Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme globale de 25 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi à la suite de sa prise en charge au sein de cet établissement de santé le 21 mai 2017.
Par un jugement n° 1704401 du 21 mars 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 mai 2019 et le 5 mai 2021, M. B..., représenté par Me Burtin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse et l'ONIAM à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices consécutifs à sa prise en charge
le 21 mai 2017 ;
3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice lié au refus de cet établissement de lui communiquer son dossier médical ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que :
- le centre hospitalier universitaire de Toulouse a commis une faute en l'autorisant à rentrer chez lui dès le soir du 21 mai 2017, sans aucun traitement antidouleur, dans un véhicule non médicalisé alors qu'il présentait de multiples contusions et fractures et que l'état de son cerveau aurait dû être contrôlé compte tenu des circonstances de sa chute de vélo à 60 km/h, à l'occasion de laquelle il avait perdu connaissance ; cet établissement de santé a d'ailleurs reconnu avoir commis une telle faute en le rappelant le lendemain pour l'informer de l'existence d'une hémorragie cérébrale nécessitant son hospitalisation en urgence ;
- cette faute est à l'origine d'une hospitalisation d'une durée de douze jours, du stress qu'il a subi jusqu'à son admission au centre hospitalier de Tarbes le 22 mai 2017, des souffrances qu'il a endurées à l'occasion de son transport depuis le centre hospitalier universitaire de Toulouse jusqu'à son domicile et du fait de ses fractures et de son hémorragie cérébrale ;
- l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) retient à tort que son état de santé actuel ne serait imputable qu'au traumatisme subi du fait de sa chute à vélo et que les seuils permettant une indemnisation par la solidarité nationale ne sont pas atteints ; le rapport d'expertise sur lequel s'appuie l'Office est partiel et partial ;
- il subit un préjudice du fait de son incapacité à avancer ses frais médicaux et paramédicaux et se trouve en situation de détresse financière, devant assumer seul la charge de sa fille étudiante alors qu'il ne perçoit que le revenu de solidarité active et ne peut pas reprendre son activité antérieure de peintre en bâtiment ;
- l'expert judiciaire n'a pas procédé à une évaluation de sa situation physique, psychique et morale ; c'est à tort que l'expert a retenu qu'il ne présente pas de perte de gains professionnels alors qu'il n'a pu finir de repeindre sa maison, ni reprendre son activité professionnelle de peintre en bâtiment ; le taux de déficit fonctionnel temporaire proposé par l'expert est insuffisant, de même que le taux de 6 % retenu s'agissant du déficit fonctionnel permanent ; le préjudice d'incidence professionnelle qu'il a subi doit être indemnisé ; l'évaluation par l'expert de ses souffrances à un degré de 2,5 sur une échelle de sept est insuffisante ; l'expert a omis de tenir compte de son préjudice esthétique temporaire et de son préjudice sexuel ; son préjudice esthétique a été sous-évalué par l'expert ; son préjudice d'agrément doit être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ; l'aide qui a dû lui être apportée par sa compagne a été sous-évaluée par l'expert.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2019, le centre hospitalier universitaire de Toulouse, représenté par la SELARL Montazeau et Cara, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité ;
- la sortie de M. B... dans la soirée du 21 mai 2017 n'a entraîné aucun dommage ;
- la réalité des préjudices allégués n'est pas établie ;
- M. B... n'établit pas avoir sollicité, avant de saisir le tribunal, la communication de son dossier médical, qui lui a en tout état de cause été communiqué le 9 février 2018 ;
- la réalité d'un préjudice résultant d'un supposé retard de communication du dossier médical n'est pas établie.
Par un mémoire, enregistré le 26 septembre 2019, l'ONIAM, représenté par Me Ravaut, conclut à sa mise hors de cause.
Il soutient que les conditions d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies.
Par ordonnance du 7 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 7 juin 2021.
Par une décision du 1er août 2019, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. B... l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,
- les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Montazeau, représentant le centre hospitalier universitaire
de Toulouse.
