Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'avis du 4 avril 2016 du conseil de discipline de recours de la région Aquitaine préconisant de substituer la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours à la sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trente jours prise à l'encontre de M. D....
Par un jugement n° 1602674 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet avis du conseil de discipline de recours de la région Aquitaine.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juin 2018, M. H... D..., représenté par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois ne rapporte pas la preuve qui lui incombe des manquements, dans l'accomplissement de ses fonctions, qui lui sont reprochés ; en effet, elle ne démontre pas la réalité du manquement à la consigne d'interdiction de fumer à l'intérieur du hangar des services techniques, qui n'a pas été retenu par le conseil de discipline ; sa prétendue méconnaissance des consignes de collecte des ordures ménagères sur le site " les pépinières Vincent " et de deux bacs de collecte rue Gambetta alors en travaux ne sont pas démontrés par l'administration, dès lors que les attestations qu'elle produit sont des témoignages de complaisance, stéréotypés et dépourvus de valeur probante ; la dégradation d'un espace vert, qui est un incident ponctuel, est lié aux contraintes techniques de circulation d'un camion benne dans une impasse très étroite ; s'il lui est reproché également de ne pas noter les kilomètres parcourus, le conseil de discipline de recours a estimé qu'à défaut de production du règlement intérieur, cette obligation n'était pas prouvée, et il avait accepté de se plier à cette obligation avant l'engagement à son encontre de la procédure disciplinaire ; le grief tiré du défaut de nettoyage intégral de son camion benne n'est pas démontré, dès lors que les chauffeurs n'ont pas à faire un entretien quotidien complet de la benne et qu'il ne disposait pas de produits désinfectants ; à supposer que ce manquement soit regardé comme établi, il ne serait pas de nature à justifier une sanction disciplinaire ; la tentative d'intimidation du directeur général des services qui lui est reprochée n'est pas établie, en l'absence de témoins ;
- en retenant que la plupart des griefs retenus par la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois n'étaient pas établis, le conseil de discipline de recours, en recommandant à l'administration une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois jours, n'a pas entaché son avis d'erreur d'appréciation ; par son avis du 4 avril 2016, le conseil de discipline de recours a confirmé l'analyse du conseil de discipline, en estimant qu'une sanction du premier groupe était adaptée aux faits reprochés ;
- il a par ailleurs toujours été bien noté.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2020, la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. D... à lui verser la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Un mémoire en réplique, enregistré le 20 octobre 2020, a été présenté pour M. D... mais n'a pas été communiqué.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... A...,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteure publique,
- et les observations de Me F..., représentant la communauté d'agglomération.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 4 décembre 2015, le président de la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois a prononcé une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trente jours à l'encontre de M. D..., conducteur spécialisé de niveau I, pour des manquements répétés au devoir d'obéissance et au devoir de réserve résultant de son insubordination envers ses supérieurs hiérarchiques. Le conseil de discipline de recours de la région Aquitaine, par un avis du 4 avril 2016, a proposé de substituer à cette sanction la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours. En conséquence de cet avis, le président de la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois a, par un arrêté du 9 mai 2016, retiré son arrêté du 4 décembre 2015 et prononcé une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours à l'encontre de M. D.... Par un jugement du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé, à la demande de la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois, l'avis du 4 avril 1016 par lequel le conseil de discipline de recours avait proposé de substituer à la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trente jours la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours. M. D... relève appel de ce jugement.
Sur la légalité de l'avis du conseil de discipline de recours :
2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes des dispositions de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : (...) l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; Deuxième groupe : (...) ; Troisième groupe : (...) l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; (...) ". Aux termes de l'article 91 de la même loi : " Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil de discipline départemental ou interdépartemental dans les cas et conditions fixés par un décret en Conseil d'Etat. / L'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de recours ".
3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.
4. Il est reproché à M. D..., dans l'exercice de ses fonctions de chauffeur de benne de collecte des ordures ménagères, d'avoir manqué au devoir d'obéissance hiérarchique et au devoir de réserve, amplifiés par un comportement désinvolte et d'insubordination. A cet égard, la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois lui a reproché de ne pas avoir respecté, entre les mois de janvier et d'août 2015, l'interdiction de fumer à l'intérieur du hangar des services techniques, d'avoir manqué à ses obligations de collecte d'un site (les installations d'un pépiniériste), et de deux bacs dans la rue Gambetta de la commune de Villeneuve-sur-Lot, d'avoir détérioré lors de ses tournées un espace vert dans un lotissement, de refuser de noter les kilomètres parcourus lors de ses tournées, de refuser de laver son camion benne et d'avoir tenté d'intimider, par des manoeuvres brutales avec la benne qu'il conduisait, son responsable hiérarchique.
5. Il appartenait au conseil de discipline de recours d'Aquitaine, saisi du recours contre la décision par laquelle le président de la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois avait prononcé la sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trente jours à l'encontre de M. D..., d'apprécier si les faits reprochés à ce dernier étaient matériellement exacts, s'ils étaient constitutifs d'une faute et, en ce cas, de proposer une sanction proportionnelle à la gravité de cette faute. Il ressort à cet égard des pièces du dossier, et en particulier du procès-verbal de la réunion du conseil de discipline de recours du 4 avril 2016 que, pour estimer qu'une exclusion temporaire de fonctions de trois jours était une sanction proportionnée aux faits reprochés, le conseil a retenu à l'encontre de M. D... son refus d'appliquer les consignes tenant à l'interdiction de fumer à l'intérieur du hangar des services techniques, son manquement à des obligations de collecte à deux reprises et la détérioration lors de ses passages d'un espace vert, comme étant des faits constitutifs d'une faute de nature à justifier une sanction exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours. Cette sanction, plus légère que celle de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trente jours prononcée par le président de la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois, a été proposée au motif que les autres griefs n'ont pas pu être clairement établis, dès lors que l'obligation de noter le nombre des kilomètres parcourus n'est pas prouvée compte tenu à défaut de la production du règlement intérieur, qu'aucun témoin ne peut attester des tentatives d'intimidation du directeur général des services, que la présence de produits désinfectants pour le lavage des bennes, qui est mise en cause par l'intéressé pour expliquer au moins en partie les insuffisances reprochées, n'est pas démontrée par des factures d'achats, et que le non-respect des obligations de collecte apparaît tout au plus ponctuel et ne ressort pas des fiches de notation de l'intéressé.
