Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 9 mars 2020 par lequel le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2001778 du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 mars 2021, M. A..., représenté par Me Zoungrana, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 décembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 mars 2020 par lequel le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet du Lot de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa demande de titre dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son avocat sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 35 et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- cet arrêté a méconnu les dispositions de l'article L. 5221-20 du code du travail et, par voie de conséquence, les stipulations de l'article 3 du l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- cet arrêté a méconnu les dispositions l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'illégalité de la décision lui refusant le séjour prive de base légale la décision lui faisant obligation de quitter le territoire.
Par un mémoire enregistré le 1er juillet 2021, le préfet du Lot conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er avril 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Manuel Bourgeois a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M A..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1971 à Moha Ou Hammou (Maroc), est entré sur le territoire français le 22 août 2014 sous couvert d'un visa de long séjour. Il a bénéficié d'une carte de séjour en qualité de travailleur saisonnier du 22 août 2014 au 21 août 2017. Toutefois, par un arrêté du 9 mars 2020, le préfet du Lot a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dont il a la nationalité en tant que pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement 11 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...) ". En outre, l'article R. 5221-20 du code du travail prévoit que : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : (...) / 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; (...)/ 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 (...) " .
3. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'arrêté litigieux que le préfet du Lot a examiné la demande de M. A... tendant à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié au regard des stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain, a constaté que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) avait émis un avis défavorable à la délivrance d'une autorisation de travail à l'intéressé, en a déduit qu'il ne remplissait pas les conditions auxquelles les dispositions précitées de l'article R. 5221-20 du code du travail subordonnaient la délivrance d'un titre sur le fondement de ces stipulations puis a considéré qu'il n'y avait pas davantage lieu de lui délivrer un tel titre à titre discrétionnaire au vu des éléments de fait sur lesquels a porté son appréciation, notamment l'absence de ressources stables et suffisantes. Ainsi et contrairement à ce que soutient l'appelant, le préfet n'a pas entendu faire de ce dernier motif une condition légale de délivrance du titre de séjour sollicité mais uniquement un élément d'appréciation pour déterminer s'il y avait lieu de lui délivrer ce titre à titre discrétionnaire bien qu'il ne remplisse pas les conditions légales auxquelles les dispositions précitées de l'article R. 5221-20 du code du travail en subordonnent la délivrance.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée à l'étranger qui dépose plainte contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions visées aux articles 225-4-1 à 225-4-6 et 225-5 à 225-10 du code pénal ou témoigne dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. Cette carte de séjour temporaire ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. Elle est renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / En cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, une carte de résident est délivrée de plein droit à l'étranger ayant déposé plainte ou témoigné ". L'article 225-4-1 du code pénal dispose que : " I. - La traite des êtres humains est le fait de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir à des fins d'exploitation dans l'une des circonstances suivantes : /1° Soit avec l'emploi de menace, de contrainte, de violence ou de manœuvre dolosive visant la victime, sa famille ou une personne en relation habituelle avec la victime ; / 2° Soit par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de cette personne ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ; / 3° Soit par abus d'une situation de vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, apparente ou connue de son auteur ; / 4° Soit en échange ou par l'octroi d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage. / L'exploitation mentionnée au premier alinéa du présent I est le fait de mettre la victime à sa disposition ou à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre la victime des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteintes sexuelles, de réduction en esclavage, de soumission à du travail ou à des services forcés, de réduction en servitude, de prélèvement de l'un de ses organes, d'exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre la victime à commettre tout crime ou délit. (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, le 10 septembre 2019, M. A... a déposé plainte à l'encontre de l'employeur chez lequel il avait été embauché en tant que saisonnier le 27 juin 2017, sur un emploi d'élagueur, au motif que celui-ci lui aurait demandé de lui verser la somme de 2 300 euros pour le renouvellement de sa carte de séjour puis aurait rédigé, pour son compte et sans l'en informer, une lettre de démission datée du 26 janvier 2018 alors qu'il a été victime, sous la responsabilité de cet employeur, d'un accident du travail qui l'a contraint de cesser de travailler le 3 août 2017. Toutefois les faits ainsi dénoncés, qualifiés, dans la plainte susmentionnée, d'abus de faiblesse et de faux en écriture et auxquels l'appelant ajoute, dans sa requête, les qualifications pénales d'escroquerie et d'extorsion de fonds ne sont manifestement pas susceptibles de caractériser le délit de traite des êtres humains réprimés par les dispositions précitées de l'article 225-4-1 du code pénal relatives à la traite des êtres humains sans que cette question puisse être regardée comme soulevant une difficulté sérieuse. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En troisième et dernier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui refusant le séjour pour demander l'annulation de la décision subséquente lui faisant obligation de quitter le territoire.
7. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux du 9 mars 2020. Par suite sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Lot.
Délibéré après l'audience du 30 août 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2021.
Le rapporteur,
Manuel Bourgeois
Le président,
Didier Artus
La greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°21BX01213