Considérant ce qui suit :
1. Alors qu'il participait à une course cycliste le 21 mai 2017, M. B... a été victime d'une chute à la suite de laquelle il a perdu connaissance et été transporté par les pompiers au centre hospitalier universitaire de Toulouse. Après divers examens, notamment un scanner cérébral, il a été renvoyé à son domicile le soir même, où il a été transporté par un véhicule sanitaire léger. Le lendemain matin, le centre hospitalier universitaire de Toulouse a recontacté l'intéressé pour l'informer de ce qu'une seconde interprétation du scanner cérébral réalisé la veille avait mis en évidence des contusions oedémato-hémorragiques fronto-basales droites associées à une hémorragie sous-arachnoïdienne discrète en regard, justifiant sa réadmission en urgence au centre hospitalier. M. B... a alors été admis au centre hospitalier de Bigorre le 22 mai 2017, où il est demeuré hospitalisé jusqu'au 2 juin suivant pour une surveillance de son hématome cérébral. Par un courrier du 21 juillet 2017, M. B... a demandé au centre hospitalier universitaire de Toulouse l'indemnisation des préjudices consécutifs, selon lui, au retard de diagnostic de l'hémorragie cérébrale dont il était atteint le 21 mai 2017. Il relève appel du jugement du 21 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme totale de 25 000 euros en réparation de ses préjudices, et, dans le dernier état de ses écritures, demande à la cour, d'une part, de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse et l'ONIAM à lui verser la somme 20 000 euros en réparation des préjudices consécutifs à sa prise en charge médicale le 21 mai 2017, d'autre part, de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice lié au refus de cet établissement de lui communiquer son dossier médical.
2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) ".
3. M. B... reproche au centre hospitalier universitaire de Toulouse un retard de diagnostic de l'hémorragie cérébrale dont il souffrait lors de son admission au sein de l'établissement le 21 mai 2017 et dont il n'a été informé que le lendemain matin, après qu'il ait passé une nuit à son domicile. Il résulte toutefois de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise diligentée par le tribunal de grande instance de Tarbes dans un litige opposant l'intéressé au RSI et à sa mutuelle, qui peut être utilisé à titre d'élément d'information, que ce retard de diagnostic n'a pas eu de répercussion sur le plan médical pour l'intéressé, qui a seulement été placé en observation au centre hospitalier de Bigorre à compter du 22 mai 2017 pour surveiller une éventuelle aggravation, qui ne s'est pas produite. Ainsi, la circonstance que l'hémorragie cérébrale que présentait M. B... n'ait été diagnostiquée que le 22 mai 2017, à la faveur d'une seconde interprétation du scanner cérébral réalisé la veille, ne saurait être regardée comme étant à l'origine de son hospitalisation pour une durée de douze jours, exclusivement en lien avec l'état initial du patient.
4. Si M. B... soutient également qu'il a subi dans la soirée du 21 mai 2017 un stress et des douleurs, en particulier lors de son transport par un véhicule non médicalisé depuis le centre hospitalier universitaire de Toulouse jusqu'à son domicile, il ne résulte pas de l'instruction qu'un tel préjudice trouverait sa cause dans le retard de diagnostic invoqué, alors que M. B... présentait par ailleurs de multiples contusions et fractures ainsi qu'un traumatisme crânien, à l'origine de ses angoisses et douleurs. Et contrairement à ce qui est soutenu, il résulte en outre de l'instruction que le CHU de Toulouse a, le 21 mai 2017, prescrit à l'intéressé un traitement antalgique avant de le renvoyer à son domicile.
5. M. B... ne démontre enfin pas que le retard de diagnostic en cause, qui n'a eu aucune incidence sur le plan médical, serait à l'origine des difficultés financières dont il fait état, qui sont imputables, non pas à la faute médicale invoquée, mais au grave accident de vélo survenu le 21 mai 2017.
6. Aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " (...) Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire (...) ".
7. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, il ne résulte pas de l'instruction que les préjudices dont M. B... demande la réparation puissent être regardés comme directement imputables à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins. Par suite, l'indemnisation de son dommage ne saurait être mise à la charge de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale.
8. Aux termes de l'article L. 1111-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction en vigueur : " Toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en œuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé, à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers. / Elle peut accéder à ces informations directement ou par l'intermédiaire d'un médecin qu'elle désigne et en obtenir communication, dans des conditions définies par voie réglementaire au plus tard dans les huit jours suivant sa demande et au plus tôt après qu'un délai de réflexion de quarante-huit heures aura été observé. (...) ".
9. M. B... demande également la condamnation du centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice consécutif au retard de l'établissement à lui communiquer son dossier médical. Il ne fournit toutefois aucune précision sur le préjudice que lui aurait causé ce prétendu retard, et ne démontre ainsi pas l'existence d'un préjudice. Ses conclusions indemnitaires ne peuvent dès lors qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité.
10. Enfin, si M. B... demande à la cour de mettre à la charge du CHU de Toulouse les " entiers dépens ", les frais de l'expertise ordonnée par le juge judiciaire ne constituent cependant pas des dépens exposés dans le cadre de la présente instance.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, être accueillies. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme que demande le centre hospitalier universitaire de Toulouse au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Toulouse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au centre hospitalier universitaire de Toulouse, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 28 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Brigitte Phémolant, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
Mme Beuve Dupuy, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2021.
La rapporteure,
Marie-Pierre Beuve Dupuy
La présidente,
Brigitte Phémolant
Le greffier,
Fabrice Benoit
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX02045