Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les décisions implicites et expresses des 27 janvier 2014 et 4 août 2014 de La Poste rejetant ses demandes de réintégration à compter du 1er décembre 2013 et prolongeant son congé de longue durée d'office, d'annuler la décision du 1er décembre 2014 le réintégrant dans ses fonctions, d'annuler la décision par laquelle La Poste lui a refusé l'accès à l'Intranet et à l'information professionnelle, et de condamner La Poste à l'indemniser des préjudices causés par diverses fautes.
Par un jugement n° 1400377, 1401323, 1402901, 1405834, 1500488 et 1602213 du 19 février 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 1er décembre 2014 affectant M. C... à l'ATM de Toulouse, a condamné La Poste à verser à M. C... la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral, a rejeté le surplus des requêtes de M. C... et a condamné ce dernier à une amende pour recours abusif.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 avril 2018, le 27 juillet 2018 et le 5 février 2021, M. C..., représenté par Me F..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 19 février 2018 en tant qu'il porte sur ses demandes enregistrées sous le n° 1401323 ;
2°) d'annuler la décision du 27 janvier 2014 par laquelle La Poste a prolongé son congé de longue durée du 1er décembre 2013 au 31 mai 2014 ;
3°) de condamner La Poste à lui verser la somme de 500 000 euros en réparation des préjudices causés par ses fautes ainsi que la somme de 2 000 euros par mois de congé longue durée abusif ;
4°) d'enjoindre à La Poste de reconstituer sa carrière ;
5°) de mettre à la charge de La Poste une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a jamais eu communication de la fiche d'aptitude médicale établie par le médecin du travail sur la base duquel le comité médical a émis un avis le 8 janvier 2014 ; il n'a pas été informé de l'adresse à laquelle s'est réuni le comité médical, le privant de la possibilité d'y assister ; la note n° 959 de La Poste a été méconnue ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'est atteint d'aucune maladie mentale et que l'autorité de la chose jugée s'attache à l'arrêt n° 16BX01476.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2020, La Poste, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... H...,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteure publique,
- et les observations de M. A... C..., et de Me G..., représentant La Poste.
Une note en délibéré, déposée par M. C..., a été enregistrée au greffe de la cour le 16 mars 2021.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., a intégré le service public des Postes et Télécommunications le 9 mars 1976 et a été titularisé dans le grade de cadre de premier niveau de La Poste le 11 octobre 2000. Muté à compter du 1er octobre 2003 à l'antenne territoriale de maintenance (ATM) d'Aurillac, M. C... s'est vu infliger, par décision du 17 octobre 2006, la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de deux ans, dont un an avec sursis, pour avoir menacé de mort le directeur de la direction du support et de la maintenance (DSEM), la directrice des ressources humaines et les responsables de l'Agence Régionale de Maintenance (ARM) et de l'ATM. Le 24 octobre 2007, M. C... a été réintégré au sein de La Poste et affecté en qualité de conseiller support technique, dans un premier temps, à l'ARM de Paris par une décision du 18 octobre 2007 puis, dans un second temps, à la DSEM de Chartres par une décision du 26 novembre suivant. Ces deux décisions ayant été annulées par jugement du tribunal administratif de Paris du 27 avril 2011 devenu définitif, M. C... a ensuite été muté à Toulouse, sur un poste de conseiller support, à compter du 14 mai 2008. Cependant l'intéressé a sollicité à plusieurs reprises son affectation à Aurillac puis, à défaut d'obtenir satisfaction, a entamé une grève de la faim en avril 2010. Par une décision n° 11013 du 19 janvier 2011, La Poste, suivant l'avis favorable rendu par le comité médical le 12 janvier 2011, a placé d'office M. C... en congé de longue durée pour une période de six mois, à compter du 1er décembre 2010 en raison des troubles psychologiques dont il était atteint, caractérisés notamment par un risque suicidaire, une pathologie dépressive et une psychorigidité. Ce congé de longue durée a été renouvelé à plusieurs reprises et en dernier lieu par une décision du 27 janvier 2014 qui précise que, compte tenu de l'avis du comité médical du 8 janvier 2014, M. C... est apte à reprendre le travail sous réserve d'une affectation sur un poste compatible avec son état de santé et que, dans l'attente de recherche d'un poste adapté, il y a lieu de prolonger le congé de longue durée du 1er décembre 2013 au 31 mai 2014. M. C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de cette décision ainsi que la condamnation de La Poste à réparer les préjudices qu'il a subis et il doit être regardé comme relevant appel du jugement du 19 février 2018 rejetant ses demandes.
