Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... G... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 17 juin 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé son transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il a été assigné à résidence.
Par un jugement n° 2002627 du 22 juin 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 janvier et 7 juin 2021, M. C..., représenté par Me Pougault, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 juin 2020 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 juin 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé de son transfert aux autorités italiennes et l'arrêté du même jour l'assignant à résidence ;
3°) à titre subsidiaire, constater le non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation en raison de la caducité de la décision de transfert ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'auteur des décisions contestées ne disposait pas d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
En ce qui concerne la décision portant remise aux autorités italiennes :
- cette décision est insuffisamment motivée en fait, en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 17.1 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;
- l'autorité préfectorale n'apporte pas la preuve de la bonne transmission du formulaire portant prolongation de transfert aux autorités italiennes ;
- l'autorité préfectorale ne pouvait établir un procès-verbal de carence le 1er juin 2020 alors qu'il n'a été assigné à résidence et soumis à une obligation de pointage que le 17 juin 2020 ; dès lors que l'autorité préfectorale échoue à démontrer qu'il aurait pris la fuite au sens de l'article 29 du règlement n° 1560/2003 de la commission du 2 septembre 2003, la France est devenue responsable de sa demande d'asile.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
- cette décision est insuffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est privée de base légale en ce qu'elle se fonde sur une décision de transfert aux autorités italiennes illégale ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par une décision n° 2020/016204 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux du 3 décembre 2020, M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, tel que modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118-2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Nathalie Gay a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant togolais, né le 7 août 1986, déclare être entré irrégulièrement en France le 19 octobre 2019. Il a déposé une demande d'asile, enregistrée le 5 novembre 2019 à la préfecture de la Haute-Garonne. À cette occasion, le relevé de ses empreintes décadactylaires a révélé qu'il avait fait l'objet d'un contrôle de police en Italie le 11 septembre 2019. Les autorités italiennes, saisies le 19 décembre 2019 d'une demande de prise en charge en application de l'article 13.1 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ont été destinataires, le 21 février 2020, d'un constat d'accord implicite en date du 20 février 2020 sur la base de l'article 22.7 de ce même règlement. Par deux arrêtés du 17 juin 2020, le préfet de la Haute-Garonne a décidé son transfert aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence dans le département de la Haute-Garonne pour une durée de quarante-cinq jours. M. C... relève appel du jugement du 22 juin 2020 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de la décision de transfert aux autorités italiennes :
2. Aux termes de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 précité : " 1. Le transfert du demandeur (...) de l'État membre requérant vers l'État membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'État membre requérant, après concertation entre les États membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. (...) ; 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté (...) à dix-huit-mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. (...) ". Aux termes du paragraphe 2 de l'article 9 du règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003, modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 : " Il incombe à l'État membre qui, pour un des motifs visés à l'article 29, paragraphe 2, du règlement (UE) n° 604/2013, ne peut procéder au transfert dans le délai normal de six mois à compter de la date de l'acceptation de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée, ou de la décision finale sur le recours ou le réexamen en cas d'effet suspensif, d'informer l'État responsable avant l'expiration de ce délai. À défaut, la responsabilité du traitement de la demande de protection internationale et les autres obligations découlant du règlement (UE) n° 604/2013 incombent à cet État membre conformément aux dispositions de l'article 29, paragraphe 2, dudit règlement ".
3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'État requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif, statuant au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision, a été notifié à l'administration. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. La prolongation de dix-huit mois du délai de transfert qui résulte du constat de fuite du demandeur est subordonnée à ce que l'État requérant qui ne peut procéder au transfert du fait de cette fuite en ait informé l'État responsable de la demande d'asile avant l'expiration du délai de six mois dont il aurait disposé pour procéder au transfert du demandeur si ce dernier n'avait pas pris la fuite. L'expiration du délai prolongé a pour conséquence que l'État requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
4. La requête de M. C... devant le tribunal administratif de Toulouse a interrompu le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Italie. Ce délai, qui a recommencé à courir à compter de la notification au préfet de la Haute-Garonne du jugement de ce tribunal, intervenue le 12 août 2020, et n'a pas été interrompu par l'appel du requérant devant la cour administrative d'appel de Bordeaux, a été prolongé à dix-huit mois du fait du constat de la fuite du demandeur, dont les autorités italiennes ont été informées le 6 juillet 2020. Toutefois, ce délai a expiré le 22 décembre 2021 et la France était devenue responsable de l'examen de sa demande de protection. Le litige étant dès lors privé d'objet s'agissant de la décision de transfert, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de transfert aux autorités italiennes.
5. Il n'en va toutefois pas de même en ce qui concerne la décision par laquelle le requérant a été assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours renouvelable une fois qui a reçu exécution.
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant assignation à résidence :
S'agissant de la légalité interne :
6. Par un arrêté du 2 avril 2020, le préfet de la Haute-Garonne, M. D... B..., a donné délégation à Mme F... E..., directrice des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer notamment les décisions d'assignation à résidence prévues à l'article L. 561-2 du même code. Si M. C... soutient que cet arrêté n'aurait pas été régulièrement publié à la date de la décision attaquée, il ressort des mentions du recueil de publication de cet arrêté, disponible sur internet, qu'il a été publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial n° 31-2020-086 de la préfecture de la Haute-Garonne. Le requérant ne saurait valablement remettre en cause la date de publication de ce recueil en se bornant à produire une capture d'écran de la liste des actes publiés dans le département de la Haute-Garonne en avril 2020 établie à la date du 30 avril 2020, où la mention de ce recueil ne figure pas. Au demeurant, Mme E... bénéficiait d'une délégation de signature en vertu d'un arrêté du 17 décembre 2019 applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de l'arrêté du 2 avril 2020 prévoyant son abrogation, soit le lendemain de sa publication, conformément aux règles d'entrée en vigueur des actes réglementaires fixées par l'article L. 221-2 du code des relations entre le public et l'administration. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté litigieux doit être écarté.
7. Aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / La décision d'assignation à résidence est motivée (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que la décision contestée indique les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles elle se fonde notamment l'article L. 561-2. En outre, elle indique en premier lieu que l'intéressé fait l'objet d'une décision de remise aux autorités italiennes dont l'exécution demeure une perspective raisonnable eu égard à l'accord de transfert des autorités italiennes en date du 20 février 2020 valable six mois, en deuxième lieu, que la mesure ne peut être exécutée immédiatement car elle ne peut faire l'objet d'une exécution d'office avant un délai de 48 heures et en troisième lieu, que l'intéressé justifie d'une domiciliation postale à Toulouse, commune dans laquelle il peut être assigné à résidence. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la décision d'assignation à résidence est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
S'agissant de la légalité interne :
Quant au moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de la décision de transfert aux autorités italiennes :
9. Ainsi qu'il a été indiqué au point 6, l'arrêté du 2 avril 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne, M. D... B..., a donné délégation à Mme F... E..., directrice des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer notamment les décisions de transfert prévues à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial n° 31-2020-086 de la préfecture de la Haute-Garonne. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision de transfert aux autorités italiennes du 17 juin 2020 doit être écarté.
10. La décision de transfert aux autorités italiennes mentionne, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé d'en comprendre les motifs, et dépourvue de caractère stéréotypé, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, ce moyen doit être écarté. Il en est de même, eu égard aux termes de la décision litigieuse, du moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé.
11. Aux termes de l'article 3.2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable. ". En vertu de l'article 17 de ce règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) / 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre État membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit ". Si la mise en œuvre, par les autorités françaises, des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 doit être assurée à la lumière des exigences définies par les dispositions du second alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, en vertu desquelles les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif, la faculté laissée à chaque État membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.
12. Il résulte de ces dispositions et stipulations que la présomption selon laquelle un État " Dublin " respecte ses obligations découlant de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est renversée en cas de défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'État membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant subi par ces derniers. Les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 prévoient ainsi que chaque État membre peut examiner une demande d'asile qui lui est présentée par un ressortissant d'un pays tiers, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés par ce règlement. Cette possibilité, également prévue par l'article 17 du même règlement et reprise par l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit en particulier être mise en œuvre lorsqu'il y a des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé courra, dans le pays de destination, un risque réel d'être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ce cas, les autorités d'un pays membre peuvent, en vertu du règlement communautaire précité, s'abstenir de transférer le ressortissant étranger vers le pays pourtant responsable de sa demande d'asile si elles considèrent que ce pays ne remplit pas ses obligations au regard de la Convention, notamment compte tenu de la durée du traitement et de ses effets physiques et mentaux ainsi que, parfois, du sexe, de l'âge, de l'état de santé du demandeur.
13. En application du principe qui vient d'être énoncé, il appartient au juge administratif de rechercher si, à la date de l'arrêté contesté, au vu de la situation générale du dispositif d'accueil des demandeurs d'asile en Italie et de la situation particulière de M. C..., il existait des motifs sérieux et avérés de croire qu'en cas de remise aux autorités italiennes, il ne bénéficierait pas d'un examen effectif de sa demande d'asile et risquerait de subir des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales justifiant la mise en œuvre de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013.
14. M. C... soutient qu'il existe en Italie des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs d'asile. Toutefois, comme l'a relevé la magistrate désignée par le président du tribunal administratif, l'Italie est un État membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet État membre est conforme aux exigences de ces deux conventions internationales. Si cette présomption est réfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'État membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant, M. C... n'établit pas, en s'abstenant de produire tout élément de nature à corroborer ses allégations, l'existence de défaillances en Italie qui constitueraient des motifs sérieux et avérés de croire que sa demande d'asile ne serait pas traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Ainsi, les circonstances invoquées par M. C..., tenant à l'existence de défaillances systémiques dans les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Italie, ne permettent pas d'établir qu'en s'abstenant de mettre en œuvre la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, le préfet de la Haute-Garonne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 doivent être écartés.
15. Il résulte de ce qui a été indiqué aux points 9 à 14 que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de transfert aux autorités italiennes doit être écarté.
Quant à l'autre moyen de légalité interne :
16. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois ".
17. Il ressort des pièces du dossier que la reprise en charge de M. C... a été implicitement acceptée par les autorités italiennes le 20 février 2020 et que sa remise à ces mêmes autorités devait être organisée dans un délai de six mois. Dans ces conditions, M. C..., qui ne fait état d'aucun élément permettant de considérer que son éloignement vers l'Italie ne présente pas de perspective raisonnable, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté prononçant son assignation à résidence aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.
18. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a assigné à résidence.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
19. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
20. Il résulte de ce qui a été indiqué aux points 2 à 4 que les autorités françaises sont responsables de l'examen de la demande d'asile de M. C.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de procéder à l'enregistrement de cette demande dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale.
Sur les frais liés à l'instance :
21. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. C... présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 2020 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a décidé le transfert de M. C... aux autorités italiennes.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de procéder à l'enregistrement de la demande d'asile de M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale.
Article 3 : Le surplus de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G... C... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise pour information au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Nathalie Gay, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mars 2022.
La rapporteure,
Nathalie Gay Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX00062 2