Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 26 mars 2001, sous le N° 01MA00756, présentée pour la SARL ALARME SURVEILLANCE, dont le siège social est ... (06000), par Me Marie Françoise Y..., avocat ;
La SOCIETE ALARME SURVEILLANCE demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement en date du 11 mai 2000, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie au titre des exercices clos en 1990 et 1991 ;
2°/ de la décharger des cotisations litigieuses ;
Elle soutient :
- qu'il sera développé dans un mémoire ampliatif que le jugement attaqué encourt l'annulation, du fait de la méconnaissance des garanties liées à l'instauration d'un débat oral contradictoire, d'une durée de vérification supérieure à trois mois, de l'emport irrégulier de documents, de la violation des articles L.50 et L.51 du livre des procédures fiscales, du fait enfin de la grève des postes qui ne lui a pas permis de prendre en temps utile connaissance de la clôture d'instruction ; qu'il sera également établi que M. X... a fait valoir ses droits à la retraite le 31 juillet 1990 ;
La société appelante demande également la condamnation de l'administration fiscale à lui payer une somme de 8.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu, enregistré le 26 mars 2001, le mémoire présenté pour la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE ; La société demande qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ; Elle soutient qu'elle a un moyen sérieux d'annulation et que les conséquences de l'exécution du jugement sont, pour elle difficilement réparables ;
Vu, enregistré le 17 avril 2001, le mémoire additionnel présenté pour la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE ; La société conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens et par les moyens :
- que par lettres du 18 mars 1992, et du 10 avril suivant, le vérificateur a demandé des renseignements, qui lui ont servi pour établir la notification de redressement, et n'ont pas été entourés des garanties afférentes à celle-ci ; qu'il y a eu, par l'effet de l'attitude du vérificateur, une confusion entre la demande d'information et la vérification de comptabilité, qui n'a pas permis au débat oral et contradictoire de s'instaurer, d'autant plus qu'un délai trop court a été laissé à la société ; que de plus, du fait de la grève des postes, la société n'a pas eu connaissance en temps utile de la clôture d'instruction et de la date d'audience, et que là encore le débat oral et contradictoire n'a pas été respecté ;
- que la procédure est également viciée du fait de l'emport irrégulier de documents ; que le vérificateur n'a formulé aucune demande écrite pour emporter les pièces nécessaires, et n'a pas restitué ces pièces ;
- que la notification de redressement du 14 mai 1992 fait suite à une vérification de comptabilité de la société suivie d'une notification de redressement du 12 mai 1992 ; que cette pratique est contraire aux articles L.50 et L.51 du livre des procédures fiscales ;
- que pour rejeter les prétentions de la société relativement à la date de la cessation d'activité de M. X..., salarié de la société, le tribunal s'est fondé sur la circonstance que la société ne produisait pas de pièces permettant d'apprécier le bien fondé des prétentions de l'administration ; qu'elle produit de nouvelles pièces établissant la date de cessation d'activité ; que M. X... a été employé par la société du 1er octobre 1986 au 31 juillet 1990, en qualité de directeur ; que la société lui a adjoint un directeur technique chargé de l'assister et de prendre sa suite à sa retraite ; qu'un conflit s'étant élevé entre M. X... et son adjoint et les actionnaires, le Conseil de prud'hommes a été saisi, la procédure ayant finalement abouti à un procès verbal de conciliation, en date du 7 décembre 1990 ; que la société ne pensait pas, lorsqu'elle a entrepris de licencier M. X..., qu'un tel problème se poserait ;
- que contrairement à ce que soutient le vérificateur, M. X... n'était pas gérant de fait de la société ; qu'il est normal qu'en tant que directeur administratif, M. X... ait signé, sous la direction de M. A..., des déclarations et des actes pour la société ; qu'il est erroné de prétendre que M. A... n'avait pas la signature sur le compte, alors qu'il l'avait depuis le 6 octobre 1987, et la possédait seul depuis le 28 septembre 1990 ; qu'il est normal que M. X... ait récupéré les sommes figurant sur son compte courant, créé en janvier 1987, et que ces sommes, compte tenu de l'état de trésorerie de la société, n'ont pu être récupérées avant le 31 décembre 1990 ; qu'il a quitté l'entreprise le 31 juillet 1990, ainsi qu'en témoignent les pièces produites et n'a perçu de salaire que jusqu'à son départ de la société, comme le vérificateur aurait pu en trouver les preuves dans les registres ;
- que les indemnités de rupture de contrat sont normalement déductibles des bénéfices imposables de la société et exonérées chez le salarié, qu'il s'agisse d'indemnités de licenciement ou de dommages-intérêts ; que M. X... qui a créé la société, et occupait un poste de directeur administratif, a perçu une indemnité normale, compte tenu de son âge, de son importance dans la société, et de la circonstance qu'il n'avait cotisé que 147 trimestres ; que le montant de l'indemnité est conforme à la jurisprudence et à l'évolution récente des textes en matière de rémunération des dirigeants ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire enregistré le 8 juin 2001, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la demande de sursis à exécution du jugement ; il soutient que l'exécution du jugement n'est pas de nature à compromettre l'avenir de la société ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2001, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête de la société, il soutient :
