Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 2 avril 1998 sous le n° 98MA00513, présentée pour la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN (F.E.N.E.C), représentée par son président, dont le siège social est situé 13, Place des Poilus à (66000) PERPIGNAN ;
La FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement du 31 décembre 1997 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 novembre 1994 par laquelle le préfet de Région MIDI-PYRENEES a autorisé la création d'une unité touristique nouvelle sur le territoire de la commune de FORMIGUERES (Pyrénées-Orientales) ;
2°/ d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;
3°/ de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu 2°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er avril 1998 sous le n° 98MA00523, présentée pour :
1°- L'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR (ADEC), représentée par son président, dont le siège social est situé ... ;
2°- M. Marc X... demeurant 41, rue, du Maréchal Foch à PERPIGNAN (66000) ;
L'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR et M. X... demandent à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement du 31 décembre 1997 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 14 novembre 1994 par laquelle le préfet de Région Midi-Pyrénées a autorisé la création d'une unité touristique nouvelle sur le territoire de la commune de FORMIGUERES (Pyrénées-Orientales) ;
2°/ d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;
3°/ de condamner l'Etat verser à chacun d'eux la somme de 2.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative entré en vigueur le 1er janvier 2001 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2001 :
- le rapport de M. LUZI, président assesseur ;
- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par la même décision ;
Sur la fin de non recevoir opposée par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT et la commune de FORMIGUERES :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les requérants ont justifié avoir régulièrement procédé aux notifications de leurs requêtes en appel exigées par les dispositions de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme ; que, par suite, la fin de non recevoir tirée du défaut desdites notifications ne saurait être accueillie ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'eu égard à son objet social et à sa composition, la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN justifiait d'un intérêt lui donnant qualité pour attaquer l'arrêté précité du 14 novembre 1994 ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête de la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN pour défaut d'intérêt à agir ;
Considérant que par une délibération du 23 août 1994, l'assemblée générale de L'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR et M. X... a donné mandat à son président pour introduire tous recours au nom de l'association ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté la requête de L'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR au motif que son président ne justifiait pas de sa qualité pour agir au nom de l'association ;
Considérant en revanche que M. X..., qui réside à Perpignan, ne justifiait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir à titre personnel contre l'arrêté précité du 14 novembre 1994 en faisant valoir qu'il était, d'une part, usager du secteur concerné par l'unité touristique nouvelle "Camping-caravaning de la DEVEZE" et, d'autre part, membre de la commission spécialisée des unités touristiques nouvelles du comité de massif des Pyrénées, dont il n'est pas allégué, d'ailleurs, que les droits ou prérogatives auraient été méconnus ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN et L'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR devant le Tribunal administratif de Montpellier ;
Considérant que l'arrêté du 14 novembre 1994 du préfet de Région MIDI-PYRENEES a pour objet d'autoriser la création de l'unité touristique nouvelle dite "Camping-caravaning de la DEVEZE" consistant à la réalisation, sur un terrain situé sur la commune de FORMIGUERES, d'une superficie d'environ 6 hectares, d'un camping-caravaning de 150 emplacements et d'un maximum de 25 habitations légères de loisirs ;
Sur la légalité externe le la décision :
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R.145-2 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article R.145-2 du code de l'urbanisme relatif à la procédure de création des unités touristiques nouvelles "La demande est accompagnée d'un dossier constitué par un rapport et des documents graphiques décrivant :
1°- L'état du site et son environnement, celui du bâti, des infrastructures et des équipements touristiques existants avec leurs conditions de fréquentation ainsi que les principales caractéristiques de l'économie locale ;
2°- Les caractéristiques principales du projet et, notamment, de la demande à satisfaire, des produits touristiques visés, des modes d'exploitation et de promotion des hébergements et des équipements touristiques ;
