Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... E... et Mme D... C..., épouse E..., ont demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui leur a été réclamé au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.
Par un jugement n° 1802345 du 18 mars 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 mai 2021, M. et Mme E..., représentés par Me Marbot, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 18 mars 2021 ;
2°) de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui leur a été réclamé au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015 pour un montant total de 35 866 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le tribunal n'applique pas le dispositif de la taxe sur la valeur ajoutée jusqu'à son terme, les empêchant de récupérer une taxe sur la valeur ajoutée payée qui est ensuite appliquée sur les loyers perçus et ainsi collectée ;
- les rappels de TVA constitue un enrichissement sans cause dès lors que la vente de l'appartement en cause était dispensée de TVA en application de l'article 257 bis du code général des impôts.
Par un mémoire, enregistré le 22 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens développés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Gay;
- les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Marcel, représentant M. et Mme E....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme E... ont acquis un appartement dans une résidence de tourisme " Les Chalets de la Vallée d'Or " à Valloire, le 27 novembre 2015, pour un prix de 200 000 euros. Le 28 juillet 2016, l'administration a fait droit à la demande de M. E... tendant au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé cette acquisition d'un montant de 33 333 euros. À la suite d'une vérification de comptabilité, M. et Mme E... ont été informés, par une proposition de rectification du 28 juillet 2017, de l'intention de l'administration fiscale de remettre en cause ce remboursement et de procéder à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015. M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 18 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la décharge de ce complément de taxe sur la valeur ajoutée qui trouve son origine dans ce contrôle.
Sur les conclusions à fin de décharge des impositions :
2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ". Aux termes de l'article 257 bis du même code : " Les livraisons de biens et les prestations de services, réalisées entre redevables de la taxe sur la valeur ajoutée, sont dispensées de celle-ci lors de la transmission à titre onéreux ou à titre gratuit, ou sous forme d'apport à une société, d'une universalité totale ou partielle de biens (...) ". Aux termes de l'article 283 du même code : " (...) 3. Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation (...) ".
3. Il résulte de l'instruction que, par un acte authentique du 27 novembre 2015, M. A... a vendu à M. et Mme E..., pour un prix de 200 000 euros, taxe sur la valeur ajoutée incluse, un appartement dans une résidence de tourisme dénommée " Les Chalets de la Vallée d'or " à Valloire. Il résulte des termes mêmes de cet acte notarié et il n'est pas contesté que cette acquisition doit être regardée comme une transmission d'une universalité au sens des dispositions de l'article 257 bis du code général des impôts. Il s'ensuit, d'une part, que les parties ne pouvaient légalement mentionner, dans cet acte notarié, le prix hors taxes du bien 166 666,67 euros et le montant de 33 333,33 euros de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que le montant de 200 000 euros, taxe sur la valeur ajoutée incluse, de la vente et, d'autre part, que l'administration a pu à bon droit refuser à M. et Mme E... la déduction de cette taxe sur le fondement de l'article 257 bis du code général des impôts. La circonstance que le vendeur se serait acquitté de la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'acquisition de l'appartement en cause, n'a pas d'incidence sur la situation de M. et Mme E... qui ne pouvaient déduire cette taxe en application de l'article 257 bis du code général des impôts.
4. Il résulte de l'instruction que M. et Mme E..., en se prévalant de l'enrichissement sans cause de l'État, doivent être regardés comme soutenant que l'application des dispositions combinées de l'article 257 bis et du 3° de l'article 283 du code général des impôts, qui, respectivement, dispensent de taxe sur la valeur ajoutée la transmission d'une universalité de biens et prévoient que cette taxe est due par l'émetteur, aboutit à taxer deux fois une même opération, en méconnaissance du principe communautaire de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée. Toutefois, d'une part, il résulte des objectifs de la directive du 17 mai 1977 susvisée, interprétés par la Cour de justice des Communautés européennes, que le droit à déduction ne s'étend pas à un montant de taxe sur la valeur ajoutée facturé à tort. D'autre part, il résulte expressément de l'article 21 de cette directive que la taxe est due par toute personne qui la mentionne sur une facture ou tout document en tenant lieu. Le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée implique seulement, dans ce cas, qu'une possibilité de régularisation ne dépendant pas du pouvoir discrétionnaire de l'administration fiscale soit laissée à l'émetteur de la facture. Cette possibilité de régularisation doit être ouverte à celui-ci sans condition de bonne foi s'il a éliminé tout risque de perte de recettes fiscales. Dans le cas contraire, une telle possibilité peut être soumise à une condition de bonne foi. Les dispositions précitées des articles 257 bis et 283 du code général des impôts ne sont nullement incompatibles avec ces exigences, dès lors qu'elles n'excluent pas la possibilité de régulariser une facture mentionnant une taxe y figurant à tort. Par suite, le principe communautaire de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ne faisait pas obstacle à la récupération, conformément à l'article 257 bis et au 3° de l'article 283 du code général des impôts, d'une taxe indûment déduite car facturée à tort.
5. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui leur est réclamé au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme D... C..., épouse E..., et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,
Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère,
Mme Nathalie Gay, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.
La rapporteure,
Nathalie GayLa présidente,
Frédérique Munoz-Pauziès
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX01933 2