- que la société a également déposé une requête afin d'obtenir la décharge de la cotisation supplémentaire établie au titre de l'impôt sur les sociétés, à laquelle elle a été assujettie au titre des exercice clos en 1990 et 1991 ; que les requêtes eu égard à leur connexité peuvent être jointes ;
- que l'argumentation sommaire de la société, relativement au défaut de débat contradictoire devant le Tribunal administratif de Nice, du fait de la grève des postes, devra être rejeté, la preuve de la réception tardive de l'avis d'audience n'étant pas apportée ;
- que la circonstance que des lettres N° 751 aient été adressées à la société, pendant le cours de la vérification, n'est pas de nature entacher celle-ci d'irrégularité ; qu'aucune disposition n'impose à l'administration de faire figurer sur l'avis de vérification de comptabilité, l'envoi de demande de renseignements ; qu'il ne peut y avoir de confusion entre les deux procédures ;
- que, par ailleurs, lorsque la vérification de comptabilité s'est déroulée au siège de l'entreprise, il appartient au contribuable d'établir l'absence de débat oral et contradictoire ; qu'en l'espèce, cette preuve n'est pas apportée et qu'au contraire la réalité d'un débat est confirmée tant par la notification de redressement que par la réponse aux observations du contribuable ; qu'enfin, l'argument tiré de la brièveté du délai laissé à la société pour répondre à la demande de renseignements du 10 avril 1992 est inopérant, la société ayant disposé d'un délai supérieur à un mois compte-tenu de la date de la notification de redressement ;
- que contrairement à ce que soutient la société, la garantie prévue par l'article L.52 du livre des procédures fiscales ne lui est pas applicable, le chiffre d'affaires étant supérieur au plafond de 900.000 F prévu par ces dispositions ;
- qu'il n'y a eu aucun emport de documents, et que simplement quelques photocopies ont été sollicitées par le vérificateur ; qu'aucun détail sur la nature des pièces originales qui auraient été emportées n'est d'ailleurs indiqué ;
- que les notifications de redressements des 12 mai et 14 mai 1992 se rapportent à des périodes distinctes et à des procédures indépendantes, et qu'il n'y a pas eu de double vérification contrairement à ce qui est soutenu ;
- qu'il appartient à la société d'établir la déductibilité de la somme de 600.000 F versée à M. X..., des charges de l'exercice 1990 ; que la société qui soutient à présent qu'il avait cessé ses fonctions le 31 juillet 1990, avait toujours prétendu que la date à prendre en compte était le 31 août 1990 ; qu'à cet effet la production d'un relevé de carrière établi par la CRAM ou la notification d'une pension de retraite à compter du 1er août 1990 ne contredisent pas les constatations faites dans l'entreprise ; que la lettre de licenciement portait comme date d'effet le 31 mai 1990 ; que M. X... a continué à signer de nombreux documents pendant le dernier trimestre 1990 ; que la poursuite
d'activité de M. X... est ainsi établie, et que le versement de l'indemnité litigieuse n'était donc pas fondé dans son principe et ne pouvait être déduit des résultats de l'année 1990 ;
- que la demande de frais irrépétibles sera également rejetée ;
- qu'il n'y a pas lieu d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué, les conséquences pour la société n'étant pas irréparables, et aucun moyen sérieux n'étant invoqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2004 :
- le rapport de Mme Paix, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Bédier, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué :
Sur la régularité du jugement :
Considérant que si la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE soutient qu'elle n'aurait pas eu connaissance de la clôture d'instruction et de la date d'audience, en raison de la grève des postes, elle ne l'établit nullement, notamment par la production des accusés de réception de convocation à l'audience ; que dès lors la production d'une photocopie d'une lettre en date du 17 mai 2000, et des accusés de réception postaux de celle-ci, par laquelle elle informe le Tribunal administratif de Nice, qu'elle n'a eu connaissance que le 3 mai 2000 de l'avis d'audience pour le 27 avril ne contredit pas utilement les mentions portées sur le jugement suivant lesquelles les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience ; qu'il en résulte que le moyen tiré par la société de l'irrégularité de la procédure devant le Tribunal administratif de Nice ne peut qu'être écarté ;
Sur le bien fondé du jugement :
