Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier de Rodez à lui verser la somme de 51 614 euros en réparation des préjudices qu'elles a subis au décours de la cholécystectomie dont elle a bénéficié le 19 janvier 2010.
Par un jugement n° 1401435 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le centre hospitalier de Rodez à verser à Mme D...une somme de 25 500 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et de l'Aveyron une somme de 80 473,83 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 février 2017, la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et de l'Aveyron, représentée par la SCP Rastoul-Fontanier-Combarel, demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 décembre 2016 en tant qu'il n'a pas condamné le centre hospitalier de Rodez à lui verser les sommes de 88 119,18 et 1 010,24 euros assorties des intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2015 au titre, d'une part, du capital invalidité ainsi que des arrérages échus du 1er novembre 2011 au 27 mars 2014 et, d'autre part, des frais d'hospitalisation du 21 janvier 2010 ;
2°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Rodez une somme de 1 000 euros au titres des fais exposés pour l'instance.
Elle soutient que :
- l'invalidité de Mme D...résulte directement de la faute médicale commise par le centre hospitalier de Rodez ;
- le troisième jour d'hospitalisation de Mme D...n'est pas justifié par les conséquences de la cholécystectomie dont elle a bénéficié.
Par un mémoire, enregistré le 5 juillet 2018, le centre hospitalier de Rodez, représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la CPAM ne justifie pas de l'imputabilité de ses débours à la faute médicale qu'il a commise.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.E...,
- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant le centre hospitalier de Rodez.
Considérant ce qui suit :
1. Le 19 janvier 2010, Mme D...a bénéficié d'une cholécystectomie (ablation de la vésicule biliaire) coelioscopique au centre hospitalier de Rodez. Aux termes du jugement attaqué du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a considéré qu'à raison des fautes commises par cet établissement au cours et au décours de cette intervention chirurgicale, l'intéressée avait perdu une chance, évaluée à 80 %, d'éviter les dommages que lui ont causé la péritonite biliaire dont elle a été victime et son diagnostic tardif. Les premiers juges ont, en conséquence, condamné le centre hospitalier de Rodez à indemniser Mme D...de ses préjudices et à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et de l'Aveyron (CPAM) une somme globale de 80 473,83 euros en remboursement de ses débours. La CPAM demande à la cour de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas condamné le centre hospitalier de Rodez à lui verser les sommes de 88 119,18 et 1 010,24 euros assorties des intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2015 au titre, d'une part, du capital invalidité ainsi que des arrérages échus du 1er novembre 2011 au 27 mars 2014 et, d'autre part, des frais d'hospitalisation du 21 janvier 2010.
2. En premier lieu, d'une part, en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le juge saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et du recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime. Il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime. Le juge doit allouer cette indemnité à la victime, dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale.
3. D'autre part, eu égard à la finalité de réparation d'une incapacité permanente de travail qui lui est assignée par les dispositions de l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale et à son mode de calcul, en fonction du salaire, fixé par l'article R. 341-4 du même code, la pension d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de son incapacité. Dès lors, le recours exercé par une caisse de sécurité sociale au titre d'une pension d'invalidité ne saurait s'exercer que sur ces deux postes de préjudice.
4. Il convient, en conséquence, de déterminer si l'incapacité permanente conservée par Mme D...en raison de la péritonite biliaire qu'elle a subie et de son diagnostic tardif, a entraîné, depuis la consolidation de son état de santé, des pertes de revenus professionnels et une incidence professionnelle et, dans l'affirmative, d'évaluer ces postes de préjudice sans tenir compte, à ce stade, du fait qu'ils ont donné lieu au versement d'une pension d'invalidité. Pour déterminer ensuite dans quelle mesure ces préjudices ont été réparés par la pension, il y a lieu de regarder cette prestation comme réparant prioritairement les pertes de revenus professionnels et, par suite, comme ne réparant tout ou partie de l'incidence professionnelle que si la victime ne subissait pas de pertes de revenus ou si le montant de ces pertes était inférieur à celui perçu au titre de la pension. La circonstance que la victime ne demande réparation que des pertes de revenus restées à sa charge ne dispense pas le juge, dès lors que la caisse demande le remboursement des prestations compensatoires, de tenir compte des pertes réelles de revenus pour fixer le montant de ce poste de préjudice.
5. Il résulte de l'instruction que MmeD..., née le 21 juin 1954, a travaillé dans le secteur bancaire depuis l'âge de 17 ans. Elle a toutefois été licenciée en 2009, à l'âge de 55 ans, et était à la recherche d'un emploi lors de l'accident médical dont s'agit. Elle reste atteinte, en raison de la péritonite biliaire qu'elle a subie, d'un déficit fonctionnel permanent évalué par l'expert judiciaire à 10 % " tenant compte du syndrome douloureux séquellaire, de l'atrophie hépatique du secteur postéro-latéral, du syndrome anxio-dépressif séquellaire ". Toutefois, si la CPAM fait valoir que son médecin conseil a considéré qu'eu égard à ces séquelles, la possibilité que Mme D...retrouve un emploi était désormais " illusoire ", si bien que celle-ci se trouvait en état d'invalidité au regard du code de la sécurité sociale, cette affirmation ne permet pas, à elle seule, de considérer que cet état d'invalidité serait imputable à la péritonite biliaire susmentionnée alors, au demeurant, qu'en application des articles L. 341-3 et R. 341-2 du code de la sécurité sociale, l'état d'invalidité n'est pas apprécié au regard du déficit fonctionnel permanent de l'intéressée mais de sa capacité de travail restante, de son état général, de son âge et de ses facultés physiques et mentales, ainsi que de ses aptitudes et de sa formation professionnelle et que l'expert judiciaire n'a retenu aucune inaptitude à l'exercice d'une activité professionnelle correspondant à ses qualifications ou à d'autres emplois mais s'est, au contraire, borné à constater que les emplois que lui a proposés Pôle Emploi ne correspondaient pas à ses qualifications. Par suite, la CPAM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier de Rodez soit condamné à lui verser les sommes correspondant au capital invalidité attribué à Mme D...ainsi que des arrérages échus du 1er novembre 2011 au 27 mars 2014.
6. En second lieu, à l'appui du moyen tiré de ce que les frais liés à l'hospitalisation de Mme D...le 21 janvier 2010 seraient imputables à la péritonite dont elle a été victime, la CPAM ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et de l'Aveyron est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et de l'Aveyron, au centre hospitalier de Rodez et à Mme A...D....
Délibéré après l'audience du 5 mars 2019 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 avril 2019.
Le rapporteur,
Manuel E...Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
Le greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°17BX00448