Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le département de la Charente-Maritime a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner solidairement la société Laporte Service Route, la société Signature Traffic Systems, la société Signalisation France et la société Sécurité et Signalisation à lui verser la somme de 830 913,59 euros en réparation du préjudice qu'il a subi à la suite de l'entente pratiquée par ces sociétés pour l'attribution de marchés portant sur la signalisation verticale.
Par un jugement n° 1401603 du 22 mars 2017, le tribunal administratif de Poitiers a condamné solidairement les sociétés Laporte Service Route, représentée par Me D... mandataire judiciaire, Signature SA, aux droits de laquelle est venue la société Signalisation France, et Sécurité et Signalisation, représentée par Me B..., mandataire judiciaire, à verser au département de la Charente-Maritime la somme de 290 819,76 euros.
Par un arrêt n° 17BX01521 du 9 juillet 2019, la cour a rejeté la requête de la société Signalisation France tendant à l'annulation du jugement du 22 mars 2017 et a porté à 294 662 euros l'indemnité que cette société est condamnée à payer au département de la Charente-Maritime.
Recours en rectification d'erreur matérielle :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 juillet 2019 et le 14 août 2019, la société Signalisation France, représentée par Me A..., demande à la cour de rectifier cet arrêt pour erreur matérielle.
Elle fait valoir que le montant des marchés payé par le département et qui constitue la base du préjudice indemnisable est de 2 843 291,32 euros et non de 4 209 471 euros, compte tenu de la déduction de la somme de 1 412 034,68 euros payée à la société des Signalisations.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 juillet 2019 et le 23 août 2019, le département de la Charente-Maritime, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la demande de la société Signalisation France n'entre pas dans le champ d'application de l'erreur matérielle et qu'en tout état de cause la société des Signalisations étant une filiale de la société Lacroix Signalisation, elle a participé à l'entente.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
-- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... G...,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations de Me H..., représentant la société Signalisation France, et les observations de Me F..., représentant le département de la Charente-Maritime.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel (...) est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification ".
2. Il résulte de ces dispositions que le recours en rectification d'erreur matérielle n'est ouvert qu'en vue de corriger des erreurs de caractère matériel de la juridiction qui ne sont pas imputables aux parties et qui ont pu avoir une influence sur le sens de la décision. L'objet de ce recours à l'encontre d'un arrêt d'une cour administrative d'appel n'est pas de remettre en question des appréciations d'ordre juridique portées par cette dernière sur l'affaire qui lui était soumise.
3. Par son arrêt du 9 juillet 2019, la cour a considéré dans son point 6, qu'il ne ressortait pas de l'instruction que la société des Signalisations aurait participé au " cartel de la signalisation verticale " condamné par l'Autorité de la Concurrence puis par la cour d'appel de Paris à une amende finale de 10 millions d'euros pour avoir été à l'origine, en 1997, du " cartel de la signalisation verticale " qui a permis, jusqu'à son démantèlement en 2006, à plusieurs sociétés de se répartir les marchés de panneaux de signalisation verticale par l'effet d'un plan anticoncurrentiel concerté. Elle a donc estimé qu'il y avait lieu de déduire du montant total des marchés passés par le département dans le domaine de la signalisation, le montant des sommes versées à la société des Signalisations dans le cadre de ces marchés, soit la somme de 45 854,99 euros. Toutefois, et alors que la cour se fondait sur l'attestation du payeur départemental ainsi que sur le tableau récapitulatif des marchés produit par le département devant la cour le 1er mai 2019, la somme de 45 854,99 euros ne correspond pas au montant des sommes versées par le département à la société des Signalisations en paiement des marchés 01D33 et 04D532, soit les sommes de 690 712,86 euros et 721 321,82 euros. Dès lors, eu égard à cette circonstance et aux motifs retenus par l'arrêt du 9 juillet 2019, la cour a, sans porter sur ce point d'appréciation juridique, entaché sa décision d'une erreur matérielle, au sens des dispositions précitées de l'article R. 833-1 du code de justice administrative, en ne retenant que la somme de 45 854,99 euros en lieu et place de la somme de 1 412 034,68 euros (690 712,86 + 721 321,82).
4. Si le département fait valoir qu'en tout état de cause la société des Signalisations a nécessairement participé à l'entente dès lors qu'elle n'était qu'une filiale détenue à 100 % par la société Lacroix Signalisation, cette éventuelle erreur qui résulterait d'une appréciation juridique, ne peut pas être censurée par la voie du recours en rectification d'erreur matérielle.
5. Il résulte de ce qui précède, qu'il y a lieu de rectifier l'erreur matérielle commise par la cour, de fixer la base du préjudice indemnisable du département de la Charente-Maritime à la somme de 2 843 292 euros (4 255 326 - 1 412 034), pour tenir compte de la déduction du montant des marchés payés à la société des Signalisations, et de fixer le montant du préjudice du département à la somme de 199 030 euros (7 % de la somme de 2 843 292 euros).
DECIDE :
Article 1er : Le point 6 des motifs de l'arrêt de la cour n° 17BX01521 du 9 juillet 2019 est modifié comme suit : " (...)Dans ces conditions, au regard du principe selon lequel il appartient à la victime de produire tous les éléments justificatifs de son préjudice mais également d'identifier avec précision les personnes dont elle estime que la responsabilité est engagée, il y a lieu également de soustraire du montant des marchés payés par le département la somme de 1 412 034,68 euros correspondant aux sommes versées à la " société des Signalisations ". Il s'ensuit que le montant total des paiements effectués par le département de la Charente-Maritime dans le cadre des marchés litigieux, et qui constitue la base de son préjudice indemnisable, s'élève à 2 843 292 euros. ".
Article 2 : Le point 9 des motifs de l'arrêt de la cour n° 17BX01521 du 9 juillet 2019 est modifié comme suit : " Dans ces conditions, le montant du préjudice du département de la Charente-Maritime doit être porté à hauteur de la somme de 199 030 euros et le jugement du tribunal doit être réformé dans cette mesure. Enfin, les droits que le département de la Charente-Maritime tient sur les autres codébiteurs solidaires n'étant pas en litige devant la cour, la réformation du jugement doit être limitée à hauteur des droits dudit département sur la société Signalisation France qui est ainsi redevable, aux termes du présent arrêt, de la somme de 199 030 euros. ".
Article 3 : L'article 2 du dispositif de l'arrêt de la cour du 9 juillet 2019 est modifié comme suit : " La somme de 290 819,76 euros que le tribunal administratif de Poitiers a mise à la charge de la société Signalisation France est portée à 199 030 euros ".
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Signalisation France et au département de la Charente-Maritime. Une copie en sera adressée à Me D..., mandataire judiciaire de la société Laporte Service Route, à la société Signature Traffic Systems et à Me B..., mandataire judiciaire de la société Signalisation France et Sécurité.
Délibéré après l'audience du 18 février 2020 à laquelle siégeaient :
M. Dominique Naves, président,
Mme E... G..., présidente-assesseure,
Mme Déborah de Paz, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 19 mai 2020.
Le président,
Dominique NAVES
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX02591