S'agissant de la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant en premier lieu qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit à l'administration fiscale d'adresser des demandes de renseignements au contribuable faisant l'objet par ailleurs d'une vérification de comptabilité ; que cette démarche n'a pas, contrairement à ce que soutient la société appelante, à être précédée d'une formalité particulière, ou à être mentionnée dans l'avis de vérification ; que dès lors les circonstances que par deux lettres en date du 18 mars 1992, et du 10 avril 1992, le vérificateur ait demandé à la société des renseignements relativement à une transaction conclue avec l'un de ses salariés et aux sommes versées à celui-ci ne remettent nullement en cause la validité du débat contradictoire qui s'est engagé entre l'administration et la société contribuable ; que par suite le moyen tiré par la société de l'irrégularité de la procédure du fait de ces demandes de renseignement doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions qui interdisent à l'administration fiscale d'emporter des documents comptables de l'entreprise sans y avoir été autorisée formellement, ne s'appliquent pas aux photocopies de documents ; que si la société appelante soutient que le vérificateur aurait emporté irrégulièrement certains documents, elle ne fournit aucune précision sur les documents irrégulièrement saisis ; que par ailleurs l'administration fiscale soutient que le vérificateur n'a emporté que de simples photocopies ; que dans ces conditions et en l'absence de précisions de la société sur les documents ayant fait l'objet d'un emport irrégulier, son moyen ne peut qu'être rejeté ;
Considérant en troisième lieu, que le moyen tiré par la société de la violation des dispositions des articles L.50 et L.51 du livre des procédures fiscales au motif tiré de ce que l'administration aurait procédé deux fois à la vérification des mêmes écritures doit être écarté, dès lors que la notification de redressements du 14 mai 1992 est consécutive à la vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos en 1989 et 1990, alors que celle du 12 mai 1992 est consécutive à un contrôle sur pièces portant sur l'exercice clos en 1991 ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges ... ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a réintégré, dans les résultats de la société au titre de l'exercice clos en 1990,une somme de 600.000 F, correspondant à une indemnité que la société avait versée à M. X... à la suite du départ de celui-ci, indemnité qu'elle justifiait par un conflit à l'occasion de ce départ, le différent s'étant traduit par une transaction rattachée à l'exercice clos en 1990 ; que le vérificateur, estimant que la charge n'était justifiée ni dans son principe, M. X... étant demeuré gérant de fait de la société jusqu'en décembre 1990, ni dans son montant, la transaction intervenue entre la société et son salarié n'ayant pas été respectée, a réintégré la somme litigieuse dans les résultats de la société au titre de l'exercice clos en 1990 ; qu'il appartient à la société d'établir dans son principe comme dans son montant, la justification de la charge litigieuse ;
Considérant que pour justifier la charge de 600.000 F litigieuse, la société soutient que M. X..., qui était l'ancien gérant de la société, devenu directeur le 5 juin 1989, puis licencié le 31 mai 1990, a exigé une indemnité à la suite de son licenciement, d'un montant supérieur à celui qu'elle envisageait initialement, et qui finalement à été retenu à la somme de 600.000 F, à la suite d'une transaction intervenue le 7 décembre 1990, devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes de Nice ; qu'elle produit à cet effet une lettre en date du 31 mai 1990, licenciant avec effet immédiat M. X... ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que M. X... a continué à exercer certaines fonctions dans la société, comme en témoignent plusieurs actes signés après cette date ; qu'à cet égard, la société qui soutient que la fin de l'activité de M. X... se situerait, compte tenu du préavis, au 31 juillet 1990, avait en première instance comme dans de nombreux écrits adressés à l'administration fiscale, fixé cette date au 31 août ; que M. X... a signé des déclarations fiscales jusqu'en novembre 1990, des chèques au mois d'août 1990, a adressé le 17 décembre 1990 un courrier commercial à un client, et a perçu fin novembre 1990 une prime de la part de la société ; que dans ces conditions, et nonobstant la circonstance qu'au regard des organismes sociaux, M. X... ait perçu une pension de retraite à compter du 1er août 1990, la société n'établit nullement sa cessation d'activité au 31 juillet ou au 31 août et donc le bien fondé de la charge de 600.000 F pour l'entreprise ; qu'il en résulte que c'est à bon droit que l'administration fiscale puis le Tribunal administratif de Nice ont considéré que l'indemnité de licenciement n'était pas fondée dans son principe et que la charge ne pouvait être admise en déduction des bénéfices de l'exercice clos le 31 décembre 1990 ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête ;
Sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la requête tendant au sursis à exécution du jugement attaqué sont devenues sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; que ces dispositions s'opposent à ce que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE tendant au sursis à exécution du jugement attaqué.
Article 2 : Les conclusions de la requête de la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE tendant à l'annulation du jugement attaqué sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE ALARME SURVEILLANCE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Délibéré à l'issue de l'audience du 2 juin 2004, où siégeaient :
M. Duchon-Doris, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R.222-26 du code de justice administrative,
M. Z... et Mme Paix, premiers conseillers,
assistés de Mme Giordano, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 29 juin 2004.
Le rapporteur,
signé
Evelyne Paix
Le président assesseur,
signé
Jean-Christophe Duchon-Doris
Le greffier,
signé
Danièle Giordano
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
Classement CNIJ : 19 05 02
C
N° 01MA00756 8