Sur les conclusions en annulation de la décision du 27 janvier 2014 :
2. Aux termes de l'article 7 du décret du 14 mars 1986 : " Les comités médicaux (...) sont consultés obligatoirement en ce qui concerne : (...) 2. L'octroi des congés de longue maladie et de longue durée ; 3. Le renouvellement de ces congés ; 4. La réintégration après douze mois consécutifs de congé de maladie ou à l'issue d'un congé de longue maladie ou de longue durée ; 5. L'aménagement des conditions de travail du fonctionnaire après congé ou disponibilité ; (...) Le secrétariat du comité médical informe le fonctionnaire : (...) - de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de faire entendre le médecin de son choix (...) L'avis du comité médical est communiqué au fonctionnaire sur sa demande".
3. En premier lieu, ainsi que l'ont jugé pertinemment les juges de première instance, aucune disposition du décret n°86-442 du 14 mars 1986 relatif à l'organisation des comités médicaux n'impose que le médecin du travail établisse une fiche d'aptitude préalablement à la tenue du comité médical ni, par conséquent, que ce document soit communiqué spontanément à l'agent. Si, en l'espèce, il ressort des pièces du dossier qu'une telle fiche d'aptitude a bien été établie le 19 décembre 2013 par le médecin du travail, la circonstance, à la supposer établie, que cette fiche ne lui ait pas été communiquée spontanément, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C... a été informé par lettre du 11 décembre 2013 dont il a accusé réception le 18 décembre 2013 que le comité médical se réunirait le 8 janvier 2014 à 9h à la DOTC Midi Pyrénées Sud pour examiner sa demande de reprise après un congé de longue durée. Ce courrier précisait qu'il pouvait demander la communication de son dossier et des conclusions du médecin agréé, et qu'il pouvait formuler des observations ou demander à être représenté par un médecin de son choix. Si M. C... soutient que l'avis du médecin agréé ne lui a pas communiqué, il ne résulte d'aucune disposition que cet avis doive être communiqué spontanément à l'intéressé. Par ailleurs et alors qu'il était invité à demander la communication des conclusions du médecin agréé par courrier du 11 décembre 2013, M. C... n'allègue pas avoir sollicité ce document. Enfin M. C... ne peut utilement se prévaloir de la note d'information n° 959, document interne à La Poste, ni du " guide memento ", lesquels sont dépourvus de caractère impératif. Ainsi le moyen, tiré de ce que la procédure ayant conduit à l'édiction de la décision du 27 janvier 2014 serait irrégulière à défaut de lui avoir communiqué l'avis du médecin agréé, doit être écarté.
5. En troisième lieu, M. C... fait valoir qu'il a été privé de la possibilité d'être entendu par le comité médical dès lors que l'adresse à laquelle il se réunissait ne figurait pas sur le courrier du 11 décembre 2013. Cependant, la mention selon laquelle le comité médical se réunirait à la DOTC Midi Pyrénées Sud suffisait à mettre l'intéressé en mesure de connaitre l'adresse de la réunion, dès lors que M. C... avait auparavant reçu plusieurs courriers, les 15 juin 2011 et 16 février 2012 notamment, sur lesquels figuraient l'adresse exacte de la DOTC Midi Pyrénées Sud, avenue des Minimes 31200 Toulouse.
6. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C... a demandé le 28 janvier 2014 la communication de l'avis du comité médical, lequel lui a été transmis le 29 janvier 2014. Si M. C... fait valoir que l'avis qui lui a été communiqué n'était qu'une retranscription de l'avis original du comité médical, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision du 27 janvier 2014, et ne l'a pas privé de la possibilité de contester cet avis, y compris dans sa régularité.
