Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 28 mars 2013 par laquelle le préfet de la Corrèze a rejeté sa demande d'autorisation de détention de deux émeus d'agrément.
Par un jugement n° 1300852 du 11 février 2016, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 mars 2016, M. C...A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 11 février 2016 ;
2°) d'annuler la décision préfectorale du 28 mars 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Corrèze de lui délivrer l'autorisation sollicitée.
Il soutient que :
- il détenait ses deux émeus avant l'entrée en vigueur de l'arrêté ministériel du 10 août 2014 dont les dispositions, de nature réglementaire, ne sont pas rétroactives ;
- il n'est pas concerné par les dispositions transitoires de l'article 24 de cet arrêté, lesquelles ne concernent que l'obligation de régulariser avant le 31 décembre 2005 les animaux inscrits à l'annexe 1 dudit arrêté ; or les émeus relèvent de l'annexe 3 du même arrêté ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que les émeus relevaient du champ d'application de l'arrêté du 10 août 2004 au motif qu'ils étaient visés à l'annexe 3 dudit arrêté ; en réalité, cette annexe 3 ne vise pas expressément les émeus ;
- le préfet a commis une erreur de droit en ne distinguant pas la réglementation issue de l'article L. 413-2 du code de l'environnement, laquelle concerne la détention d'un certificat de capacité d'élevage d'animaux non domestiques, avec celle issue de l'arrêté du 10 août 2004, moins contraignante, relative à la demande d'autorisation de détention d'un animal non domestique ; celle-ci aurait dû être délivrée dès lors qu'il possède désormais un seul animal, qu'il présente un caractère pacifique, qu'il ne se reproduira pas ; il possède par ailleurs d'autres certificats de capacités de transport d'animaux et produit une attestation d'un vétérinaire indiquant que les conditions de détention de son animal sont adaptées ; en revanche, le préfet ne pouvait exiger la détention d'un certificat de capacité d'élevage.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2016, le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- M. A...n'établit pas qu'il possédait des animaux antérieurement à l'entrée en vigueur de l'arrêté du 10 août 2004 et son moyen tiré de la rétroactivité illégale de l'application de cet arrêté est inopérant ;
- en tout état de cause, les articles L. 413-2 et L. 413-3 du code de l'environnement reprennent les anciens articles L. 213-2 et L. 213-3 du code rural, lesquels prévoyaient leur applicabilité aux établissements existants au 14 juillet 1976 ; c'est dès lors à juste titre que le tribunal a jugé que le pouvoir réglementaire ne pouvait, en l'absence d'habilitation, prévoir, au profit des personnes qui détenaient déjà des animaux d'espèces non domestiques au moment de l'entrée en vigueur de l'arrêté du 10 août 2004, un régime permanent différent de celui applicable aux autres détenteurs ;
- au demeurant, cet arrêté comporte, en son article 26, des dispositions transitoires applicables à la situation de M.A... ;
- l'annexe 2 de l'arrêté du 10 août 2004 fixe la liste des espèces non domestiques dont la détention ne peut être autorisée qu'au sein d'un établissement d'élevage ou de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques autorisé conformément aux articles L. 413-2 et L. 413-3 du code de l'environnement à détenir des animaux de l'espèce considérée ; cette annexe impose cette obligation d'autorisation à " Toutes les espèces considérées comme dangereuses dont la liste est établie en annexe 3 au présent arrêté, à l'exception des espèces inscrites en annexe 1 au présent arrêté et de Boa constrictor " ; la famille des dromaiidés à laquelle appartiennent les émeus figure dans la liste établie par l'annexe 3 à laquelle il est ainsi renvoyé ; l'article 1er de l'arrêté est donc applicable à la demande de M.A... ;
- la circonstance que M. A...ne détenait que deux émeus est sans incidence sur la classification de ces animaux comme dangereux au regard de la législation relative aux établissements d'élevage d'animaux d'espèces non domestiques soumis aux articles L. 413-2 et L. 413-3 du code de l'environnement ;
- est enfin inopérant l'argument selon lequel M. A...était déjà détenteur d'un certificat de capacité pour l'élevage canin ; il s'agit ici d'animaux domestiques alors que le litige porte sur des animaux non domestiques.
Par ordonnance du 3 octobre 2016, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 5 décembre 2016 à 12h00.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le préfet était en situation de compétence liée pour rejeter la demande de M.A....