6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le requérant ne conteste pas sérieusement les faits relatifs à sa méconnaissance de l'interdiction de fumer à l'intérieur du hangar des services techniques en se bornant à soutenir que les lieux sont suffisamment aérés et que ses collègues adoptent un comportement similaire.
7. En deuxième lieu, le refus de M. D... de noter son kilométrage à l'occasion des tournées de collecte, dénoncé sur un rapport d'incident du 7 avril 2015 rédigé par son supérieur hiérarchique direct, doit être regardé comme établi dès lors que l'existence de cette consigne résulte suffisamment de la pratique des autres conducteurs, à laquelle d'ailleurs le requérant s'est finalement soumis.
8. En troisième lieu, le requérant, chauffeur expérimenté ayant le grade de conducteur spécialisé, ne conteste pas avoir dégradé, à plusieurs reprises, un espace vert, dégradations portées à la connaissance de l'administration par la plainte d'un riverain le 30 juillet 2015 suite à l'arrachage de piquets délimitant cet espace vert de la voie publique, en se bornant à expliquer cet incident par les contraintes techniques afférentes à la conduite d'un camion benne dans une impasse, lesquelles n'étaient pas insurmontables.
10. En quatrième lieu, la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois a reproché à M. D... de ne pas respecter les consignes de nettoyage et de désinfection des camions bennes, obligation que sa fiche de poste vise expressément, et a produit à cet effet des rapports d'incident précis et circonstanciés, corroborés par ses fiches de notation entre 2001 et 2014, qui relèvent régulièrement l'attitude désinvolte et le manque de rigueur de l'intéressé et ses manquements aux consignes de sécurité et d'hygiène, alors qu'en sa qualité de membre du conseil d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le requérant ne pouvait les ignorer. Par ailleurs, le fait que le médecin de prévention ait formulé, le 9 décembre 2014, des recommandations assorties de restrictions lui interdisant, lors du nettoyage de son camion, tout mouvement impliquant de lever les bras en hauteur, et préconisant la fourniture d'un équipement adapté, n'est pas de nature à établir que ses troubles de santé l'auraient empêché d'accomplir ses tâches de nettoyage, alors que la communauté d'agglomération a établi, par les factures qu'elle a produit en première instance, avoir mis des produits et l'équipement nécessaires au nettoyage à la dispositions des agents, et avoir réorganisé le local de nettoyage afin de faciliter l'accomplissement de cette tâche.
11. En cinquième lieu, il est reproché à M. D... de ne pas avoir procédé, lors de sa tournée du 18 février 2015, à la collecte des ordures ménagères sur le site d'un pépiniériste, ainsi que d'avoir refusé, le 24 juillet suivant, de vider deux bacs de collecte rue Gambetta à Villeneuve-sur-Lot, dont il ne conteste pas la matérialité. A cet égard, si M. D... a produit une attestation collective de ses collègues de travail témoignant qu'il respecte les consignes de sécurité, le code de la route et qu'il a une conduite non dangereuse ou agressive, ce témoignage est néanmoins sans rapport avec les faits reprochés de manquement à son obligation de collecte. Les circonstances invoquées que ce manquement doit être mis en relation avec les difficultés fonctionnelles et relationnelles auxquelles le service est confronté et que l'absence de collecte de deux bacs de collecte des ordures ménagères, le 24 juillet 2015 est imputable aux travaux dans la rue en question, ne sauraient justifier les manquements commis, bien qu'ils ne soient pas récurrents, et remettre en cause leur qualification de faute.
12. Ainsi, il ressort des nombreux rapports d'incidents et du rapport disciplinaire, corroborés par les évaluations annuelles depuis plusieurs années, que la manière de servir de l'intéressé laisse à désirer et qu'il est régulièrement rappelé à l'ordre concernant notamment la propreté de son camion, qu'il lui incombe de nettoyer et de désinfecter régulièrement.
13. Eu égard au caractère répétitif des refus de M. D... d'accomplir correctement les tâches confiées, à son comportement désinvolte vis-à-vis de sa hiérarchie, avec laquelle il entretient des relations tendues, et alors même qu'il n'est pas démontré que, par des manoeuvres brutales de son camion benne, le requérant aurait tenté d'intimider le directeur général des services le 2 avril 2015, et à la circonstance qu'il a persisté dans son comportement malgré plusieurs rappels à l'ordre et une précédente sanction disciplinaire infligée pour des faits de même nature le 19 juin 2013, en préconisant une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois jours, le conseil de discipline de recours a entaché son avis d'une erreur d'appréciation.
14. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'avis du conseil de discipline de recours du 4 avril 2016.
Sur les frais liés à l'instance :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse la somme que M. D... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme que la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois demande sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... D... et à la communauté d'agglomération du Grand Villeneuvois.
Délibéré après l'audience du 22 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. C... A..., président,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme E... B..., première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 05 mai 2021.
Le président,
Didier A...
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18BX02493