7. En cinquième lieu, M. C... soutient que la décision attaquée serait entachée d'erreur d'appréciation dès lors qu'il n'était pas atteint de maladie mentale au sens de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. C... a été placé en congé de longue durée d'office depuis le 1er décembre 2010 et qu'un tel congé a été renouvelé à plusieurs reprises en raison des troubles psychologiques dont il souffrait, caractérisés notamment par un risque suicidaire, une pathologie dépressive et une psychorigidité. Si son état mental s'est ensuite amélioré, conduisant à ce que le spécialiste agréé le 25 novembre 2013, le médecin du travail le 19 décembre 2013, ainsi que le comité médical lors de sa séance du 8 janvier 2014, reconnaissent son aptitude à la reprise du travail, ces avis étaient néanmoins conditionnés, de façon unanime, à ce que le retour en exercice se fasse sur un poste adapté, sans fonction d'encadrement, sans exigence de rendement et avec un contact limité avec le public et ses collègues de travail. Aussi, dans l'attente d'un poste adapté, le comité médical a émis un avis favorable à la prolongation du congé de longue durée. Dans ces conditions, La Poste a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 et sans commettre d'erreur d'appréciation, prolonger le congé de longue durée de M. C... par sa décision du 27 janvier 2014.
8. Enfin, M. C... fait valoir que l'absence de poste compatible avec son état de santé n'était pas une circonstance permettant de justifier légalement son congé de longue durée. Toutefois, si l'article 33 du décret du 14 mars 1986 dispose qu'" à l'expiration du congé de longue durée, le fonctionnaire est réintégré éventuellement en surnombre ", l'article 43 du même décret prévoit que : " Le comité médical consulté sur la reprise des fonctions d'un fonctionnaire qui avait bénéficié d'un congé de longue maladie ou de longue durée peut formuler des recommandations sur les conditions d'emploi du fonctionnaire, sans qu'il puisse être porté atteinte à la situation administrative de l'intéressé (...) ". Aussi, lorsque le comité médical se prononce favorablement à la reprise du travail par l'agent mais en formulant des recommandations, il appartient à l'autorité administrative de rechercher si un poste ainsi adapté peut être proposé au fonctionnaire et si elle ne peut pas lui proposer un tel poste, le congé se poursuit ou est renouvelé. Par suite, eu égard à la teneur de l'avis du comité médical sur la situation de M. C..., qui a estimé que la reprise du travail devait intervenir sur un poste adapté, La Poste n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation, ni n'a commis le détournement de pouvoir allégué, en prolongeant le congé de longue durée de M. C... par la décision du 27 janvier 2014.
9. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 27 janvier 2014.
Sur les autres conclusions :
10. M. C... fait valoir qu'il a subi des faits de harcèlement moral dès lors que la décision de prolonger le congé de longue durée avaient pour seul objet de masquer l'incapacité de La Poste à le réintégrer. Toutefois, il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. En l'espèce, en se bornant à soutenir que La Poste l'aurait continuellement humilié et opposé des refus non fondés à ses demandes de mutation, sans accompagner ces allégations de faits précis, circonstanciés et concordants, M. C... ne peut être regardé comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. En l'absence de tels agissements, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions sur ce point.
11. En l'absence d'illégalité fautive commise par La Poste, les conclusions de M. C... tendant à ce que son employeur soit condamné à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'il aurait subi du fait de l'illégalité de la décision du 27 janvier 2014 prolongeant son congé de longue durée, ne peuvent qu'être rejetées.
12. Le présent arrêt qui rejette les conclusions de M. C... tendant à l'annulation de la décision du 27 janvier 2014 n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions du requérant sur ce point doivent être rejetées.
13. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de La Poste, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. C... sur ce fondement. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de La Poste présentées sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de La Poste tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à La Poste.
Délibéré après l'audience du 8 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme E... H..., présidente-assesseure,
Mme D... B..., première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 avril 2021.
Le président,
Didier ARTUS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 18BX02526