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté du 10 août 2004 fixant les règles générales de fonctionnement des installations d'élevage d'agrément d'animaux d'espèces non domestiques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., qui possédait alors deux émeus d'agrément, a déposé le 19 février 2013 en préfecture de Corrèze une demande d'autorisation de détention d'animaux d'espèces non domestiques. Par une décision du 28 mars 2013, le préfet a rejeté cette demande au motif que M. A... ne justifiait pas être détenteur d'un certificat de capacité. M. A...a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Limoges et relève appel du jugement rendu le 11 février 2016 ayant rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article L. 412-1 du code de l'environnement : " (...) la détention, (...) d'animaux d'espèces non domestiques (...) dont la liste est fixée par arrêtés conjoints du ministre chargé de l'environnement et, en tant que de besoin, du ou des ministres compétents, s'ils en font la demande, doivent faire l'objet d'une autorisation délivrée dans les conditions et selon les modalités fixées par un décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article R. 412-1 du même code : " Sont soumises à autorisation (...) la détention (...) d'animaux d'espèces non domestiques (...) dont la liste est fixée, après avis du Conseil national de la protection de la nature (...) par arrêtés conjoints du ministre chargé de la protection de la nature et, en tant que de besoin, du ou des ministres compétents (...) ". Ces dispositions instituent un régime d'autorisation pour la détention d'espèces d'animaux non domestiques qui se distingue du régime d'autorisation applicable aux établissements d'élevage de ces animaux prévu à l'article L. 413-3 du code de l'environnement.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A...a présenté sa demande d'autorisation sur le fondement des dispositions de l'arrêté du 10 août 2004 fixant les règles générales de fonctionnement des installations d'élevage d'agrément d'animaux d'espèces non domestiques. Ce faisant, M. A...a entendu placer sa demande sur le terrain des dispositions des articles L. 412-2 et R. 412-2 précités du code de l'environnement pour l'application desquelles a été pris l'arrêté du 10 août 2004.
4. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 10 août 2004 : " Un élevage d'animaux d'espèces non domestiques constitue un établissement d'élevage d'animaux d'espèces non domestiques soumis aux articles L. 413-2 et L. 413-3 du code de l'environnement s'il présente l'une au moins des caractéristiques suivantes : - l'élevage porte sur des animaux d'espèces ou groupes d'espèces inscrits à l'annexe 2 du présent arrêté (...)". Aux termes de l'article 2 du même arrêté : " Un élevage d'animaux d'espèces non domestiques ne présentant pas les caractéristiques définies à l'article 1er du présent arrêté constitue un élevage d'agrément au sens du présent arrêté. Dans ce cas, on entend par "élevage" le fait de détenir au moins un animal (...).".
5. Il résulte des dispositions citées aux points 2 et 4 que toute personne détenant un élevage d'animaux d'espèces non domestiques appartenant à un groupe inscrit à l'annexe 2 de l'arrêté du 10 août 2004 doit solliciter l'autorisation, prévue par l'article L. 413-3 du code de l'environnement, prévue pour les établissements d'élevage de ces espèces. Ainsi, l'autorisation prévue à l'article L. 412-1 du code de l'environnement et sollicitée par M. A...ne s'applique qu'aux détenteurs d'animaux non domestiques qui ne figurent pas sur la liste de l'annexe 2 à l'arrêté du 10 août 2004.
6. Au nombre des espèces mentionnées à l'annexe 2 de l'arrêté figurent celles, considérées comme dangereuses, figurant à l'annexe 3 du même arrêté. La famille des dromaiidés, à laquelle appartiennent les émeus détenus par M.A..., est inscrite à l'annexe 3 de l'arrêté.
7. Dans ces conditions, le préfet de la Corrèze ne pouvait autoriser M. A...à détenir ces animaux sur le fondement de l'article L. 412-1 du code de l'environnement. Les dispositions précitées des articles 1er et 2 de l'arrêté du 10 août 2004 plaçaient même le préfet en situation de compétence liée pour rejeter la demande de M.A....
8. Néanmoins, M. A...soutient que, ayant acquis ses émeus antérieurement à l'entrée en vigueur de l'arrêté du 10 août 2004, les dispositions de celui-ci ne sauraient lui être appliquées rétroactivement. Aux termes de l'article 25 de l'arrêté du 10 août 2004 : " (...) les personnes, autres que les responsables d'établissements d'élevage ou de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques autorisés en application des articles L. 413-3 et L. 413-4 du code de l'environnement à héberger des animaux appartenant aux espèces ou groupes d'espèces inscrits à l'annexe 2 du présent arrêté, qui détiennent de tels animaux au moment de l'entrée en vigueur du présent arrêté, doivent avant le 30 juin 2006 solliciter les autorisations prévues aux articles L. 413-2 et L. 413-3 du code de l'environnement. (...) ". Ces dispositions dont relève M. A...ont instauré un délai permettant aux personnes intéressées de se mettre en conformité avec la réglementation issue de l'article 1er de l'arrêté du 10 août 2004. Elles ne revêtent pas un caractère rétroactif contrairement à ce que soutient M. A...qui ne justifie d'aucune situation juridiquement protégée qui se serait constituée antérieurement à l'entrée en vigueur de l'arrêté du 10 août 2004 et à laquelle celui-ci n'aurait pu porter atteinte.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 28 mars 2013. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 16BX00851 présentée par M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 octobre 2018.
Le rapporteur,
Frédéric FaïckLe président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX00851