3°- Les risques naturels auxquels le projet peut être exposé ainsi que les mesures nécessaires pour en assurer la prévention ;
4°- Les effets prévisibles du projet sur l'économie agricole, les peuplements forestiers et l'environnement ainsi que les mesures de protection et de réhabilitation à prévoir et l'estimation de leur coût ;
5°- Les conditions générales de l'équilibre économique et financier du projet." ;
Considérant que le dossier de demande de création de l'unité touristique nouvelle "Camping-caravaning de la DEVEZE" présentée par la commune de FORMIGUERES analyse avec précision l'état du site et son environnement, ainsi que la flore existante ; que s'il n'est pas expressément fait mention de l'existence d'une zone naturelle d'intérêt écologique floristique et faunistique (ZNIEFF), dont il n'est au demeurant pas établi qu'elle inclurait le site du projet ou serait à proximité immédiate de ce site, l'existence des "pins à crochets" qui caractérisent cette ZNIEFF est prise en compte ; que, compte tenu de l'entendue du projet l'état de la faune est suffisamment analysé ;
Considérant que le dossier de demande analyse les effets du projet sur l'environnement ainsi que les mesures destinées à les limiter en prévoyant une implantation des constructions et des emplacements qui permettent de réduire leur impact sur les différentes espèces d'arbres existants sur le site, notamment pour les plus beaux spécimens de "pins à crochets", ainsi que la plantation d'arbres pour compenser ceux qui seront abattus en utilisant les essences déjà présentes sur le site ; qu'il n'est pas établi que les mesures consistant à aménager la "zone de molleres" aurait pour effet de porter atteinte à ce milieu ; que, par ailleurs, le dossier comporte une estimation des coûts dont il ne résulte pas des pièces du dossier qu'elle serait erronée ;
Considérant que la commune de FORMIGUERES a complété le 18 juillet 1994 le dossier initialement déposé par un document portant sur les risques naturels auxquels le projet peut être exposé ; qu'il n'est pas contesté que le projet n'est pas situé en zone inondable ; que le moyen selon lequel le dossier ne tiendrait pas compte des risques sismiques manque en fait ; que les dispositions du 3° de l'article R.145-2 précité imposent que soient mentionnés au dossier de demande de création d'une unité touristique nouvelle les risques auxquels le projet peut être exposé ainsi que les mesures nécessaires à leur prévention sans faire obligation de préciser les plans d'interventions que nécessiterait la survenance d'un risque ;
Considérant qu'il n'est pas établi que les conditions de l'équilibre économique et financier du projet ne seraient pas réunies ; que la circonstance que la commune envisage de faire réaliser et gérer le projet par un organisme privé, n'implique pas que cet organisme soit désigné au stade de la demande de création ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R.145-6 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article R.145-6 du code de l'urbanisme "le commissaire de la République du département préscrit par arrêté la mise à disposition du public du dossier joint à la demande de création d'une unité touristique nouvelle ( ...). Le commissaire de la République du département adresse au président et aux membres de la commission spécialisée du comité de massif ( ...) un compte rendu des observations recueillies." ; qu'il ne résulte pas de ces dispositions que les avis émis par les administrations sur le projet doivent être mis à la disposition du public ; qu'en transmettant aux membres de la commission spécialisée du comité de massif la photocopie des observations portées au cours de l'enquête le préfet a satisfait aux dispositions précitées de l'article R.145-6 ;
En ce qui concerne les autres moyens :
Considérant que la circonstance que le préfet ait mentionné dans la décision attaquée que le projet était en conformité avec le schéma de cohérence pour la Cerdagne et le Capcir, alors même que ce schéma n'avait pas été publié à la date de la décision attaquée, n'est pas par elle-même de nature à entacher cette décision d'irrégularité ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que les infrastructures nécessaires à une unité touristique nouvelle soient réalisées à la date de la décision autorisant sa création ; que, cependant, le deuxième alinéa de l'article R.145-7 du code de l'urbanisme, dispose que l'autorisation de créer une unité touristique peut être assortie de prescriptions ; que, si le "Camping-caravaning de la DEVEZE" nécessite une station d'épuration, l'article 2 de la décision attaquée subordonne la réalisation du projet à la mise en service de la station d'épuration intercommunale du Capcir ; que, par suite, la circonstance que cette station n'était pas réalisée à la date de la décision autorisant la création du "Camping- caravaning de la DEVEZE" est sans incidence sur la légalité de cette décision ;
Sur la légalité interne de la décision :
En ce qui concerne le détournement de procédure :
