prévalait n'étaient pas établies en l'absence, notamment, de lien entre les ecchymoses dont a souffert Mme B...et les violences qu'elle a décrites. Dans ces conditions, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne, qui ne s'est pas borné à constater qu'elle ne justifiait plus d'une communauté de vie avec son époux mais a, au contraire, examiné l'opportunité de lui délivrer un titre de séjour compte tenu des violences dont elle se prévalait aurait commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation en refusant de procéder à la régularisation de sa situation.
6. En quatrième lieu, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoient que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "
7. Mme B...fait valoir qu'un de ses frères et l'une de ses soeurs résident régulièrement en France et qu'elle fait des efforts pour s'intégrer à la société française. Toutefois, elle n'établit pas l'intensité des liens qu'elle entretient avec ces derniers alors qu'elle ne résidait en France que depuis moins de trois années à la date de l'arrêté litigieux, qu'elle n'y a plus d'attaches affectives depuis la rupture de la vie commune avec son époux et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a résidé les vingt-deux premières années de sa vie et où résident encore dix membres de sa fratrie. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. En cinquième lieu, il résulte de ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
9. En dernier lieu, Mme B...ne faisant état d'aucune circonstance particulière qui aurait justifié que le préfet lui accorde un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours, le moyen tiré de ce que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en retenant ce délai ne peut qu'être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi
du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au ministre de l'intérieur et à MeD.... Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Didier Salvi, président,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,
Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 décembre 2017
Le rapporteur,
Manuel C...
Le président,
Didier SalviLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 17BX02843