Considérant que la circonstance que le "Camping-caravaning de la DEVEZE" serait situé dans un secteur soumis au régime forestier et classé en zone inconstructible au plan d'occupation des sols de la commune n'est pas de nature à établir que le recours à la procédure de création d'une unité touristique nouvelle qui permet, en vertu des dispositions de l'article L.145-10 du code de l'urbanisme, de réaliser des constructions en discontinuité avec les bourgs, villages et hameaux existants est par lui-même constitutif d'un détournement de procédure ;
En ce qui concerne la méconnaissance de précédentes décisions :
Considérant que la décision du comité interministériel du 24 juin 1980 et l'arrêté préfectoral du 12 janvier 1989 relatifs à la création de deux unités touristiques nouvelles, distinctes de celle faisant l'objet de la présente instance, ne présentent pas un caractère réglementaire ; que, dès lors, les requérants ne sauraient se prévaloir de la méconnaissance de ces décisions ;
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L.145-3-IV du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article L.145-3-IV du code de l'urbanisme : "Le développement touristique et en particulier la création d'une unité touristique nouvelle doivent prendre en compte les communautés d'intérêt des collectivités locales concernées et contribuer à l'équilibre des activités économiques et de loisirs, notamment en favorisant l'utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant et des formules de gestion locative pour les constructions nouvelles. Leur localisation, leur conception et leur réalisation doivent respecter la qualité des sites et les grands équilibres naturels" ;
Considérant que si les requérants soutiennent que la décision attaquée ne favorise pas la mise en valeur du patrimoine bâti et méconnaît la prise en compte des communautés d'intérêts des collectivités locales concernées ces moyens ne sont pas assortis de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien fondé ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le site prévu pour l'implantation de l'unité touristique nouvelle serait au nombre des espaces et milieux remarquables du patrimoine montagnard au sens du 2° de l'article L.145-7 du code de l'urbanisme ; que, compte tenu de la faible superficie du projet et de sa capacité d'accueil ainsi que du parti adopté pour limiter les atteintes portées à l'environnement associé aux mesures de réhabilitation prévues, notamment en ce qui concerne les espèces d'arbres, caractéristiques du site, dont l'abattage, réduit au strict nécessaire, sera compensé par des plantations de ces mêmes espèces, il n'est pas établi que le projet autorisé méconnaîtrait le respect du site et les grands équilibres naturels au sens du dernier alinéa de l'article R.145-3 IV précité ;
En ce qui concerne les autres moyens :
Considérant que la légalité d'une décision portant création d'une unité touristique nouvelle s'apprécie au regard des seules règles d'urbanisme qui lui sont applicables ; que, dès lors, la circonstance, à la supposer établie, que la décision attaquée méconnaîtrait les obligations relatives aux servitudes de pâturage et d'usage des eaux des communes n'est pas de nature à l'entacher d'illégalité ;
Considérant que les dispositions de l'article L.145-9 du code de l'urbanisme aux termes desquelles "Une unité touristique nouvelle ne peut être réalisée que dans une commune disposant d'un plan d'occupation des sols opposable aux tiers" n'imposent pas que le plan d'occupation des sols permette, à la date de la décision autorisant la création de l'unité touristique nouvelle, la réalisation de ce projet ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les demandes présentées par la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN et de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR devant le Tribunal administratif de Montpellier doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN, à l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR et à M. X... les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR et M. X... à payer, chacun, à la commune de FORMIGUERES la somme de 3.000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : Le jugement du 31 décembre 1997 du Tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il a rejeté les demandes présentées par la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN, de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR.
Article 3 : Les requêtes présentées par la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN, de l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR devant le Tribunal administratif de Montpellier sont rejetées.
Article 4 : L'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR et M. X... verseront, chacun, la somme de 3.000 F (trois mille francs) à la commune de FORMIGUERES au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la FEDERATION POUR LES ESPACES NATURELS ET L'ENVIRONNEMENT CATALAN, à l'ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DE L'ENVIRONNEMENT DU CAPCIR, à M. X..., à la commune de FORMIGUERES et au MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT.